« Hitler aurait dû tuer les Chinois pas les juifs », « J’appelle tous les renois et rebeus de France à agresser chaque Chinois qu’ils croiseront dans la rue » : ces captures de messages, entre autres, ont été postées mercredi 28 octobre
sur la page Facebook de l’association des jeunes Chinois de France (AJCF). L’association a lancé l’alerte, avec le
collectif Sécurité pour tous, « contre ce qui s’apparente à une incitation à la chasse aux Asiatiques de France ».
Une enquête a été ouverte par le parquet de Paris, selon Le Parisien et l’AFP, pour « provocation publique à commettre une atteinte à l’intégrité physique d’une personne à caractère raciste ». Les investigations ont été confiées à la brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP). L’AJCF, qui appelle à « la vigilance », encourage toute personne « victime ou simple témoin de comportement ou de propos répréhensibles » à « porter plainte et/ou le signaler à une association de (son) collectif ».
« Tabou »
Dans la foulée de ces messages, un collectif s’est créé vendredi, le « collectif asiatique antiraciste », qui a condamné « tout acte et propos haineux à caractère raciste ». « Au lieu de nous retourner les un·e·s contre les autres et de faire ainsi le jeu des fascistes, rappelons nous la détresse de nos sœurs, frères et adelphes visé·e·s par la négrophobie et l’islamophobie qui font face à l’impunité des violences », écrit le collectif.
En toile de fond, la crainte d’un déchaînement de violences intercommunautaires, comme l’explique Mai Lam Nguyen-Conan, autrice et conférencière sur le thème des discriminations. « Ce qui me chagrine beaucoup dans ces messages c’est l’appel de « renois [noirs] et rebeus [Arabes] » contre les chinois. C’est un tabou : quand on entend des personnes asiatiques parler des agressions subies, elles disent que ce ne sont pas des personnes blanches qui les ont commises. C’est quelque chose qu’on a convenu de ne jamais mentionner. Est-ce que ce message n’a pas pour visée de créer plus de discorde qu’autre chose ? C’est une étrange mobilisation qui fait guerre des gangs. »
Une « excuse », un « prétexte »
Pour la chanteuse Thérèse, qui gravite dans l’orbite de plusieurs de ces associations, le mal n’est pas nouveau. « Les violences ont commencé après les JO de Pékin, et se sont accrues en 2012 quand Le Point a titré sur L’intrigante réussite des Chinois de France [le magazine a été
condamné pour diffamation]. Ont commencé à circuler les clichés des Asiatiques disant qu’ils ont de l’argent liquide sur eux. La montée du coronavirus a servi d’excuse supplémentaire, parce qu’il fallait trouver un bouc émissaire, ainsi que les discriminations sur les ouïgours : certains voient ce phénomène comme une domination de la Chine sur l’islam. Mais les Chinois ou Asiatiques du reste du monde n’ont rien à voir avec cela ! », se désole la militante.
Porte-parole du comité Sécurité pour Tous, Sun-Lay Tan est circonspect quant aux motivations réelles des agresseurs. « Je pense que la motivation c’est de taper des Chinois. Cela fait partie d’un rituel pour entrer dans une bande dans certains quartiers. Je pense que les agresseurs n’ont pas les capacités intellectuelles pour venger les ouïgours, c’est un prétexte. La personne qui a fait ça a voulu faire un bad buzz, parce que les Chinois sont des cibles faciles. Cela peut créer des tensions intercommunautaires, mais je ne pense pas que cela soit la motivation des gens qui ont fait ces tweets ».
Malgré ces craintes, Mai Lam Nguyen-Conan reste optimiste quant à la prise en charge du racisme anti-Asiatiques. « La communauté asiatique est beaucoup plus organisée qu’il y a quelques années », analyse-t-elle. Le Collectif Sécurité Pour Tous prépare d’ailleurs un « guide pratique » pour porter plainte, soulignant que les personnes d’origine asiatique saisissent trop peu la justice.
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