"Charlie Chaplin ou le génie de la liberté", un merveilleux documentaire de référence à voir en replay sur france.tv

Ce n’est pas un énième documentaire sur Charlot que france.tv nous propose en replay jusqu’au 13 février mais un formidable récit sur le génie follement libre de Charlie Chaplin, bien au-delà de son personnage emblématique. Long de deux heures trente, riche d’extraits de films et de documents d’archives exceptionnels, ce film d’Yves Jeuland dresse un portrait sensible et précis, à la fois de l’homme, de l’artiste et de son œuvre, tout en renouvelant le regard sur ce monstre sacré  du cinéma.

Quelles furent les racines de ses engagements humanistes qui le placèrent toujours du côté des exploités ? Comment a-t-il inventé le personnage universellement adoré de Charlot, ce clochard magnifique ? Que disaient ses films de leur époque et des convictions sociales et politiques de leur auteur ? Comment a-t-il réalisé le premier grand film anti-nazi ? Et pourquoi a-t-il dû s’exiler en Europe les 25 dernières années de sa vie ? Voici quelques unes des nombreuses questions abordées dans ce documentaire exceptionnel.

Une trajectoire fascinante, de la plus terrible misère à la plus grande fortune

Il faut dire que Charlie Chaplin est un sujet en or. Car l’artiste le plus populaire du XXe siècle a eu une trajectoire fascinante. Né dans les bas fonds de Londres en 1889, dans un univers de misère à la Charles Dickens, placé en hospice et séparé de son frère et de sa mère adorée mais aliénée à l’âge de 6 ans, il est passé du plus grand dénuement à la plus grande fortune en moins d’un quart de siècle. Alors qu’il n’était encore qu’un jeune comédien d’une troupe de pantomime en tournée aux Etats-Unis, une cartomancienne lui avait prédit un succès phénoménal et une fortune colossale. Elle disait vrai. Il n’avait pas 25 ans lorsqu’il devint l’homme le plus célèbre du monde. Et ce grâce à son personnage de Charlot, « un poète, un rêveur solitaire, à la fois vagabond et gentleman« , résumait-il avec justesse.

Si le documentaire prend le parti d’un récit chronologique, il n’a rien d’ordinaire. Il s’agit d’abord du tout premier « portrait tout en archives » de Chaplin, un défi et un travail de fourmi qui a demandé trois ans de travail à la documentariste Aude Vassallo. Il nous harponne dès les premières minutes et nous emporte avec un montage fluide où l’on ne quitte jamais Charlie Chaplin des yeux.

Le premier « portrait tout en archives » de Chaplin

Aucun spécialiste, collaborateur ou témoin n’est convié à l’écran. Au lieu de quoi est accordée une belle place aux extraits de films, qu’il s’agisse de scènes d’anthologie de ses plus grands chefs d’oeuvre choisies avec soin ou de séquences inédites, rares et surprenantes. Ces images de belle qualité, dont beaucoup ont été restaurées ces dernières années, nous permettent d’apprécier tout le génie et la grâce expressive de Chaplin, autant acteur que danseur, mime et imitateur (en plus d’être réalisateur, producteur et compositeur de musique de films).

Conté en voix off par Mathieu Amalric de sa belle voix grave, le commentaire, remarquable, met en lumière les faits en proposant une analyse fine, que complètent quelques passages éclairants et souvent émouvants des mémoires de Chaplin.

Il y a notamment ce moment clé où Charlie invente Charlot. La métamorphose se déroule sous les yeux de Mack Sennett, le patron de la compagnie de cinéma Keystone spécialiste des comédies burlesques, qui vient de l’engager à l’âge de 24 ans. « Tâchez d’être drôle« , lui lance-t-il en l’envoyant au maquillage. Chaplin revient en Charlot. Pantalon trop large et veste serrée. Chapeau trop petit et chaussures trop grandes. « Je voulais que tout soit en contradiction« , expliquait Charlie Chaplin dans ses mémoires. « Je n’avais aucune idée du personnage que j’allais jouer. Mais dès l’instant où je fus habillé et maquillé, cela fit jaillir en moi toutes sortes d’idées folles. (…) Les gags se pressaient dans ma tête.« 

Une révolution en marche

Charlie Chaplin fut une révolution en marche, un clown engagé qui se servait de la comédie pour faire passer ses idéaux humanistes et se moquer des puissants – ce qui lui valut plusieurs violentes campagnes de dénigrement. Il a parlé de la misère dans Le Kid, inspiré de son enfance, il a dénoncé la boucherie de la première guerre mondiale dans Charlot soldat (1918), il a critiqué le capitalisme et les cadences infernales du fordisme dans Les Temps modernes, il a montré l’envers du rêve américain dans L’Emigrant, il a parodié Hitler dans Le Dictateur, premier film anti-nazi de l’histoire, sorti dès 1940.

Le réalisateur Yves Jeuland dit avoir voulu avec Charlie Chaplin, le génie de la liberté, « tisser ensemble trois fils narratifs : l’histoire d’un homme, l’histoire du cinéma et l’Histoire tout court« . Avec ce documentaire qui faisait partie de la sélection officielle du Festival de Cannes 2020, il signe un documentaire de référence sur Chaplin, dont il dresse un portrait hyper précis et vivant. Celui d’un perfectionniste, d’un bourreau de travail multi-talentueux et d’une star du muet qui survécut à la naissance du cinéma parlant. Celui d’un génie attentif à son époque qui n’oublia jamais d’où il venait et ne transigea jamais avec la liberté.

Charlie Chaplin, le génie de la liberté, Documentaire (2020 – inédit – 2h25) Réalisé par Yves Jeuland et écrit par François Aymé et Yves Jeuland.
A voir sur France.tv jusqu’au 13 février 2022.

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