En 1977, cet autre jubilé d'Elizabeth II, sur fond de crise économique et de contestation punk

Ce jubilé d’argent a été paradoxal, entre lustre royal et décrépitude sociale. Le 7 juin 1977, la reine d’Angleterre porte une tenue dont elle a le secret, un ensemble rose bonbon. Pour l’admirer dans les rues de Londres, il y a un million de personnes. Elizabeth II célébrait ainsi ses vingt-cinq premières années de règne, devant ses sujets et plus d’un milliard de téléspectateurs en direct. Trente chefs d’Etat étrangers sont présents, dont le président américain Jimmy Carter.

>> EN IMAGES. Jubilé de platine de la reine Elizabeth II : revoyez les temps forts des festivités de jeudi

Pour ce jubilé d’argent, la reine Elizabeth entame dès le début de l’année 1977 une tournée de neuf mois dans le Commonwealth – Samoa, Tonga, Fidji, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Nouvelle-Zélande, Australie, Inde et Oman – puis dans tout le Royaume-Uni, jusqu’en Irlande du Nord. Avec en point d’orgue les festivités à Londres, le 7 juin 1977. Partout, les foules sont enthousiastes. On achète à tour de bras des assiettes et des mugs à l’effigie de la reine.

« Pas de futur pour le rêve anglais »

Mais derrière cette liesse, il y a une autre Angleterre, plus jeune, plus rebelle, qui va venir ternir la photo. Dix jours avant le jubilé, les Sex Pistols ont sorti leur single God Save the Queen, destiné à ridiculiser la monarchie. Le groupe punk dénonce ce qu’il appelle « un régime fasciste » et sur les affiches qui font la promo du single, la tête de la reine apparaît avec une épingle à nourrice dans le nez. La BBC et les autres radios boycottent le titre, qui se vend malgré tout à 150 000 exemplaires en une semaine. Le jour du jubilé, les Sex Pistols jouent sur une péniche en face du Parlement. Ils jouent Anarchy in the UK avant de se faire arraisonner.

Au delà des éructations punk, les dépenses de ce jubilé d’argent sont critiquées par une partie de la gauche britannique. Dans un pays qui souffre économiquement, avec une inflation à 16%, des fermetures d’usines par milliers, un chômage qui a doublé depuis 1970 (1,4 million de chômeurs en 1976, soit 5,7 % de la population active), des grèves à répétition déclenchées par des syndicats surpuissants, la faillite du pays est toute proche. Le Royaume-Uni a d’ailleurs décroché in extremis un prêt massif du Fonds monétaire international (FMI) pour faire face à ses engagements. Un plan de sauvetage, six mois avant les fastes du jubilé, vécu comme une humiliation pour ce pays qui avait autrefois dominé le monde.

En cette année 1977, les Sex Pistols chantaient qu’il n’y avait « pas de futur pour le rêve anglais » (There’s no future in England’s dreaming). En fait, le Royaume aura bien un futur qui changera le pays de fond en comble, deux ans après le jubilé. Un futur libéral et conservateur qui aura pour nom Margaret Thatcher.

Source: Lire L’Article Complet