Cinéma : "C'est magnifique pour moi, pour le documentaire et pour la psychiatrie", réagit Nicolas Philibert, sacré par l'Ours d'or à la Berlinale

« C’est magnifique, c’est un honneur, une joie et une fierté », confie dimanche 26 février sur franceinfo, le documentariste Nicolas Philibert, réalisateur de Sur l’Adamant, qui a reçu samedi l’Ours d’or à la Berlinale. Le Français évoque une « forme de consécration » avec ce prix.

Ce documentaire embarque le spectateur à bord de la péniche « L’Adamant » qui accueille des personnes souffrant de troubles psychiatriques à Paris. « C’est magnifique pour moi, pour le documentaire et pour la psychiatrie », ajoute le réalisateur, qui précise que ce film est le premier d’un triptyque.

franceinfo : Qu’avez-vous ressenti à l’annonce de cette récompense ?

Nicolas Philibert : C’est magnifique, c’est un honneur, c’est une joie et une fierté. C’est beaucoup d’émotion. La Berlinale est l’un des trois grands festivals, donc c’est une forme de consécration pour moi. C’était un plaisir de voir un documentaire en sélection déjà, ce n’est pas évident, j’étais le seul face à 17 ou 18 fictions. Donc c’est magnifique pour moi, pour le documentaire mais aussi pour la psychiatrie qui est fragile aujourd’hui.

« Au fond, la psychiatrie nous parle de nos failles, de nos limites, de nos peurs, nos fragilités et nos vulnérabilités. »

à franceinfo

Votre film porte le nom d’une péniche qui accueille des personnes atteintes de troubles psychiatriques. Comment ce sujet est-il venu à vous ?

Je suis très attaché à la psychiatrie depuis longtemps. J’ai fait il y a 27 ans un film à la clinique psychiatrique de La Borde, et c’est quelque chose qui n’a cessé depuis de me préoccuper. Je pense que c’est une loupe sur notre monde, et pour un cinéaste, c’est inépuisable. Nous pouvons nous sentir un peu différents des patients et en même temps très proches.

Comment se prépare et se déroule le tournage d’un tel documentaire ? On ne peut pas vraiment l’écrire ?

Je dis souvent de mes films qu’il s’agit de programmer le hasard. En effet, je ne sais pas d’avance ce qu’il va se passer devant la caméra. Mon travail ne consiste pas à écrire les scènes à l’avance, mais à favoriser les choses de manière à ce que quelque chose puisse se passer entre ceux et celles que je suis venu filmer et moi. Il s’agit de semer des petites graines pour que des choses puissent pousser devant la caméra, avec le risque qu’elles ne poussent pas. Il s’agit de susciter la rencontre, de faire que la rencontre entre eux et nous soit possible. Donc cela passe par la parole, ça ne passe pas tellement par l’écrit. Il faut bien sûr écrire un petit dossier pour convaincre des producteurs, mais au-delà, tout passe par les mots, les rencontres. J’explique un peu ce que je viens faire là, je n’arrive pas d’une manière surplombante, déterminée à faire ci ou faire ça.

Il faut réussir à disparaître ?

Non, il ne faut pas disparaître. Il s’agit d’être là, d’une façon discrète mais présente. Je suis dans une présence affirmée pour filmer, il ne s’agit pas d’une caméra qui viendrait filmer en cachette, à l’insu des gens, c’est tout le contraire. Je suis là, je suis proche, je suis avec les uns et les autres, et je recueille ce que les personnes veulent bien me donner. Je ne force pas les portes, je n’insiste pas, mais j’essaie de créer un climat de confiance. Il y a beaucoup de moments sur le tournage où la caméra est dans un coin, et puis de temps en temps, je vais la chercher, parce que quelqu’un, tout d’un coup, me raconte quelque chose. Je saisis des moments sur le vif, mais aussi quelques fois quand quelqu’un vient me parler et je lui dis « attendez, je vais chercher la caméra, vous allez me raconter ça, ça m’intéresse ! »

Vous dites qu’il s’agit d’une trilogie. La suite est en tournage ?

C’est le premier volet d’un triptyque, pas d’une trilogie. Les deux autres films ne seront pas la suite. Ce seront deux films différents. On pourra voir les suivants sans être obligé d’avoir vu le premier, c’est important de le dire. Les trois films seront indépendants, mais on y retrouvera néanmoins certains protagonistes.

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