INTERVIEW. Six questions à la pétillante chanteuse Adé, qui sort vendredi son premier album folk, “Et Alors ?”

Une veste à franges sur les épaules, une paire de santiags aux pieds et un chapeau de cow-boy vissé sur la tête… Sur ses réseaux sociaux, Adé – ancienne chanteuse du groupe de pop française Thérapie Taxi – dévoile un nouvel univers qui s’éloigne des strass, paillettes et chaînes en or qui ont marqué le début de sa carrière musicale. Elle sort demain son premier album solo, Et Alors ?. Pour cet envol, elle s’est tournée vers des sonorités populaires de l’autre côté de l’Atlantique : la folk et la country. Partagé en avril dernier, son single Tout Savoir a déjà fait un carton : programmé tout l’été sur des dizaines de radio, il a aussi fait plus de 2,5 millions de vues sur YouTube.

Et justement, c’est quoi votre musique ? De quoi parle ce premier album ?
Cet album est un état d’esprit, résumé par son titre : Et Alors ?. C’est une phrase que je dis souvent et qui me permet d’avancer. Pour moi les chansons sont comme des personnages. Certains sont plein d’assurance et se disent « Et alors ? Qu’est-ce qui peut nous arriver ? On y va ! ». D’autres, à l’inverse, ont besoin de motivation, ont besoin de ce « Et alors ? ». Les morceaux discutent les uns avec les autres. Dans le titre Side By Side, c’est l’histoire d’une jeune fille bloquée dans une relation amoureuse compliquée, avec un copain pas ouf… Dès l’intro du disque, les paroles lui répondent : « A quoi ça sert de l’embrasser encore ? Si tu ne veux plus, perds pas ton temps ». Tout est comme ça dans cet album.

Et c’est un travail de plus d’un an et demi. Il y a des chansons impulsives, écrites sur le vif d’un événement mais aussi plusieurs qui ont été composées après, avec plus de recul. Mon rêve de carrière, c’est une construction sur la durée. Je ne veux pas du tout faire Bercy dans deux ans ! Je veux vraiment prendre mon temps.

Votre style est très folk, voire country. Pourquoi ce choix peu commun et très américain surtout quand on sort d’un groupe de pop française ?
Quand je me suis posée pour me demander ce que j’allais faire après le groupe, je me suis rapidement rendu compte que ce qui me touchait le plus c’était la musique folk et ses instruments bien américains. Mais Thérapie Taxi m’a apportée un élan pop et une énergie sur scène que je n’avais pas envie de perdre. Je ne voulais pas du tout faire un album où tout le monde resterait assis pendant le concert… J’ai cherché un entre-deux.

Cet album est un bon début et ce n’est qu’un début. Si par la suite, j’ai envie de faire quelque chose d’un peu plus rock, il me suffit juste de brancher les guitares qu’on utilise déjà dans cet album (rires). Faire un projet 100% acoustique, faire du jazz… J’ai plein d’idées et d’envies ! Mais j’avance à mon rythme. Le seul truc que je ne ferai jamais, c’est du rap. Je n’en ai pas du tout les compétences.

Par contre, c’est très important pour moi d’écrire mes textes en français. Je ne peux pas le concevoir différemment. Si je chante en anglais, ce sera pour un duo. En vérité, ce qui me plaît surtout dans la musique country, ce sont ses instruments. On ne les connaît pas en France ! Et on a une vision de la country très stéréotypée, on s’en moque presque. Alors qu’aux USA, ce n’est pas du tout une blague, c’est un marché musical équivalent à celui de la pop. Ce ne sont pas seulement des mecs déguisés en cow-boy avec des éperons aux bottes (rires).

Quels sont les artistes qui vous ont inspirés pour cet album ?
Sans surprise, des artistes américains. Je me suis surtout intéressée aux chanteurs qui avaient osé des projets un peu hybrides comme Angus & Julia Stone. Ils font de la pop et de la folk en même temps, exactement ce que je voulais faire. La chanteuse Lord m’a aussi beaucoup influencée, surtout avec ses premiers albums et son côté « peur de rien ». Elle tente des effets de voix, des ambiances et observe ce que ça donne sans se formater. Mais j’ai également des inspirations très folk comme Joni Mitchell, Neil Young ou encore Johnny Cash.

Pour faire cet album, vous êtes partie avec votre équipe faire un roadtrip aux Etats-Unis… Ce voyage était-il obligatoire ?
Carrément. J’ai composé toutes mes chansons dans ma chambre, pendant cette longue période de couvre-feu et de confinements. Je tenais un gros carnet où je collais, dessinais et écrivais tout ce que je souhaitais pour ce premier album. J’avais même déjà imaginé les clips, le merchandising… et le roadtrip aux Etats-Unis. Quand je me suis sentie prête, je suis allée voir plusieurs labels avec mes quinze chansons et mes envies. Et ça a fonctionné.

Je n’étais jamais allée aux Etats-Unis alors que les musiques américaines sont les principales inspirations de mon album. Ça ne pouvait pas le faire. Je voulais que ce disque raconte une histoire, qu’il soit comme un carnet de voyage. On voulait aussi des banjos et des instruments très country, plus difficiles à trouver en France. Donc j’ai dit à mon équipe « Autant aller les chercher directement à Nashville ! ». Tout le monde était emballé par l’idée et c’était un voyage absolument incroyable.

Je voulais que ce disque plaise au public, qu’il découvre mon univers et ma personnalité, mais aussi qu’il me crée plein de souvenirs. Pari réussi, il est vraiment proche de ce que j’ai dans le cœur.

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Avec le groupe Thérapie Taxi, vous avez participé à des concerts enflammés, débordants d’énergie. Votre partenaire sur scène, Raphaël Zaoui, aimait faire le show. Vous, en revanche, vous étiez plus discrète. Comment appréhendez-vous d’être seule sur scène ?
Ce que j’aime le plus au monde, c’est être sur scène. Tout ce que je fais depuis des mois – la création de l’album, sa promotion – c’est pour préparer ce moment-là face au public. C’est le dernier maillon de la chaîne parce qu’il permet de savoir si les gens ont vraiment aimé le disque ou non.

Thérapie Taxi était un groupe, un message, une énergie portée par Raphaël. C’est lui qui a quasiment écrit toutes les chansons. Dès nos premiers concerts, il savait mettre l’ambiance, faire danser le public. Je suis plus timide. Pour le groupe, je jouais aussi un personnage sur scène, en lien avec les paroles de nos chansons. J’adore faire ça ! Avoir un alter ego scénique donne de la force. Il va falloir que j’en trouve un nouveau à la chanteuse Adé.

Maintenant que je suis seule sur scène, je vais devoir écouter le message de mon propre album : « Et alors ? Qu’est-ce que tu as à perdre ? Allez, on y va ! ». Si je suis mal à l’aise les premières fois, je le dirai. Je ne veux pas faire semblant, apprendre un texte à la lettre près. Je veux rester moi-même.

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