Le jeu présenté par Jean-Pierre Foucault a battu tous les records d’audience en faisant fantasmer les Français qui rêvaient d’accéder au sommet de la pyramide et à son million d’euros.
« Est-ce que c’est votre dernier mot ? » Chacun se souvient de cette réplique devenue culte de Jean-Pierre Foucault, indissociable du jeu Qui veut gagner des millions ? Diffusé pour la première fois au Royaume-Uni en 1998 sous l’appellation Who Wants to Be a Millionaire ? ce quiz de culture générale s’est vite imposé comme l’un des plus populaires, décliné en plus de 140 versions à travers le monde.
Apparu dans l’Hexagone le 3 juillet 2000, à 19 h 10, sur TF1, il déclenche un raz-de-marée, avec des pics d’audience de plus de 7 millions de téléspectateurs. Un vrai phénomène pour cet horaire ! La France, de la ménagère au cadre, de l’adolescent au retraité, se pique de ce jeu à la dramaturgie soigneusement orchestrée et dont la paternité revient aux Britanniques Paul Smith et David Briggs, déjà auteurs de Que le meilleur gagne. « L’enjeu dramatique, c’est l’argent », insistait le premier avant le lancement français du divertissement.
Une recette antédiluvienne
L’appât du pactole est en effet le ressort générateur de succès du jeu. Ici, le gain maximum, 3 millions de francs (puis 4 millions de francs et 1 million d’euros), est sans commune mesure avec ce qui existait jusque-là à la télé. De quoi donner un coup de vieux à l’immuable Des chiffres et des lettres ou au Bigdil, que Qui veut gagner des millions ? remplace alors pour trois semaines en juillet lors de son lancement sur TF1.
Qui veut gagner des millions ? est un jeu universel. Que l’on soit à Paris, Londres, New York ou Tokyo, on voit la même chose.
Pas question de toucher à une formule qui gagne ! La société de production britannique, Celador, a troussé un cahier des charges intangible, que doivent respecter à la lettre les producteurs-acheteurs (Starling en France). L’ensemble de la scénographie, – éclairages, musique, décor – est identique dans toutes les versions.
Ici, point de chronomètre, mais une bande-son (entre roulement de tambour et battements de cœur) qui dramatise l’ambiance et apporte de la tension, et des teintes bleu nuit et noire là où d’ordinaire les plateaux télévisés regorgent de couleurs criardes.
Quant au présentateur, il se doit d’être averti, habillé sobrement et inspirer la confiance. Raison pour laquelle, sur ABC, l’animateur américain Regis Philbin a vite été contraint d’aller se rhabiller et de quitter son complet-veston imprimé de dollars !
En France, c’est Jean-Pierre Foucault qui endosse à merveille le costume du maître de cérémonie avec son fameux « Est-ce que c’est votre dernier mot ? » entré dans les annales du divertissement. Pour parachever l’ambiance de suspense insoutenable, les plans serrés sur l’ami(e) angoissé(e) du candidat installé(e) sur les gradins – la présence d’un accompagnant est obligatoire pour le participant – sont légion.
Des paliers qui banquent illico
Le principe du jeu : le candidat doit répondre à 15 questions (12 entre 2009 et 2016) dont les primes vont de 100 à 1 million d’euros, avec des paliers qui sécurisent les gains à 1 000 euros (ou 1 500 selon les époques du jeu) et 24 000 euros (ou 48 000), qui font que si le joueur échoue, il gagne tout de même la somme garantie. S’il ne connaît pas la réponse, le participant peut aussi choisir d’abandonner, il remporte alors le gain acquis à la question précédente. Enfin, il dispose de trois jokers : le « 50/50 » qui élimine deux réponses parmi les quatre proposées ; le « vote du public » que le candidat peut suivre ou non ; et le « coup de fil à un ami » qui lui permet de poser la question à une connaissance.
Sous haute tension
Au cours du jeu, la difficulté s’accroît et occasionne de sérieuses palpitations au candidat. En effet, au départ, les questions de culture générale posées paraissent plutôt simples, voire enfantines, pour flatter le joueur et le mettre en confiance avant d’étirer la durée et la difficulté entre chaque nouveau gain. L’émission fonctionne à l’identification : chacun peut se voir en train de répondre, d’autant qu’il suffit de téléphoner pour avoir une chance de se retrouver dans le studio et tenter de décrocher le pactole.
Avec Qui veut gagner des millions ?, TF1 casse des briques et la baraque. La chaîne arrête régulièrement la diffusion du jeu après des sessions de trois semaines afin de créer le manque. Fort de ce succès, seulement un an après sa première apparition, le programme connaît de nombreuses déclinaisons : spéciale couples, spéciale bacheliers, ou encore spéciale célébrités (où deux personnalités représentent une association avec le but d’engranger un maximum d’argent pour cette dernière).
Diffusé sur TF1 entre 2000 et 2016, le jeu est revenu à l’antenne en mai 2019, sans le légendaire Jean-Pierre Foucault, mais avec la star montante de la chaîne, Camille Combal, à 18 h 15, juste avant le feuilleton Demain nous appartient. En 2020, durant la crise sanitaire du Covid, la chaîne a même décidé de produire l’émission au domicile de l’animateur pendant les premières semaines, puis en plateau avec des célébrités répondant depuis chez eux. Mais la magie s’est peu à peu évanouie…
Peu de pactoles en poche
En France, seuls 3 candidats ont atteint le plus haut niveau de la pyramide. En 2000, 2 hommes ont empoché chacun 4 millions de francs à un mois d’intervalle. Quatre ans plus tard, 1 femme a remporté 1 million d’euros, c’était le 27 août 2004. Une belle revanche, sous le regard ému de ses filles, pour cette Gersoise qui avait perdu deux ans plus tôt à Questions pour un champion, sur France 3.
En coulisses… de l’huile sur le jeu
Les « perdants » à 1 500 euros furent parfois malmenés par leurs proches. « Des insultes fusent de temps en temps. On a déjà entendu un accompagnant reprocher à un candidat d’avoir chuté sur telle ou telle question en le traitant d’idiot », confiait Jean-Pierre Foucault. L’équipe de production apaisait les esprits en rappelant aux protagonistes l’importance de la somme recueillie, même la plus modeste.
L’appel à 1 million
La palme de la décontraction et de l’humour revient à un candidat américain qui eut recours à son premier joker à la toute fin du jeu. Le suspense est alors à son comble. Très calme, il appelle son père : « Je n’ai pas vraiment besoin de ton aide. Je voulais juste te faire savoir que je vais gagner le million de dollars », lui annonce-t-il !
Dominique PARRAVANO
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