Les Fashion Weeks revendiquent de plus en plus des scénographies en prise avec une conscience écologique. Cette nouvelle ère plus éthique et durable signe-t-elle la fin des défilés spectaculaires ?
Et les podiums devinrent recyclables. La tendance du catwalk vert a été prise au pied de la lettre par Prada. La griffe italienne, codirigée depuis un an par Raf Simons et Miuccia Prada, a présenté son défilé masculin digital dans un décor minimaliste, destiné à être totalement réemployé. Pas de danseurs, ni de prouesses technologiques, encore moins de murs tapissés de milliers de fleurs, de happenings, d’extravagances, et bien sûr aucune célébrité au premier rang. À la place, c’est une boîte – habillée de fausse fourrure au mur et d’un sol en marbre et résine – qui a été donnée à voir sur les écrans. Moins sensationnelle que la reconstitution d’un paquebot ou d’une fusée. Mais plus responsable.
Une fois démonté, ce décor va trouver une nouvelle vie dans des pop-up de la marque, installés un peu partout dans le monde. Il sera ensuite récupéré par une association milanaise qui alors, louera, vendra ou redistribuera les matériaux et chutes de tissus à des étudiants et des professionnels.
La période est évidemment moins propice au faste et à la dépense. Avec l’épidémie de Covid, les Fashion Weeks sont, pour la plupart, entièrement digitales (la haute couture qui suivra fin janvier, également). Dans le même temps, bon nombre de marques subissent de plein fouet les secousses de la crise sanitaire. La surenchère de décors gigantesques s’intègre mal dans le paysage Covid… Et la période où rien n’arrêtait Chanel (reconstitution d’une plage, d’une forêt ou encore d’un supermarché sous la nef du Grand Palais) semble se tenir à des années-lumière. Pour autant, la pandémie n’est pas seule à signer la mise en arrêt (temporaire ?) du show événement.
Toujours à la pointe de la technologie, Karl Lagerfeld met souvent cette dernière en scène comme ici pour le défilé prêt-à-porter printemps-été 2006. (Grand Palais, Paris, le 7 octobre 2005.)
Pour présenter sa collection Croisière 2007-2008, Karl Lagerfeld a choisi le tarmac de l’aéroport de Santa Monica. (États-Unis, 18 mai 2007.)
Pour présenter la collection haute couture printemps-été 2008, Karl Lagerfeld rend hommage à l’iconique veste en tweed de la maison. (Grand Palais, Paris, le 22 janvier 2008.)
C’est un manège enchanté et perlé qui sert de décor au défilé prêt-à-porter automne-hiver 2008-2009. (Grand Palais, Paris, le 29 février 2008.)
Des décors plus sages
Depuis deux ans, les actions se multiplient pour limiter l’impact de l’industrie de la mode sur l’environnement. Parfois, de façon radicale. En 2019, la ville de Stockholm annulait sa fashion week pour marquer le coup d’une prise de conscience écologique. Résultat ? Projecteurs éteints et podiums déserts. Dans la foulée, les marques donnaient dans la scénographie plus engagée. Et aussi, plus sage. Quand Dior plantait le décor de sa collection printemps-été 2020 dans une (mini) forêt, annonçant que chaque arbre serait replanté dans des projets de végétalisations pérennes en Île-de-France, Louis Vuitton misait sur une scénographie épurée, faite de bois issu de forêts gérées durablement en France.
Le message était alors très clair : moins de féérie et plus d’engagement climatique. Par temps de Covid s’ajoute le défi des vidéos qui remplacent le rituel des défilés. Et avec lui, la nécessité de devenir viral pour marquer les esprits. Challenge de taille quand la surproduction n’est plus de la partie. Mais que certains, à l’image de Jacquemus, se jouent très bien en choisissant des décors déjà existants et calibrés pour les réseaux, comme un champ de blé ou encore de lavande.
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