Les Sept Mercenaires (Arte) Un tournage qui a viré à la guerre des égos entre Yul Brynner et Steve McQueen

Ce film compte parmi les classiques du western. À l’écran, les justiciers, emmenés par Yul Brynner, sont des exemples d’altruisme héroïque. Mais, hors champ, les ego sortaient les colts !

« C’est le plus grand western de tous les temps ! », s’exclama John Ford, le grand manitou incontesté du genre, en découvrant Les Sept Samouraïs, d’Akira Kurosawa (1954). L’acteur Yul Brynner est aussi subjugué et projette d’emblée d’en faire un remake au Far West. Il dégaine le premier, achète les droits pour une poignée de dollars. Six ans plus tard, les fiers guerriers du Japon du XVIe siècle seront sept desperados, de fines gâchettes en rupture de ban, qui mettront leurs six-coups au service de paysans mexicains rançonnés par une horde sauvage. Ayant débuté comme réalisateur à la télé, Yul se voit bien récidiver au cinéma. La Metro Goldwyn Mayer préfère voir la star briller à l’écran. Ça tombe bien, Brynner enrageait de ne pas être en haut de l’affiche.

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Des seconds couteaux très affûtés 

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Yul confie à John Sturges, qui a réalisé Règlements de comptes à O.K. Corral, la mission de mettre en scène ce remake du chef-d’oeuvre du maître nippon Kurosawa, qui, flatté par cette reconnaissance, lui fera livrer un sabre de cérémonie en signe d’amitié. Selon John Sturges, « c’est dans les seconds rôles que réside la force d’un film ». Bingo ! Yul Brynner apprécie très bien le fait d’être la seule star à bord. Mais l’hubris des uns et des autres va alors gentiment pourrir l’ambiance sur le plateau. Car les seconds couteaux peuvent être sacrément affûtés. Ici, c’est un gang de nouvelles stars en devenir : Horst Buchholz, Charles Bronson, James Coburn, Robert Vaughn, Eli Wallach et Steve McQueen ! La guerre des ego aura bien lieu. Au « Un pour tous » des trois mousquetaires, l’équipe préfère le chacun pour soi. Duels au soleil en vue. En plus de la partition collective, chacun en jouera une en solo : piquer la vedette à Yul Brynner ! 

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“Ça débordait de testostérone…” 

Au petit jeu du zéro fair-play, Steve McQueen a la palme. La vedette de la série Au nom de la loi n’entend pas s’enterrer sur le petit écran : il veut briller au cinéma. Pour l’anecdote, le futur King of cool, qui ne l’était pas du tout (plus mauvais camarade, tu meurs, diront ses partenaires…), a simulé un accident de voiture pour échapper à la série et rejoindre le plateau de Sturges. Dans chaque scène où McQueen est derrière Brynner, il ne cesse de jouer avec son chapeau, voire de sourire outrageusement, histoire de capter l’attention des spectateurs. À la grande fureur du plus célèbre chauve d’Hollywood, qui lui aurait balancé, sèchement : « Si j’enlève mon chapeau, qui crois-tu que les gens regarderont ?  » Ambiance ! Après sa visite sur le tournage, Neile Adam, la girlfriend de McQueen, déclara : « Le plateau débordait de testostérone ! » Cette compétition virile n’a guère perturbé Sturges qui, trois ans plus tard, sans doute friand de cette émulation virile, convoquera une partie de ses mercenaires devenus stars (McQueen, Bronson, Coburn) pour La Grande Évasion. Contre toute attente, en 1960, Les Sept Mercenaires sortit presque dans l’indifférence au pays de l’Oncle Sam (de quoi faire, un peu, dégonfler les melons sous les Stetson), et n’y connut finalement la gloire qu’après avoir triomphé sur le Vieux Continent.

Les Sept Mercenaires : dimanche 13 décembre à 20h55 sur Arte

Julien Barcilon 

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