Sarah Maldoror, réalisatrice de renom, s’est éteinte lundi 13 avril, à l’âge de 90 ans, des suites du Covid-19. Son Art s’était concentré sur l’histoire de l’Afrique, ainsi qu’aux luttes des indépendances sur le continent africain, notamment en Algérie, en Guinée et Guinée-Bissau.
« Vous avez d’ailleurs fortement contribué à combler le déficit d’images de femmes africaines tant derrière que devant la caméra.« , déclarait, en 2011, Fréderic Mitterrand, lors de la remise des insignes de chevalière de l’ordre national du Mérite à Sarah Maldoror. Un bel hommage, qui revient se poser sur cet article aujourd’hui, car cette réalisatrice, vient d’être emportée par le Covid-19, le 13 avril dernier, à Saint-Denis, dans la banlieue nord de Paris. Disparaît ainsi, à l’âge de 90 ans, une grande figure du cinéma africain et des luttes pour l’indépendance des États africains. Deux causes auxquelles elle a consacré l’essentiel de son existence. Un engagement au service de la culture noire, mais aussi de toutes les cultures.
Qui était Sarah Maldoror ?
Sarah Maldoror est née en 1938 dans le Gers (sud-ouest de la France), d’un père guadeloupéen et d’une mère métropolitaine. La jeune Sarah Ducados, de son véritable nom, grandit à Toulouse. Très tôt, elle se passionne pour le théâtre. Installée à Paris, elle intègre une École de théâtre et après avoir lu « Les Chants de Maldoror » du Comte de Lautréamont, elle adopte le nom de « Maldoror », en hommage à l’écrivain.
Engagée pour interpréter de petits rôles au théâtre, elle prend vite conscience des difficultés que rencontrent les comédiens noirs dans le milieu. En 1956, avec trois de ses amis (la chanteuse haïtienne Toto Bissainthe, l’Ivoirien Timité Bassori et le Sénégalais Ababacar Samb), elle crée la Compagnie africaine d’art dramatique Les Griots. La troupe, composée d’acteurs africains et caribéens, interprète des pièces comme « La Tragédie du Roi Christophe » d’Aimé Césaire, « Les nègres » de Jean Genet, ou encore « No Exit » de l’écrivain Jean-Paul Sartre.
Au coeur de Paris, la comédienne prend réellement conscience de la situation en Afrique. Elle rencontre et écoute des militants anticolonialistes, dont elle comprend la justesse du combat.
L’engagement
Sarah Maldoror obtient une bourse de l’Union soviétique pour étudier le cinéma à Moscou, en 1961. Elle étudie le 7ème art sous la direction de Mark Donskoï. De ce voyage ressort son idée que le cinéma est un outil idéal pour éveiller la conscience politique des masses et pour décoloniser la pensée. Elle rejoint ensuite les pionniers de la lutte des mouvements de libération africains en Guinée, en Algérie et en Guinée-Bissau aux côtés de son compagnon Mario de Andrade, poète et homme politique angolais, fondateur du Mouvement pour la libération de l’Angola (MPLA). Deux petites filles viendront s’ajouter à son destin. Dans ses camarades de lutte, nous pouvons citer, Agostinho Neto, qui deviendra président de la République populaire d’Angola, ou encore Almicar Cabral, fondateur du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert.
« Pour beaucoup de cinéastes africains, le cinéma est un outil de la révolution, une éducation politique pour transformer les consciences. Il s’inscrivait dans l’émergence d’un cinéma du tiers-monde cherchant à décoloniser la pensée pour favoriser des changements radicaux dans la société. », expliquait-elle.
De nombreux combats
La cinéaste soutient aussi des militants noirs américains des Blacks Panthers et ceux luttant contre la ségrégation raciale aux États-Unis. Elle s’engage même dans le maquis en Guinée-Bissau.
En 1969, elle réalise son premier film sur les tortures en Algérie, intitulé, « Monagambé », dont la thématique est l’incompréhension entre le colonisateur et le colonisé. Sarah Maldoror tourne également des fictions et des documentaires en Guinée-Bissau, au Cap-Vert, ou au Congo. En 1972, elle y tourne « Sambizanga », un film sur la guerre de libération de l’Angola.
Puis, elle privilégie le format portrait, pour mettre en lumière des artistes, des poètes comme Aimé Césaire ou Léon-Gontran Damas et des précurseurs telle que Toto Bissainthe. C’est une réhabilitation de l’histoire noire et de ses figures les plus marquantes.
La profession a su reconnaître cette vraie passionnée, animée par ses luttes, qui a capté les émotions de différentes sociétés via l’image. Elle est donc tout naturellement récompensée par de très nombreux prix pour ses films. Elle s’est vu décerner le prix du meilleur réalisateur par le Festival de Carthage ou le prix de l’Office catholique.
Difficile de résumer une âme aussi forte et vibrante, qui a aimé passionnément l’Afrique. Dorénavant cette femme lumineuse brille parmi d’autres étoiles dans le ciel.
Aller au cinéma serait une des activités qui manque le plus aux Français
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