Vos enfants ou petits-enfants peuvent être concernés par ce mal qui a un impact négatif sur la vie scolaire et sociale.
Samuel, 6 ans, est tout pâle. Sa maman, elle-même migraineuse, sait que bientôt, il aura mal à la tête et sûrement au ventre. Comme 5 % à 10 % des enfants (autant de filles que de garçons), Samuel souffre de migraines. Ce trouble neurologique se caractérise par des céphalées périodiques et paroxystiques (elles surviennent par crises). Il correspond à la dilatation et à l’inflammation des vaisseaux cérébraux. Mais les enfants présentent-ils les mêmes symptômes que les adultes ? « Chez eux, la migraine se présente très souvent sous la forme de signes digestifs », précise le Dr. Michel Dib, neurologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris et auteur de Migraine ou céphalée ? En finir avec les maux de tête (éd. Josette Lyon). Autres différences : chez les adultes, la douleur est unilatérale (elle ne concerne qu’un côté de la tête) et a un caractère pulsatile (comme des battements de cœur), tandis que chez les enfants, elle est bilatérale et rarement pulsatile. De plus, chez les petits, la crise est de plus courte : elle peut durer moins de deux heures.
« De fait, certains enfants ne sont pas pris au sérieux par les adultes puisqu’ils disent qu’ils ont très mal à la tête et que deux heures plus tard, ils reprennent leurs activités ou leurs jeux », commente la Dre Anne Donnet*, neurologue et cheffe de service du centre d’évaluation et de traitement de la douleur de l’hôpital de la Timone, à Marseille. Un enfant sur deux a plus d’une crise d’intensité modérée à sévère par mois. Par ailleurs, dans presque 40 % des cas, elle s’accompagne de douleurs abdominales et de vomissements. À l’instar des adultes, les enfants ont-ils parfois des migraines avec aura ? L’aura regroupe un ensemble de troubles neurologiques transitoires et sans gravité qui touchent la sphère visuelle (vision de points, tâches…) sensorielle (fourmillements, engourdissements…) ou auditive. La réponse est oui, notamment une aura visuelle.
« Ils ont parfois une aura visuelle, et certains sont sujets au syndrome d’Alice au pays des merveilles », précise la Dre Donnet. Un nom poétique pour un phénomène des plus étranges : les enfants sont plongés dans une sorte de confusion, avec des vertiges et des sensations de modifications corporelles, tout comme Alice face à son miroir déformant. Fort heureusement, ce phénomène n’est pas grave et ne dure pas longtemps.
Des causes génétiques
« La migraine est héréditaire dans 95 % des cas », affirme le Dr Dib. Il n’existe pas un mais plusieurs gènes de la migraine (à ce jour, une quarantaine ont été identifiés). Concrètement, si vous êtes une femme migraineuse, vous avez 50 % de risque de transmettre la maladie à vos enfants. Et si vous êtes un homme, le risque est de 25 %. Cela signifie donc que vos enfants n’hériteront pas forcément de cette prédisposition génétique. Par ailleurs il existe des facteurs prédisposants : le stress, l’hypersensibilité aux odeurs et à la lumière, le mouvement (descendre ou monter les escaliers)… « Chez les enfants, l’impact négatif de l’activité physique sur les crises est encore plus important que chez les adultes », ajoute le Dr Dib. En fait, le cerveau des migraineux a du mal à s’adapter au changement. Il est très sensible à certains facteurs, comme le changement des rythmes de vie, le manque de sommeil… Les facteurs hormonaux sont aussi impliqués puisque, dès la puberté, les filles sont plus touchées par cette maladie que les garçons (beaucoup de crises se déclenchent au moment des règles). Enfin, l’absentéisme scolaire fait partie des marqueurs de handicap de la migraine. Mais n’oublions pas l’impact négatif des crises sur les activités extrascolaires (sport, sorties…) qui altère beaucoup la qualité de vie des petits. Et ce d’autant que les enseignants ne connaissent pas forcément bien cette maladie et peuvent prendre les petits pour des capricieux ou des tire-au-flanc.
Des traitements antalgiques classiques
Les traitements de crises ont pour but de soulager la douleur et de réduire la durée des crises. « On ne dispose pas pour les petits d’une aussi grande palette de traitements que pour les adultes », souligne le Dr Dib. Concrètement, les médecins prescrivent du paracétamol (doses adaptées au poids des petits). Si cette molécule ne suffit pas à apaiser la douleur, les enfants peuvent prendre des anti-inflammatoires (comme l’ibuprofène) à des doses adaptées. Concernant les traitements de fond, dont l’objectif est d’espacer les crises, les autorités de santé orientent plutôt vers des méthodes psychocorporelles, comme l’hypnose ou la relaxation. Mais les pédiatres, neurologues (ou neuropédiatres) pourront prescrire dans certains cas un traitement de fond. Enfin, le recours à un psychologue s’avère parfois nécessaire pour mieux identifier et exprimer ses émotions ou apprendre à se relaxer. * Sommet francophone de la migraine, 17 septembre 2022.
ÉGLANTINE GRIGIS
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