On pourrait croire que non, les luttes féministes étant passées par là. Mais en réalité, nombre de femmes se sentent encore redevables d’une « obligation sexuelle » envers leur conjoint. On en parle plutôt que de faire l’autruche ?
Restez informée
Quelle drôle d’idée de rameuter ce concept d’un autre temps, directement issu du droit canonique ! On ne se sent pas vraiment concernées par cette expression fleurant bon les années 1950… Pour nous, la sexualité, c’est quand on veut, si on veut. Ça, c’est pour le discours officiel qu’on aime se raconter. Mais la vérité n’est-elle pas légèrement différente ? N’avons-nous pas tendance parfois (souvent ?) à nous forcer un peu (beaucoup ?) à faire l’amour alors que nous n’en avons pas (du tout ?) envie ? Peut-être parce que nous avons l’idée chevillée au corps et à l’inconscient « qu’il le faut bien ».
Une vieille habitude qui a la peau douce
Si devoir conjugal il y a, il n’émane plus comme autrefois de l’Église. C’est nous toutes seules qui l’avons intériorisé et nous l’imposons. Pour toutes sortes de raisons. En premier lieu souvent pour un motif très noble : faire plaisir à l’homme de notre vie. « Bien ancrée dans le logiciel des femmes, il y a cette habitude de s’oublier elles-mêmes pour contenter ceux qu’elles aiment, constate Valérie Cordonnier, sexologue. Tout comme elles acceptent de fréquenter certains des amis de leur conjoint dont elles ne raffolent pas ou de regarder avec lui un match de foot alors qu’elles détestent ce sport, elles peuvent être partantes pour un rapport sexuel alors qu’elles ne débordent pas de désir. » Derrière cette générosité peuvent aussi se cacher des motivations moins dicibles. « Certaines se sentent honteuses de ne pas nourrir un désir flamboyant, comme elles l’imaginent chez toutes les autres femmes. Alors elles font comme si, pour être dans la norme », poursuit la sexothérapeute. Avouons également que la peur que notre homme aille voir ailleurs et que notre couple soit menacé n’est sans doute pas étrangère à cette obligation sexuelle à laquelle nous nous soumettons.
Jeux de mains, jeux de vilains
Étouffer cette petite voix intérieure qui tente de se frayer un chemin jusqu’à nos oreilles et notre cerveau – « hou hou, je n’ai pas envie, mais alors pas du tout ! » – n’est a priori pas le gage d’une sexualité épanouie. C’est même plutôt la certitude de finir par s’abîmer et d’y laisser des plumes. Évidemment, tout est une question de degré. « S’obliger de temps en temps parce que l’on sait que le plaisir arrivera en route n’a évidemment pas les mêmes conséquences que se forcer tout le temps, sans que jamais le plaisir ne soit au rendez-vous, insiste Valérie Cordonnier. Dans la première situation, un cercle vertueux peut même s’enclencher : le désir peut renaître grâce à ce volontarisme qui a permis d’initier le rapport et d’aboutir finalement à une satisfaction pour tous les deux. Mais, dans la deuxième situation, la relation sexuelle devient rapidement souffrance et peut même être vécue comme une violence. » La rancœur ne manquera alors pas de s’installer contre le partenaire : on lui en voudra de n’avoir pas compris à quel point on était mal…
Quand c’est non, c’est non !
Autant en avoir conscience, il ne faut pas trop compter sur notre homme pour décrypter nos états d’âme. Tout occupé à son propre désir, il peut présupposer que si nous n’avons pas très explicitement dit non, cela équivaut forcément à un oui ! Or, les choses sont rarement aussi tranchées, comme l’explique la sexologue… « Pour certaines femmes, faire preuve d’une forme de passivité pendant que leur partenaire entreprend les préliminaires et ne pas lui rendre ses caresses vaut un refus très net. Tandis que pour certains hommes, l’indifférence d’une femme peut n’être qu’un petit jeu destiné à pimenter la relation sexuelle, un appel à vaincre ses résistances. Ce schéma peut sembler archaïque mais il demeure très actif dans l’inconscient masculin, et féminin aussi d’ailleurs : une femme respectable ne saurait se montrer trop désirante, c’est à l’homme de prendre sur lui la responsabilité de l’acte sexuel, quitte à se montrer un peu insistant. » Que de malentendus en perspective ! Plutôt que de courir ce risque, prenons l’habitude de mettre les points sur les « i » : « Chéri, ce soir, je n’ai pas envie de faire l’amour, merci à toi de l’entendre ! »
Sortir du chacun pour soi
Oui mais si on n’a jamais envie et lui tout le temps, quel tour va prendre notre vie sexuelle ? La question vaut d’être posée : notre non-désir doit-il l’emporter sur son désir… et vice versa ? Aïe, aïe, aïe, quel dilemme quasi philosophique ! « La plupart des couples se sont construits sur un contrat tacite incluant la sexualité. Si l’un décide unilatéralement et sans concertation d’une abstinence définitive, l’autre peut se sentir trahi », constate Valérie Cordonnier. Pas de panique, il y a heureusement des solutions de juste milieu. Par exemple, entendre son envie de faire l’amour et trouver notre manière à nous d’y répondre, sans nous faire violence. « Une femme peut expliquer à son conjoint qu’elle n’a plus envie d’être pénétrée, que cette pratique est devenue trop envahissante pour elle mais qu’elle est d’accord pour qu’ils se caressent mutuellement », suggère-t-elle. Rien ne nous empêche non plus de lui faire quelques suggestions qui pourraient sans doute nous rendre plus disponibles à la bagatelle : qu’il soigne son apparence et sache se rendre désirable, qu’il nous offre des fleurs ou nous prépare un dîner romantique. Des basiques qu’il est censé connaître par cœur mais nécessitant des piqûres de rappel régulières.
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