Marilyn Monroe : dix chansons qui ont forgé la légende de la star hollywoodienne

La carrière cinématographique de Marilyn Monroe s’échelonne à partir de la fin des années 40 jusqu’au début des années 60, ponctuée de collaborations avec de grands cinéastes (Otto Preminger, Howard Hawks, George Cukor, Billy Wilder, Henry Hathaway…). L’actrice a chanté sur un grand nombre de ses films, des Reines du music-hall (1948) au Milliardaire (1960) – un certain nombre étant des adaptations de comédies musicales de Broadway. Marilyn Monroe, qui désirait qu’on la considère comme une véritable artiste et pas juste comme une blonde incendiaire, a pris à cœur son métier d’actrice, mais aussi les disciplines de chant et de danse. Grande admiratrice d’Ella Fitzgerald (à qui elle apporta son soutien dans une Amérique raciste, et qui devint son amie), elle aimait beaucoup chanter. Elle a suivi des cours de chant et de diction auprès de Fred Karger, directeur musical chez Columbia Pictures dont elle s’enticha à la fin des années 40. En marge des tournages, elle a aussi enregistré quelques chansons. Florilège d’une chanteuse souvent sous-estimée.

I Wanna be Loved by You (1959)


Chanson phare du film Certains l’aiment chaud (Some Like It Hot) de Billy Wilder, ponctuée par les onomatopées de scat les plus glamour de l’histoire du cinéma (« Pou-pou-pidou ! »), I Wanna be Loved by You demeure l’un des deux ou trois plus grand succès de Marilyn Monroe en tant que chanteuse. Composée par Herbert Stothart et Harry Ruby, avec des paroles de Bert Kalmar, la chanson fut créée en 1928 dans la comédie musicale Good Boy. Elle comportait une introduction qui ne figure pas dans la version de 1959. En revanche, les onomatopées étaient déjà présentes, avec des micro-variations : sa première interprète Helen Kane, férue de scat, chantait tantôt « Pou-pou-padou », tantôt « Ba-pa padou », et fut une source d’inspiration pour les créateurs du personnage de dessin animé Betty Boop. Dans la séquence de Certains l’aiment chaud, les personnages masculins incarnés par Jack Lemmon (à la contrebasse) et Tony Curtis (au saxophone), déguisés en femmes pour échapper à des gangsters, constatent le charme que l’un d’eux exerce sur un spectateur de l’assistance pendant un concert…

Diamonds Are a Girl’s Best Friends (1953)

Séquence mythique du film Les Hommes préfèrent les blondes (Gentlemen Prefer Blondes) de Howard Hawks, hymne de la vénalité féminine en amour, Diamonds Are a Girl’s Best Friend est une chanson composée par Jule Styne sur des paroles de Leo Robin, initialement pour la comédie musicale du même titre créée à Broadway en 1949 (avec Carol Channing). La séquence du film de 1953 donne à voir et entendre une Marilyn Monroe époustouflante, entourée de danseurs en costumes en queue de pie parmi lesquels un certain George Shakiris, futur Bernardo de West Side Story. Côté chant, comme la voix de l’actrice manquait de puissance et d’amplitude, des parties de la séquence ont été doublées. Seule certitude : les « No, no, no » lyriques et haut-perchés ont été exécutés par une chanteuse professionnelle. À l’époque, le doublage du chant des acteurs relevait du secret-défense à Hollywood. Près de 70 ans plus tard, le nom de la soprano recrutée pour ces retouches varie selon les sources. Certaines évoquent Gloria Wood. D’autres citent Marni Nixon, célèbre « ghost singer » (chanteuse fantôme) qui chante à la place de Natalie Wood dans West Side Story, Audrey Hepburn dans My Fair Lady et Deborrah Kerr dans Le Roi et moi). Quoi qu’il en soit, la chanson, la robe sexy en satin rose et les diamants à profusion (qui avaient leur pertinence dans l’intrigue du film) sont restés ancrés dans l’imaginaire collectif. Madonna a reconstitué la séquence du film dans le clip de sa chanson Material Girl en 1985. Et en 2001, Baz Luhrmann a adapté Diamonds are a Girl’s Best Friend pour son film Moulin Rouge, avec Nicole Kidman, en y intégrant un clin d’œil à Material Girl

My Heart Belongs to Daddy (1960)


Ce célèbre standard de jazz de Cole Porter (sur un livret de Bella Spewack) a été composé initialement pour la comédie musicale Leave it to Me ! (1938), et créé par la chanteuse Mary Martin (avec une introduction non conservée dans le film de 1960). Dans la célèbre séquence du film Le Milliardaire (Let’s Make Love) de George Cukor, dont on voit un bref extrait ci-dessus, Marilyn Monroe présente d’abord le propos de sa chanson en français, avec un accent charmant : « Mon cœur est à Papa ! You know… Le propriétaire ! » (écoutez la version audio intégrale de ce morceau très jazz). Puis elle chante, portée par une chorégraphie sensuelle – et parfois acrobatique – sous le regard admiratif d’Yves Montand, son partenaire dans le film, et avec lequel l’actrice aura une brève liaison qui défrayera la chronique.

Bye Bye Baby (1953)


Autre titre phare de la comédie Les Hommes préfèrent les blondes de Howard Hawks, Bye Bye Baby est une ballade tendre et délicieuse de Jule Styne sur le livret de Leo Robin, créée à Broadway en 1949 par John « Jack » McCauley et Carol Channing en duo. Dans le film de Hawks, Loreleï alias Marilyn Monroe interprète la chanson seule pour les beaux yeux du timide Gus (incarné par Tommy Noonan). La reprise du thème par un chœur flamboyant (version audio complète audio ici) – déjà présent sur la partition de la comédie musicale de 1949 – a connu un nouvelle notoriété en France il y a une vingtaine d’années : c’était la bande-son d’une publicité spectaculaire pour une célèbre eau minérale dans laquelle une kyrielle de bébés plongeait et nageait dans une piscine géante, dans un hommage appuyé aux chorégraphies aquatiques d’Esther Williams…

River of No Return (1954)

Quatre chansons ponctuent le western La Rivière sans retour (1954) d’Otto Preminger, dans lequel Marilyn Monroe partage l’affiche avec une autre immense star de Hollywood, Robert Mitchum. L’une de ces chansons – toutes signées Lionel Newman (musique) et Ken Darby (paroles) – porte le titre du film dont elle constitue la séquence finale. Kay, alias Marilyn Monroe, la chante dans le saloon où elle est retournée travailler après avoir partagé moult péripéties avec Matt (alias Mitchum). Ce dernier vient littéralement l’arracher à cette morne vie, la portant sur ses épaules en bon vieux macho d’antan… Dans ce film du cœur des années 1950, Robert Mitchum incarne un personnage tantôt irrésistible dans sa sensualité, tantôt très excessif dans l’expression de sa virilité, dira-t-on avec les yeux de 2022. C’était un autre temps !

I’m Through With Love (1959)

Dans Certains l’aiment chaud de Billy Wilder, Marilyn Monroe, qui incarne le personnage de Sugar Kane, chante avec émotion ses peines de cœur avant d’être surprise par un baiser de sa copine musicienne Joséphine, alias Tony Curtis déguisé en femme au sein d’un big band féminin pour fuir les gangsters à ses trousses. Alors que les masques tombent, cette séquence marque un temps fort du film. I’m Through With Love (« J’en ai fini avec l’amour ») est une chanson entrée dans le Panthéon du jazz, reprise au fil du temps par de nombreux artistes. Datée de 1931, elle a été composée par Fud Livingston et Matty Malneck, avec des paroles de Gus Kahn. Toujours dans ce film, on recommande aussi le moment très swing de Running Wild, où Jack Lemmon et Tony Curtis volent quasiment la vedette à Marilyn…

Lazy (1954)


Écrite en 1924 par Irving Berlin, la chanson Lazy (« Paresseux ») est entrée dans la légende de Hollywood trente ans plus tard grâce au film La Joyeuse Parade (There’s No Business Like Show Business) de Walter Lang. Ce long métrage où toutes les chansons sont signées Irving Berlin comporte des numéros spectaculaires dont le Hollywood de l’âge d’or avait le secret… Pour Lazy (une séquence qui est une répétition dans le film), Marilyn Monroe joue les séductrices blasées par les sollicitations de ses petits-amis, et qui a juste envie de se laisser vivre… La danse et l’énergie de Donald O’Connor et Mitzi Gaynor font contrepoint à sa « paresse » revendiquée… Dans le même film, dans une tenue éblouissante, Marilyn Monroe chante par ailleurs avec aplomb et une séduction maximale After You Get What You Want You Don’t Want It, ou encore Heat Wave sur un mode exotique.

One Silver Dollar (1954)

Autre classique de la bande originale de Rivière sans retour d’Otto Preminger, la chanson One Silver Dollar, simple morceau en guitare-voix, illustre la capacité de Marilyn Monroe à exploiter le timbre et le potentiel émotionnel de sa voix, même si on peut supposer que le bref passage aigu, sans paroles, qu’elle chante fut doublé par une artiste lyrique. Chez Monroe, l’actrice vient en renfort de la chanteuse pour en faire une interprète tout à fait émouvante. Outre cette belle ballade et la chanson-titre du film, le western comporte deux autres chansons de Ken Darby et Lionel Newman : le pétillant I’m Gonna File My Claim et le tendre Down in the Meadow.

Every Baby Needs a Da Da Daddy (1948)

Réalisé par Phil Karlson, Les Reines du music-hall (Ladies of the Chorus) est le premier film dans lequel Marilyn Monroe, alors âgée de 22 ans, assure l’un des rôles principaux, après deux expériences comme figurante. Elle y interprète deux chansons en solo, dont Every Baby Needs a Da Da Daddy, Anyone Can See I Love You, et enfin la chanson-titre du film avec plusieurs autres artistes. La plupart des chansons sont signées Lester Lee et Allan Roberts. On est frappé par la voix juvénile et fluide de la jeune actrice, formée à l’époque par son coach Fred Karger, dont elle était tombée très amoureuse.

Kiss (1953)

Dans Niagara (1953) de Henry Hathaway, l’un des films noirs dans lesquels elle a tourné, Marilyn Monroe partage l’affiche avec le célèbre acteur Joseph Cotten (Citizen Kane, Le Troisième Homme…). Les deux stars interprètent un couple en perdition qui va imploser dans la violence à quelques encablures des chutes du Niagara. Dans une séquence restée mythique, chargée de tension, l’actrice chantonne quelques notes d’un disque qu’elle a apporté au disc-jockey d’une fête de voisinage à quelques pas du bungalow qu’elle occupe avec son époux. « Vous avez l’air de bien aimer cette chanson, n’est-ce-pas, Mademoiselle Loomis ? », lui dit son voisin de la résidence, alors qu’elle vient s’assoir près de lui et de sa fiancée. « Il n’y a pas d’autre chanson », répond-elle. Si elle n’entonne que quelques phrases dans le film, elle chantera toute la chanson dans la bande originale. La musique est signée Lionel Newman, les paroles sont de Haven Gillespie.

Des bonus et de l’insolite…

Nous aurions pu ajouter de nombreuses autres chansons, entre celles interprétées par Marilyn Monroe dans les comédies musicales où elle brilla, ou celles qu’elle a enregistrées en marge de sa carrière d’actrice. Côté cinéma, dans Les Hommes préfèrent les blondes, Marilyn Monroe chante de charmants duos avec Jane Russell, When Love Goes Wrong, Nothing Goes Right et Two Little Girls from Little Rock… En revanche, la star chante délibérément très mal dans Bus Stop (Joshua Logan, 1956). Et on peut supposer qu’elle a été doublée sur la chanson I Found A Dream du film Le Prince et la Danseuse (1957), de et avec Laurence Olivier, dont le tournage fut un long calvaire… Côté enregistrements discographiques hors cinéma (réalisés dans les années 1953, 1954…), on peut citer A Fine Romance (musique de Jerome Kern, paroles de Dorothy Fields), You’d Be Surprised d’Irving Berlin ou Do It Again (musique de George Gershwin, paroles de Buddy DeSylva)…

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