Carolina Ritzler : "Je dessine, imagine, shoot, vend et fabrique dans le même lieu"

Interview. – Après avoir créé sa marque de combinaisons en Août 2014, la créatrice Carolina Ritzler a choisi de reprendre sa liberté pour se consacrer à Madame.c.paris. Un projet pluridisciplinaire qui parle évidement de vêtements mais aussi de création au sens large dont elle nous livre ici son histoire.

Madame Figaro : Madame.c.paris, c’est quoi?
Carolina Ritzler
: Madame.c.paris, c’est une ligne de vêtements (Combinaisons, pantalons, vestes, manteaux, trenchs, chemises, sweats, casquettes…) et comme j’adore raconter des histoires et que je considère que la vie est une gigantesque pièce de théâtre, chaque pièce devient un personnage et tout s’articule comme s’il s’agissait d’une BD ou d’une série Netflix. Et j’ai aussi toujours été connectée à la musique, à la danse, au théâtre, j’adore ça. Aujourd’hui tout cela fait partie de moi, quand je crée une collection c’est comme si je composais un morceau de musique, les couleurs sont les notes et le fit est le rythme. La musique est essentielle dans ma vie, j’ai chanté dans un groupe de jazz pendant quelques années, j’ai encore mes musiciens, on fait des sessions régulières et c’est vraiment quelque chose qui me procure énormément de plaisir, qui me nourrit. Créer pour moi n’a pas de limite ou de frontière.

Le lieu de Madame.c.paris ?
C’est 300 m2 articulés en plusieurs parties : 120 m2 au rez-de-chaussée et le reste en sous-sol dans une cave voûtée. On peut louer la totalité ou des espaces scindés. C’est un lieu d’événements, de production photos.(Resa sur le site Madame-c.paris)

Comment définir ce lieu qui vous sert d’écrin ?
C’est un lieu de complémentarité artistique, un endroit hybride en quelque sorte parce que les mots me parlent, la musique me parle, mais aussi la peinture, la danse. C’est pourquoi j’ai voulu créer une collection de vêtements en créant un dialogue entre les arts. Quand on crée une collection de vêtements on peut en faire une musique, donc il y a un studio de musique, qui peut nous servir pour faire des concerts où on interpréterait ces morceaux, ou bien on peut aussi y inviter des artistes. Je trouve magique de pouvoir mettre en scène le vêtement.

Comment êtes-vous arrivée ici ?
Par hasard. Je ne l’ai pas cherché il est venu à moi. Je faisais patronner des modèles car je redémarrais une marque, et la personne qui façonnait les modèles était là. Il était tout seul et ce lieu était comme abandonné et cherchait un repreneur. Et comme j’ai la chance d’être accompagné par quelqu’un qui croit au projet, on a signé en se faisant la promesse de toujours créer en toute liberté. C’est un endroit avec de bonnes ondes. Je trouve que son côté industriel avec la grosse et sublime VMC est détonnant. Les volumes aussi, sont fous, et la possibilité de créer des univers différents me plaît évidemment beaucoup… Il n’y a pas de cadre, ou plutôt il y a un cadre pour pouvoir en sortir. Mais le cadre est large et c’est ça qui est magnifique.

Comment s’articule cet écrin ? Il y a le Shop ?
Oui, c’est le lieu d’accueil pour toutes les personnes qui veulent découvrir la marque et s’offrir une pièce. Pour le moment on a une ligne street et une ligne urbaine. Et dans cette ligne urbaine il y a « Cadence » et « Décadence ». « Cadence », ce sont des modèles destinés à être vendus dans la rue, pour vous, moi, tout le monde. Et « Décadence », il s’agit de pièces plus excentriques, uniques ou éditées à peu d’exemplaires, et qui peuvent finalement convenir à beaucoup d’artistes, ou pour des éditoriaux. On propose aussi un service VIP de personal shopper. On ne vendra ici et sur notre eshop plus des collections deux fois par an comme j’ai toujours fait auparavant. On a le projet d’en créer tous les deux ou trois mois, au rythme que nous nous imposerons et qui nous correspond en réalité, et il s’agira de séries limitées. Elles seront présentées autour d’un dîner, le dîner de Madame.C., sous forme d’un défilé. Ici d’ailleurs, je souhaite que tout le monde puisse se mettre en scène, et devienne une héroïne : on enfile une combi, on devient un personnage, on simule son propre défilé dans la salle de danse et on a des ailes qui poussent dans le dos. Parce qu’on a envie de ça… L’achat d’un vêtement est un acte émotionnel et le but dans la vie c’est de se raconter sa propre histoire, d’aller chercher dans l’imaginaire le plus fou. On joue tous des rôles en permanence et si on pouvait être une héroïne ça ne serait pas génial ?

Et le Bar ?
C’est un lieu de rencontres, comme dans les soirées où la contre-soirée finie dans la cuisine. Donc c’est un espace à la fois intimiste et ouvert ou nous aurons bientôt un immense miroir rond pour avoir un côté solaire qu’on retrouve sur mes toiles d’ailleurs. Il y a les ronds et les traits. C’est aussi un lieu d’accueil, on peut échanger, s’asseoir, boire un verre. C’est un lieu d’échange également car je ne voulais pas d’une boutique classique, je souhaitais un espace un peu comme à la maison et là, c’est la cuisine un peu comme à la maison. Et puis quand la cliente vient elle peut boire quelque chose, elle a l’impression d’être choyée, et d’être la cliente exceptionnelle.

La scène ?
J’aime les mots, la musique, créer des collections et écrire des paroles pour les raconter… »Madame aime le soleil, Madame aime le café, Madame n’aime pas attendre, Madame n’aime pas tailler ses crayons… » Tout ça, on se plaît à le mettre en scène. Comme un cercle de poètes, on se raconte des choses simples mais qui font réfléchir. Tous les modèles peuvent être mis en scène, on peut y faire un défilé. Une femme vient acheter une combi ici, elle se découvre dans la salle de danse et se fait son propre défilé en montant sur la scène.

La salle de danse ?
On va découvrir les collections à travers des danses, des mises en scènes peut-être même à travers des pièces de théâtre. Et aussi, plusieurs fois par semaine la salle sera réservée pour des petits cours…barre au sol, moderne jazz, tango, flamenco. (Inscription en ligne sur le site de Madame.c.paris).

Le bureau ?
C’est un lieu de création avec une moquette ultra épaisse car j’adore créer allonger et surtout c’est un espace libre. La liberté est indispensable à la créativité. C’est aussi un lieu de rendez-vous. On y est complètement coupé du monde, il n’y a pas de bruit, pas d’ouverture sur l’extérieur et avec la sensation d’être comme dans une bulle, un cocoon, une pièce insonorisée. L’atmosphère est fascinante. On s’y sent englobé, c’est inspirant.

L’atelier peinture et salle d’exposition?
Les murs sont fous. Monsieur Chat était venu avant qu’on s’installe ici et avait peint ses œuvres sur les murs. Je trouve que ça va super bien avec l’histoire des lieux. On a gardé le côté industriel et peint le reste en blanc immaculé. Et puis la cave voûtée, donne l’impression d’être dans un endroit caché, clandestin. On peut donc y peindre et faire des vernissages. Personnellement j’ai envie d’y peindre des toiles qui finissent sur des bustes et après la cliente qui achète la silhouette repart aussi avec la toile.

Le studio d’enregistrement?
Il en fallait forcément un car la musique fait partie intégrante de mon histoire et de celle de Madame C. L’idée est de mettre en chanson Madame C, même du parler, et de véhiculer ce son dans l’espace. Car quand on rentre chez nous, on rentre dans un univers. C’est donc comme une signature vocale. Il ne manquera plus que le parfum. Tout en somme est en résonance avec les vêtements et avec cette liberté d’acte et d’être.

Le studio photo ?
Ma volonté est de créer en circuit court. On dessine ici , on imagine ici, on shoot ici, on vend ici et on fabrique dans la rue d’à côté. C’est donc vraiment made in Paris 2ème et 10ème arrondissements. Ce qui veut dire qu’on peut créer extrêmement rapidement. L’adaptabilité et réactivité sont vraiment plus qu’importantes pour moi surtout si on veut survivre au virus du Covid 19. Donc potentiellement entre le dessin et la vente on peut être à 10 jours de délai.

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