- Classé parmi les événements les plus médiatisés de la planète, après les JO, la Coupe du monde de football et, selon les versions, le Tour de France, le Festival de Cannes est en tout cas le rendez-vous culturel le plus regardé au monde.
- Et les marques ne s’y sont pas trompées en s’installant en nombre, chaque mois de mai, sur la Croisette.
- « Pour nous, c’est un moment de communication très important, reconnaît Elena Rakocevic, responsable France de Magnum. Tout ce qui se passe sur la Croisette ne reste pas sur la Croisette. Les choses voyagent. »
Cosmétiques, luxe, spiritueux, automobile… A travers les vitres du palais, sur les immeubles, devant les hôtels, pendant douze jours, à chaque mois de mai, de nombreux logos s’affichent en long, en large et en travers sur la Croisette. Les marques auxquelles ils appartiennent ne s’y sont pas trompées. Classé parmi les événements les plus médiatisés de la planète, après les JO, la Coupe du monde de football et, selon les versions, le Tour de France, le Festival de Cannes est en tout cas le rendez-vous culturel le plus regardé au monde. Et donc potentiellement le plus rentable pour ces entreprises qui investissent parfois massivement pendant la quinzaine.
Que ce soit de manière officielle, à l’image de L’Oréal, partenaire de la manifestation depuis vingt-six ans, du groupe de luxe Kering, arrivé en 2015, du joaillier Chopard, créateur de la fameuse Palme d’or. Ou plus officieusement. C’est le cas de Magnum. Le vendeur de confiseries surgelées du groupe neérlando-britannique Unilever enchaîne depuis mercredi dernier les nuits de fête, sur une plage privatisée, pour célébrer ses dix ans de présence à Cannes. Sans aucun lien contractuel avec les organisateurs du plus grand festival de cinéma du monde, le spécialiste de la crème glacée en bâtonnet profite en tout cas, sans complexe, de son aura. Un rayonnement porté et amplifié par les 4.000 journalistes accrédités, mais aussi ceux qui ne le sont pas, les influenceurs et les stars elles-mêmes.
« Le Festival de Cannes est une formidable vitrine »
« Pour nous, c’est un moment de communication très important, reconnaît Elena Rakocevic, la responsable de la marque dans l’Hexagone. Tout ce qui se passe sur la Croisette ne reste pas sur la Croisette. Les choses voyagent. Le Festival de Cannes est une formidable vitrine. » A grand renfort d’égéries et de stars en visite à l’occasion des soirées de films accueillies sur son spot de sable, Magnum fait la promotion de ses nouveautés à un moment particulièrement porteur. « Nous sommes sur un secteur très saisonnier. Et le printemps, c’est le moment où la consommation de glaces commence à s’accélérer, alors c’est parfait », poursuit-elle.
C’est dans cette logique que la marque avait manqué à l’appel lors du festival 2021, décalé à cause de la pandémie en juillet. « Trop tardif » pour une communication efficace. Le festival de retour en mai dès l’an dernier, la marque a elle aussi fait son come-back. Et elle ne lésine pas sur les moyens. Cette année, une plage plus grande a même été réservée. La patronne de Magnum en France explique consacrer « environ 10 % de [son] budget média annuel » à cette opération de seulement quelques jours sur la Côte d’Azur. Et elle n’est pas seule à investir. « Chaque pays [les succursales où la marque est présente] contribue à cet événement », dit-elle également à 20 Minutes.
« C’est une sorte de grande foire »
Les budgets communication explosent au moment du festival. Les déjeuners, dîners, et soirées s’enchaînent à un rythme effréné sur les plages, dans les hôtels ou dans des villas pour des présentations de produits ou de services. De tout horizon. Parfois bien éloignés de l’univers du cinéma. « A tel point que ça en devient même un peu grotesque, témoigne, sous couvert d’anonymat, une habituée de la manifestation. Tout le monde vient vendre son truc. C’est une sorte de grande foire. »
Mais c’est surtout la signature de la certaine puissance du Festival de Cannes. Même si pour les marques, les retombées sont difficilement quantifiables, « l’impact est dans tous les cas très important en termes d’image », se réjouit aussi Vincent Salimon, le président de BMW France. Le groupe automobile, qui a pris la suite de Renault dès 2022 sur la Croisette, est un des seize partenaires officiels actuels du Festival de Cannes. Ses berlines électriques transportent les VIP des hôtels aux tapis rouges dans un ballet presque incessant. Filmé par les caméras du monde entier et sur les réseaux sociaux. « Et le retour sur investissement » que le responsable n’a pas souhaité dévoilé « est beaucoup plus important qu’avec de simples publicités », explique-t-il.
« L’an dernier, nous avons estimé que l’événement avait généré cinq millions d’impacts directs auprès des Français », via tous les canaux de diffusion, précise-t-il aussi, « ravi » de voir la marque allemande accolée à celle du festival. « C’est une plateforme qui réunit des valeurs très proches de BMW. Le luxe, mais aussi la durabilité. La manifestation voulant réduire son empreinte. » Le constructeur a lui-même un pied dans le cinéma, en produisant des courts métrages mettant en scène ses propres véhicules. Le dernier en date, The Calm, avec Uma Thurman, était dévoilé la semaine dernière.
De la visibilité tous azimuts
Les contrats avec les organisateurs de l’événement se boucleraient sur des affinités, qui légitiment ces partenariats et renforcent leur potentiel, fait aussi valoir Géraud de la Noue, président de Campari France, « fournisseur officiel » depuis 2022. « L’art sous toutes ses formes fait partie de l’ADN de la marque. Le cinéma en premier lieu. La seule publicité que Fellini avait accepté de réaliser était pour nous. Nous étions déjà à la Mostra de Venise, à la Berlinale et au Festival du film de Tribeca. Il ne nous manquait plus que celui de Cannes », détaille le responsable, interrogé par 20 Minutes. Un immense bar aux couleurs de la liqueur, bien visible depuis l’extérieur, est installé dans la verrière du Palais des festivals. La marque a également une plage à son image et déployé sa présence dans de nombreux établissements, notamment des restaurants, dans la ville.
Pour Géraud de la Noue, si la présence de Campari représente aussi « une grosse partie de [son] budget com », le rendez-vous cannois étant celui qui dure le plus longtemps, cet investissement « se justifie » même « s’il capitalise surtout sur les marchés étrangers, du fait de la loi Evin en France » (qui limite fortement le droit de faire de la publicité sur les boissons alcoolisées). A tel point qu’il ne se « voit pas arrêter » dans trois ans, à l’issue du pacte conclu pour le moment avec le festival. Dans l’intérêt des deux parties ? Ces partenaires privés sont en tout cas indispensables pour boucler le budget de la manifestation, supérieur chaque année à 20 millions d’euros. Ils « occupent un rôle essentiel dans la pérennisation du plus grand rendez-vous cinématographique mondial », peut-on lire sur le site officiel de la manifestation qui bénéficie également de subventions de l’Etat, de la ville de Cannes et des différentes collectivités.
La pérennité du festival, les autres marques y comptent aussi beaucoup. Sur la plage de Magnum, Elena Rakocevic se verra bien encore rempiler sur du long terme. « Sauf coup de théâtre, notre présence pour les années à venir est évidente », dit-elle.
Source: Lire L’Article Complet