Maladie de Charcot : les symptômes qui doivent alerter

“Quand je leur ai dit que j’avais des crampes dans les jambes, ils m’ont conseillé de tester mon taux de magnésium…”, témoignait le 20 mai 2022 Leah Stavenhagen, diagnostiquée de la maladie de Charcot à 26 ans, dans les colonnes de Marie Claire.

Même diagnostic en septembre 2021, pour Lisiane, 67 ans, qui dit s’être inquiétée après avoir remarqué une faiblesse au niveau de son pied droit, et des troubles de l’élocution, comme elle le confiait à Marie Claire.

De la famille des pathologies neuromusculaires, la sclérose latérale amyotrophique (SLA) – de son nom scientifique – touche près de 7000 personnes en France, et 150 000 dans le monde, selon les chiffres de l’Association pour la recherche sur la sclérose latérale amyotrophique et autres maladies du motoneurone (ARSLA). Il s’agit d’une maladie neurodégénérative grave, entraînant une paralysie progressive et fatale. 

“On meurt de la maladie de Charcot lorsque le muscle du diaphragme est atteint et que l’insuffisance respiratoire ne peut plus être contrôlée. La décompensation est souvent précipitée par une infection pulmonaire”, explique le Dr Pierre-François Pradat, neurologue à l’hôpital Pitié-Salpêtrière et président du comité scientifique de l’ARSLA.

Elle a notamment été connue du grand public par la médiatisation du Ice Bucket Challenge en 2014, mais aussi après le décès du physicien de renom Stephen Hawking. Elle est “la plus fréquente des maladies rares”, selon les termes du neurologue.

Ce qui ne change rien à sa sentence : la maladie de Charcot reste incurable, en plus d’être d’évolution souvent rapide. “L’espérance de vie est de 3 à 5 après le début des symptômes, symptômes mais il existe heureusement des formes d’évolution beaucoup lente”, indique le Dr Pradat.

D’où l’importance d’agir au plus vite, dès lors que des signes cliniques évocateurs apparaissent, poursuit-il. L’idée étant d’optimiser la prise en charge et de pouvoir initier un traitement neuroprotecteur.

Une pluralité de signes cliniques qui peuvent tromper

Contrairement à l’Accident vasculaire cérébral (AVC) qui est brutal, la maladie de Charcot est lente.

“C’est un déficit moteur progressif et insidieux, indique le neurologue. La SLA s’attaque aux nerfs moteurs qui partent de la moelle épinière et du tronc cérébral”, précise-t-il. C’est d’ailleurs cette mort progressive des motoneurones – les cellules nerveuses contrôlant les muscles dits volontaires – qui expliquent les premiers symptômes.

“Les patients doivent s’inquiéter et consulter un médecin dès lors qu’il y a une difficulté inexpliquée à écrire, à attraper les objets, à marcher, déglutir ou articuler, afin qu’il puisse si besoin les orienter vers un neurologue”, indique le Dr Pradat.

Certains patients déclarent aussi subir des crampes musculaires, une atrophie au niveau des membres inférieurs ou supérieurs ainsi que des fasciculations, correspondant à des contractions brèves d’une partie d’un muscle. “Plus rarement, des troubles respiratoires peuvent être constatés tôt dans la maladie”, complète le neurologue.

Une pluralité de signes cliniques qui peuvent tromper, et retarder le diagnostique, surtout chez les personnes âgées. “À partir d’un certain âge, on fait tous de l’arthrose rachidienne et on peut, à tort, attribuer les symptômes à une compression de la moelle et des racines, ce qui peut occasionner des interventions chirurgicales inutiles et risquées”.

D’autant que la maladie de Charcot est protéiforme. Lorsque sa forme est de début bulbaire, ce sont les motoneurones responsables de la mobilité de la face et du pharynx qui dégénèrent en premier. “Ainsi, les patients vont présenter des troubles de l’articulation ou de la déglutition”. C’est elle qui évolue généralement le plus rapidement.

Tandis que la forme spinale correspond à une dégénérescence des neurones activant le tronc ou les membres. “Au départ, les malades constatent un déficit vers un seul membre. Puis, cela finit par évoluer vers tous les autres”. Dans environ 5 à 10 % des cas, il peut exister des troubles cognitifs associés. 

SLA : reconnaître les symptômes pour reculer l’échéance

Contrairement à d’autres pathologies comme Alzheimer, Parkinson ou l’AVC, il est quasiment impossible de prévoir une SLA. “On sait maintenant que la dégénérescence débute de nombreuses années avant l’éclosion des symptômes caractéristiques mais nous n’avons pas de moyens d’identifier la maladie pendant cette phase silencieuse”, avance le Dr Pradat, qui affirme que seuls 10% des cas sont d’origine génétique.

À l’apparition des symptômes, il est malheureusement déjà tard pour les malades. Les chercheurs estiment que la maladie de Charcot provoque un décès dans les 3 à 5 ans après l’apparition des premiers signes.

“C’est une maladie d’évolution variable d’un patient à un autre. Certains peuvent même survivre après 10 ans”, tempère le Dr Pradat. Stephen Hawking en est l’exemple parfait : diagnostiquée en 1964, la maladie ne l’a emporté que 54 ans plus tard, en 2018.

Le diagnostic se fait par électro neuro myogramme (ENMG), une technique d’électrophysiologie visant à apprécier la perte en nerfs moteurs. « Il n’existe aujourd’hui qu’un seul traitement neuroprotecteur approuvé en Europe, à savoir le riluzole, qui n’a malheureusement qu’une efficacité modeste pour ralentir l’évolution. »

“Bien d’autres molécules sont en phase de développement avancé”, indique le neurologue, qui conçoit “un retard” certain comparativement aux recherches sur Alzheimer, entre autres.

Quant aux formes dites familiales de la maladie, la science pourrait être en bonne voie. Un traitement par thérapie génique est développé dans des formes familiales rares liées au gène SOD1 et peut être délivré sous certaines conditions de façon « compassionnelle ». Il a pour but de ralentir l’évolution de la maladie mais n’est pas un traitement curatif, tempère le neurologue.

D’autre part, une approche diagnostique menée à temps peut permettre aux patients de voir leur qualité de vie améliorée, ajoute le Dr Pradat. “C’est dans ce but que nous développons au sein de mon laboratoire des nouvelles techniques d’imagerie permettant de détecter des anomalies au sein de la moelle épinière, grâce au soutien de l’ARSLA. Une prise en charge multidisciplinaire dans un centre de référence SLA est essentielle afin de mettre en place des mesures symptomatiques”.

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