La députée LFI de Seine-Saint-Denis n’a pas hésité à raconter «le moment de détresse» qu’elle a vécu le jour où elle est allée chez le gynécologue pour avorter. Deux autres députées sont intervenues en soutien à son plaidoyer pour l’allongement de la durée légale de recours à l’avortement.
L’ambiance était électrique à l’Assemblée nationale jeudi 8 octobre. Au menu du jour : l’allongement, de 12 à 14 semaines, du délai légal pour recourir à l’avortement. En réponse à la députée de l’Hérault Emmanuelle Ménard, opposée au texte, Clémentine Autain a évoqué sa propre expérience personnelle. «Personne ici ne force les femmes à avorter», a lancé dans l’Hémicycle la députée LFI de Seine-Saint-Denis. «Non seulement je parle avec des femmes qui ont avorté, mais j’ai moi-même avorté. Le moment de détresse, je l’ai ressenti à quel moment ? C’est le jour où je suis allée chez le gynécologue et qu’on m’a expliqué qu’il n’y aura pas de place à temps pour que je puisse avorter dans les délais.» L’élue féministe a ensuite appelé à cesser de «culpabiliser» les femmes et de donner les moyens «pour qu’elles puissent le faire dans des conditions dignes, et à égalité sociale et entre les territoires.»
En vidéo, la député Clémentine Autain témoigne de son IVG
La députée LREM de l’Isère Émilie Chalas a pris la parole pour dénoncer, elle aussi, la culpabilisation des femmes qui avortent, 45 ans après la loi défendue par Simone Veil. «Je suis toujours stupéfaite de la nature des débats en 2020 sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG), moi qui ai grandi en considérant que c’était normal d’avoir cette possibilité, comme une évidence, a-t-elle commencé. Mais ça ne l’est pas. Pire, c’est le parcours du combattant. Pire, ce débat est toujours couvert de solennité et d’une forme dramatique. Qu’il l’ait été dans la bouche de Simone Veil en 1975, je peux l’entendre. Mais nous sommes 45 ans après.» Puis d’enchaîner : «Chacun dans cet hémicycle y va de son : « C’est un sujet grave, un choix douloureux, une détresse ». Ce n’est pas le cas pour toutes les femmes que j’ai rencontrées et qui ont choisi d’avorter, dont je fais partie. Et ce n’est pas parce qu’elles considèrent cet acte comme un système de contraception a posteriori. Non, elles le font en conscience, en liberté, et parfois coupables de ne pas se sentir en situation de drame… Arrêtons de culpabiliser les femmes qui avortent. Nous avons ce droit, arrêtons de ne pas l’assumer librement.»
« Une femme sur trois a eu ou aura recours à l’IVG dans sa vie »
Quelques minutes plus tard, Aurore Bergé a, à son tour, affiché sa position pro-avortement. «Dans notre pays, une femme sur trois a eu ou aura recours à l’IVG dans sa vie. Nous sommes dans cet hémicycle un certain nombre de femmes à avoir eu recours à l’avortement. Et nous n’attendons ni compassion, ni commisération, ni en fait rien. Nous attendons que les femmes puissent vivre leur accès à l’avortement comme elles l’entendent, comme elles le souhaitent et sans entrave. Les entraves continuent dans notre pays.»
En réaction à certaines remarques d’opposants, la députée LREM des Yvelines a poursuivi son plaidoyer : «Navrée de vous dire que oui, dans notre pays nous avons vécu nous-mêmes parfois des entraves à l’IVG, nous avons vécu des délais qui étaient trop longs, nous avons vécu des médecins qui nous ont obligées à écouter des battements de cœur, nous l’avons vécu et nous ne voulons pas que les femmes dans notre pays continuent à le vivre.» Finalement adopté avec le soutien de la majorité – face à un gouvernement circonspect -, le texte doit encore être approuvé par le Sénat.
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