Victoires de la musique classique 2022 : un palmarès très féminin et un vibrant hommage au peuple ukrainien

« C’est une cérémonie qui a une saveur très particulière, celle des retrouvailles, pour célébrer la musique et les artistes », résume en fin de soirée Stéphane Bern, présentateur des 29e Victoires de la musique classique. Une cérémonie organisée au Grand Théâtre de Provence à Aix, clairement orientée vers la jeunesse et la transmission, qui a voulu très vite rendre hommage à l’Ukraine en guerre.

« Ce soir nous allons jouer l’hymne de la République d’Ukraine comme une prière, en guise de solidarité et de soutien à un peuple qui en ce moment même lutte, souffre et meurt », a annoncé la cheffe d’orchestre Ariane Matiakh. Moment d’une grande émotion, l’Orchestre philharmonique de Nice a ainsi joué l’hymne devant un public debout, tandis que les couleurs du drapeau -jaune et bleu- ont été projetées sur des panneaux vidéo mobiles au-dessus de la scène.

Contre le « rejet soudain et global des artistes russes »

Après avoir rendu hommage à son grand-père ukrainien « qui a combattu pour la liberté dans son pays avant d’être accueilli très humainement comme réfugié en France », la cheffe d’orchestre a qualifié la situation en Ukraine de « déchirante », mais s’est dite opposée au « rejet soudain et global des artistes russes ». Elle a rappelé que « beaucoup ont pris courageusement position » et que « les artistes n’ont pas à payer le prix des dérives du gouvernement de la Russie ».

Retransmise en direct sur France 3 et France Musique, la cérémonie a débuté par une chorégraphie de Mehdi Kerkouche, révélé sur internet lors du premier confinement. Sur la Symphonie n.9 de Dvorak, les pas de danse ont été interprétés par Germain Louvet, danseur étoile de l’Opéra de Paris, Chloé Lopes Gomes, soliste au Ballet de l’Opéra National du Rhin, les élèves de l’Ecole de danse du Ballet de Marseille et des danseurs de la compagnie de Kerkouche, EMKA.

Une nouvelle catégorie, « révélation chef d’orchestre »

Comme l’année précédente, l’attention a été portée aux catégories destinées aux jeunes talents, à commencer par celle nouvellement créée de « révélation chef d’orchestre » : Pierre Dumousseaud l’a emporté face aux deux autres candidates, Chloé Dufresne et Stéphanie Childress. Tous ont pu diriger à tour de rôle l’orchestre philharmonique de Nice pendant la soirée.

La « révélation soliste instrumental » de cette année est la violoniste Manon Galy, qui, lors de sa performance, a partagé avec Renaud Capuçon le 3e mouvement du concerto pour deux violons de Bach. C’est le très célèbre violoniste, à la toute fin de cérémonie, qui lui a remis le trophée, vingt-deux ans après l’avoir obtenu lui-même : « c’est émouvant de voir un jeune talent s’envoler », a-t-il dit.

La révélation lyrique a été remise elle par un acteur enfant du pays, Daniel Auteuil, mélomane et fils de chanteurs lyriques d’opéra et d’opérette. « J’ai mis pour la première fois les pieds sur une scène d’opéra, à Alger, à quatre ans, on faisait Butterfly », a-t-il raconté un peu plus tôt. « Je jouais son fils et je sentais le souffle mélodieux de la chanteuse qui me serrait. C’est pour ça que j’ai fait ce métier, pour être serré dans les bras des chanteuses », s’est il amusé. La mezzo-soprano Eugénie Joneau, elle aussi native de la région, a été élue révélation lyrique. Et a serré Daniel Auteuil dans ses bras.

A l’éminente Finlandaise Kaija Saariaho, la Victoire du compositeur

Dans les catégories réservées aux artistes confirmés, le baryton à la carrière internationale Ludovic Tézier a remporté, pour la troisième fois, la catégorie « artiste lyrique ». Quant aux violoncellistes Emmanuelle Bertrand et Sol Gabetta, elles sont les lauréates exæquo pour la catégorie « soliste instrumental ».

L’éminente compositrice finlandaise Kaija Saariaho a été sacrée cette année pour son opéra Innocence, un thriller lyrique en plusieurs langues qui avait fait sensation au Festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence en 2021. Elle est la deuxième femme à remporter cette catégorie, après Camille Pépin en 2020.

Et pour le meilleur enregistrement, c’est Thierry Escaich qui a été récompensé pour son album Cris (Radio France). Déjà maintes fois primé dans la catégorie compositeur, l’homme a ssemblé touché : « une création, c’est important », explique-t-il. « Un compositeur, ça prend un héritage, ça le transforme et ça le projette vers l’avenir ».

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