Le jeune Lyonnais Théo Charaf chante un folk habité, inspiré de Bob Dylan, Neil Young et les grands bluesmen

Si Bob Dylan ou Neil Young sortaient leur premier album en 2020, ça donnerait quoi ? Sans doute quelque chose de pas très éloigné de ce disque de Théo Charaf, paru le mois dernier. Un folk épuré, habité par l’influence des grands bluesmen dont s’étaient déjà inspirés à leur époque les songwriters.

Retour aux origines

Comment un jeune qui n’a pas encore la trentaine en 2020 en vient à jouer et chanter dans ce style d’avant ? La réponse est simple : comme beaucoup de passionnés de classic-rock des sixties et seventies, le Lyonnais Théo Charaf, 26 ans, a voulu retrouver les origines où avaient puisé Led Zeppelin, Hendrix, les Stones et consorts. Et quand on remonte aux sources du rock, on revient toujours au même point de départ : le blues. Alors que déjà le rock « coulait dans son sang », Théo découvre le delta-blues, ce style brut et dépouillé, parfois austère, joué par des musiciens itinérants autour de la région du delta du Mississippi : Charley Patton, Son House, Skip James, Bukka White, Mississippi John Hurt ou encore Robert Johnson. Il tombe instantanément amoureux de cette musique.

Ça m’a juste transcendé.

Jouer en acoustique convient aussi aux contraintes de vivre en HLM. Après l’apprentissage de la guitare en autodidacte vient l’écriture. En anglais, pour « des mots rebondissants et une rythmique plus facile à caler », dit-il. On est immédiatement immergé dans cette ambiance americana, cette atmosphère de l’errance symbolisée sur la pochette du disque. Des chansons directes et fortes, qui rappellent aussi le Springsteen de Nebraska. Une guitare plaintive et lancinante en fingerpicking, une voix profonde et habitée qui semble avoir vécu mille vies.

Punk et folk à la fois

Et cette dimension prend encore plus de force quand on sait que Théo Charaf mène de front plusieurs projets musicaux. En dehors de ses chansons en solo et en acoustique, il joue également dans des groupes punk à l’énergie affirmée comme par exemple Les Barneurs.

Cette dualité acoustique et électrique, folk et grunge, n’est pas sans rappeler Neil Young, une influence évidente du jeune songwriter. Mais la filiation ne verse jamais dans la simple imitation. Plutôt la transmission bienveillante, le passage de flambeau, qui n’exclut pas d’apporter sa personnalité bien présente. Et il parvient même à faire siennes les reprises de Skip James. Une façon de s’approprier l’héritage du blues et d’y inclure sa patte. Le signe des interprètes habités par la musique.

Le punk pour le corps et le blues pour l’esprit. Je fais partie des deux.

« J’ai grandi avec l’esprit punk, je me suis forgé et j’ai pu m’affirmer en tant qu’individu à travers cette musique », explique Théo Charaf. Cette démarche de l’immédiateté et de la spontanéité, on la retrouve aussi dans ses chansons folk enregistrés en peu de prises, en direct sans overdubs, uniquement en guitare-voix.

Cristalliser et capturer l’instant plutôt que l’exécution parfaite.

Cette approche a immédiatement rencontré l’adhésion du label Wita Records, fondé par les musiciens d’Automatic City, combo blues-rock de la région lyonnaise dont nous vous avions présenté le deuxième opus Bongoes & Tremoloes, il y a trois ans. Le blues encore, comme ciment des différentes couleurs musicales. Muddy Waters l’avait bien résumé : « The blues had a baby and they named it rock’n’roll » (le blues a eu un enfant et ils l’ont appelé rock’n’roll). Quelle que soit la direction que l’on prenne, on y revient toujours, inlassablement.

L’album « Théo Charaf » est sorti le 20 novembre chez Wita Records / Dangerhouse Skylab

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