- Chaque année, une poignée de films n’est pas montrée à la presse avant leur sortie dans les salles.
- « 20 Minutes » s’est demandé si leur nullité supposée en était la raison.
- Les réponses des professionnels lèvent le voile sur cet amusant phénomène.
Impossible pour un journal d’écrire tout le bien (ou le mal) qu’il pense d’Aquaman et le Royaume perdu, car aucun représentant de la presse ne l’aura pas vu à temps. Ce n’est que mardi soir qu’on aura découvert ce qu’il advient de Jason Momoa dans ce second volet, non pas lors d’une projection de presse, mais lors de l’avant-première publique. La raison ? Le film de James Wan n’a pas été montré à la presse. Et ils sont quelques-uns chaque année, ces films que les journaux n’ont pas pu visionner avant les spectateurs. Pourquoi nous empêcher de faire notre travail ? Peut-être simplement parce qu’ils sont nuls ? 20 Minutes s’est posé la question.
Première constatation : les professionnels – distributeurs, attachés de presse et même journalistes – ont plein de choses à dire sur ce sujet mais personne ne veut témoigner à visage découvert. Les distributeurs craignent les réactions des équipes de film. Les attachés de presse ont peur de celles des distributeurs qui les rémunèrent et les journalistes flippent à l’idée de ne plus être invités ! C’est donc sous couvert d’anonymat que nous avons obtenu quelques éléments de réponses.
Les comédies françaises sur la sellette
Les longs métrages américains sont rarement dissimulés aux journalistes mais ils sont protégés par des embargos. Les projections, parfois tardives, peuvent expliquer cela : il s’agit d’empêcher les journalistes de publier une critique avant une date et une heure précise (proche de la sortie en salle). Aquaman est vraiment une exception et cela vient sans doute de la promotion rendue difficile par les rapports explosifs entre Amber Heard et Jason Momoa (la Warner, sollicitée par 20 Minutes, n’a pas souhaité s’exprimer sur ce sujet). Les comédies françaises (Les Segpa, la saga « Ducobu », Les Revanches de maître Poutifard… en gros, une quinzaine de films par an) sont, en revanche, pléthores à nous être dissimulées avant leur sortie. « On n’a pas envie de se faire massacrer par la presse, confie une distributrice. Les journalistes font souvent la fine bouche devant ces films qui ne sont pas leur came. On préfère alors la télé ou la radio où les interprètes viennent faire le show sans qu’on parle vraiment du film. »
« C’est ce qui explique qu’on doive se taper toutes ces daubes ! » confie avec lassitude le journaliste ciné d’un talk-show télévisé. Et oui, tel est le paradoxe : certains se voient opposer des fins de non-recevoir pour découvrir ces films, alors que d’autres sont harcelés pour les voir afin de recevoir les équipes en plateau. Les attachés de presse, qui organisent les projections, sont chargés de sélectionner les supports qui seront invités selon le bon vouloir des distributeurs. « Ces derniers cherchent à limiter les risques qu’on dise du mal de leurs films, confie un attaché de presse. C’est souvent sans rapport avec la qualité du long métrage, qui est un élément subjectif. Et c’est ce qu’il faut expliquer aux équipes qui parfois prennent ombrage qu’on ne montre pas davantage leurs films à la presse. » Quand vous avez passé des mois à travailler sur un projet et que votre film n’est pas montré à une partie de la presse peut être dur à avaler, voire franchement vexant.
La terreur des distributeurs
En réalité, la plus grande crainte des professionnels tient en un mot : Allociné. Il semblerait que ce soit là que se font et se défont les futures carrières des films. « Leurs étoiles sont ce que les spectateurs regardent en priorité. Quand on craint le jugement d’un critique, il peut être en effet banni des projections, surtout s’il fait partie du panel Allociné », avoue une attachée de presse.
C’est pour cela qu’il vous faudra attendre mardi, tard dans la nuit, pour savoir ce que 20 Minutes pense d’Aquaman, un film que personne n’a pu voir, télés comprises. Alors les films qui ne sont pas montrés à la presse sont-ils forcément nuls ? « Ce qui est sûr, c’est qu’aucun chef-d’œuvre n’a jamais été caché aux médias », commente un confrère. On n’aurait pas mieux dit.
Source: Lire L’Article Complet