- Le propriétaire du Stade Rennais François Pinault a prêté une partie de sa collection d’art contemporain pour une grande exposition qui s’ouvre à Rennes ce samedi.
- Organisée autour du noir et blanc, elle présente plusieurs œuvres célèbres du milliardaire comme « Le coup de tête » de Zidane sur Materazzi.
- En 2018, la première édition de l’exposition avait attiré plus de 100.000 personnes au Couvent des jacobins.
Commençons par un aveu. Vendredi matin, on n’était pas très emballés à l’idée de découvrir l’exposition consacrée à la collection Pinault. Pourquoi ? Parce que l’art contemporain nous fait un peu peur. Parce qu’il souffre d’une image parfois snob pour ceux qui n’y connaissent rien. On a donc franchi la porte du Couvent des jacobins sur la pointe des pieds, sans vraiment savoir à quelle sauce on allait être mangés. Après deux heures d’une
visite guidée par l’ancien ministre Jean-Jacques Aillagon, on en est ressortis charmés. Parce que c’est accessible, varié et qu’il y a beaucoup d’histoires à raconter. Et pour les moins de 26 ans, c’est gratuit !
A l’image de la première édition baptisée « Debout » qui avait drainé 100.000 visiteurs en 2018, cette deuxième exposition pourrait séduire un public encore plus large, notamment par la renommée de certains artistes comme Jeff Koons, les photographes Raymond Depardon et Henri Cartier-Bresson ou le monumental « coup de tête » de Zidane réalisé par Adel Abdessemed. Baptisée « Au-delà de la couleur »,
l’exposition qui ouvre ce samedi et durera tout l’été ne présente que des œuvres en noir et blanc, ou presque. « Dans son bureau, François Pinault n’a que des œuvres blanches. C’est une forme de sobriété. Un choix qui répudie l’emphase, le bavardage, l’excès », glisse le commissaire Jean-Jacques Aillagon,
qui travaille pour le milliardaire breton.
La maire Nathalie Appéré abonde. « Cette proposition est exceptionnelle. Elle témoigne du foisonnement de l’art contemporain à Rennes ». Plusieurs expositions annexes sont d’ailleurs organisées autour de la collection Pinault, réunies sous une bannière intitulée Exporama. Au Couvent des jacobins, les œuvres du collectionneur François Pinault ne sont « que des œuvres de premier choix », selon le commissaire. Qui a quand même dû faire avec l’ouverture de la Bourse du commerce, à Paris, le nouveau musée du richissime collectionneur. Voici quelques-unes des œuvres qui nous ont marquées.
Les mouches mortes de Damien Hirst
Imaginez un tableau noir de trois mètres sur trois où des milliers de mouches mortes seraient collées. De l’art ? A n’en pas douter. Baptisée « Cancer », cette œuvre de Damien Hirst est un cimetière pour insectes recouvert de résine, où est imprimé le symbole de la toxicité. « Cette œuvre a un caractère organique. On le sent quand on la sort de son étui de rangement », confie le commissaire de l’exposition. On n’a pas osé lui demander quelle odeur pouvait dégager ce sanctuaire des mouches.
Les chiffres blancs sur blanc de Roman Opalka
Un triptyque blanc. Un « monochrome de Whiteman », comme en plaisantaient les Inconnus dans le film Les trois frères ? Approchez-vous et vous verrez que non. Sur ces toiles, Roman Opalka a inscrit un nombre infini de numéros écrits en blanc sur un support légèrement gris. Son nom ? « 4875812-4932016 ». Répétez après nous… L’histoire raconte que le peintre avait dû être hospitalisé plusieurs semaines, comme traumatisé par la peinture de dizaines de milliers de chiffres. Son cœur subissait des troubles du rythme importants.
Le sang de cheval d’Edith Dekyndt
Ce n’est pas l’œuvre la plus imposante de l’exposition. Mais c’est sans nul doute l’une des plus étranges. Pour réaliser son tableau, Edith Dekyndt a utilisé du sang de cheval, qu’elle a posé sur sa toile. En séchant, l’œuvre est devenue très noire et intrigue. « L’art est dans l’actualité, il questionne. On le voit avec le débat sur les abattoirs », glisse le commissaire.
Le coup de tête d’Adel Abdessemed
Cette statue de bronze de 5 mètres de haut est monumentale ! Installé en extérieur en raison de son poids, « Le coup de tête » est une fidèle reproduction du coup de boule asséné par Zinedine Zidane à l’Italien Marco Materazzi lors de la finale du Mondial de football en 2006. « C’est une image qui a circulé dans le monde entier. Nous l’avons choisie pour terminer l’exposition de manière monumentale », explique Jean-Jacques Aillagon. C’est réussi.
Les brûlures au napalm de Richard Avedon
Le photographe Richard Avedon est un monstre. Au point qu’il s’offre une place de choix dans les collections Pinault. A travers le portrait de quatre femmes défigurées par le napalm lors de la guerre du Vietnam, l’artiste témoigne des ravages des conflits armés. Le noir et blanc prend tout son sens pour magnifier des corps mutilés. Son travail sur l’hôpital psychiatrique de Louisiane réalisé en 1963 est tout aussi bouleversant. Un hommage à sa sœur Louise.
L’ours et le lapin de Paul McCarthy
C’est cette œuvre qui a été choisie pour la couverture du catalogue et la plupart des supports de communication. Sans doute parce qu’elle est montre la joie, qu’elle paraît enfantine et que cela fait du bien. Imaginée par Paul McCarthy, l’œuvre du lapin et de l’ours sur leur rocher fait sourire. Peut-être parce que les esprits mal placés y verront un coït. Ou tout simplement parce que ces marionnettes affichent un sourire éclatant. « C’est une invitation à surmonter les préjugés sur les autres. Sur le sexe, la couleur. C’est une invitation au vivre ensemble », explique Jean-Jacques Aillagon.
Où, quand et comment ?
L’exposition « Au-delà de la couleur » est présentée au Couvent des jacobins du 12 juin au 29 août. Dans le même temps, le musée des Beaux Arts proposera une exposition baptisée « La couleur crue ». Pour les deux expositions, entrée gratuite pour les moins de 26 ans et à 2 euros pour les titulaires de la carte Sortir. Plein tarif : 10 euros.
Dans le cadre d’Exporama, une trentaine de propositions sont ouvertes à la Criée d’art contemporain, aux Champs Libres, au FRAC, aux Ateliers du vent ou encore dans la galerie 40 m².
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