Déguster des fleurs plutôt que d’en offrir ? En voilà une bonne et belle idée. Atout décoratif, gustatif mais aussi nutritionnel, la fleur comestible se décline sous toutes les formes : en plat de résistance, en dessert, dans des boissons ou encore en bonbons.
Sources naturelles de vitamines et de minéraux, les fleurs comestibles sont prisées dans la cuisine végétale pour leurs qualités énergétiques et antioxydantes. À ces apports nutritionnels, même s’ils restent modestes, s’ajoute leur rôle-clef dans l’alimentation quotidienne, en tant que substitut d’épices, d’arômes artificiels et éléments importants dans le visuel d’une assiette, donc dans l’appétit.
Avant de continuer, une mise en garde importante : toutes les plantes et fleurs ne sont pas comestibles et on décompte chaque année un grand nombre d’intoxications en raison d’une méconnaissance dans le domaine. En effet, certaines fleurs toxiques, parfois mortelles, ressemblent de très près à certaines fleurs comestibles. La ciguë, le muguet ou le colchique sont ainsi de dangereux poisons (le livre du grand jardinier français Pascal Garbe, Toutes les plantes belles et comestibles, * dresse la liste des plantes et des fleurs dont il faut se méfier).
Autant de bienfaits que de fleurs dans les prés
Consommées depuis des milliers d’années, les fleurs (comme le pissenlit ou le géranium) ont peu à peu déserté les tables et l’utilisation des fleurs comestibles se cantonnait à la confiserie (la violette de Toulouse, par exempel) ou au domaine médical (tisane de camomille).
Elles sont désormais de retour : les fleurs exotiques ou non, souvent très colorées, sont utilisées par les émissions culinaires (capucine, souci ou bourrache), pour parfaire des dressages et des associations. Mais
En fait, il existe plus de 1000 plantes et fleurs comestibles, que le jardinier Pascal Garbe, directeur des jardins fruitiers de Laquenexy (Moselle), recense dans son ouvrage, Toutes les plantes belles et comestibles (Ed. Ulmer). Et à chacune ses avantages pour notre organisme. “Les fleurs sont très riches en nutriments, détaille Caroline Seguin, diététicienne nutritionniste et comportementaliste, surtout en vitamines C, E, B1, B2 et en minéraux, notamment en fer, calcium et phosphore.” Même si c’est en toute petite quantité (on peut faire l’analogie avec les apports nutritionnels des épices), les fleurs comestibles viendront apporter “des paillettes d’oligo-éléments” sur vos assiettes », continue la spécialiste.
Composées à 80 % d’eau, les fleurs comestibles sont aussi très peu caloriques tout en étant des “bombes énergétiques”, souligne encore Caroline Seguin. À cela s’ajoute que les pétales des fleurs contiennent des acides gras polyinsaturés, que l’on considère comme essentiels, mais que le corps ne sait pas fabriquer : l’oméga 6 (renforce le système immunitaire) et l’oméga 3 (prévient les infarctus et accidents vasculaires cérébraux).
Voici une sélection (non exhaustive) des fleurs comestibles les plus répandues et dont les bienfaits sur notre organisme sont reconnus :
- La capucine n’est pas avare en vitamines C et elle favorise la digestion. Servie en infusion, elle soulage la toux. Les boutons de la fleur, les pétales, les graines et les feuilles sont comestibles. Utilisées crues, cristallisées ou encore confites, les fleurs de capucine prodiguent aussi des polyphénols et antioxydants bénéfiques pour le système cardiovasculaire (plus la fleur est rouge, plus elle est riche en polyphénols et antioxydants).
- La rose contient une grande quantité de protéines. Les pétales sont aussi riches en sels minéraux, vitamines C, en saccharine, de l’acide tannique et en antioxydants. Il existe différentes variétés de rose, mais pas de rose toxique. On peut l’utiliser pour garnir une salade ou en confiture.
- Le pissenlit est un diurétique efficace, c’est d’ailleurs de cette qualité qu’il tire son nom. Tout se mange dans cette plante, les feuilles, la tige, les fleurs. Souvent, les fleurs sont infusées dans du sucre pour faire du miel de pissenlit appelé cramaillote. C’est lorsqu’il est consommé directement (en salade, poêlé ou bouilli) que le pissenlit est le plus riche. Il est recommandé en cas de rétention hydrique ou d’insuffisance rénale ainsi que pour les infections urinaires.
- La bourrache fait partie des fleurs grasses et possède de bons acides gras, des omégas 3 et 6 qui sont par ailleurs utilisés souvent pour le soin de la peau. La bourrache, qui a longtemps été catégorisée comme faisant partie des mauvaises herbes, est désormais appréciée pour ses vertus contre le vieillissement de l’organisme et son goût frais de concombre. Le souci fait aussi partie de cette catégorie de fleurs.
- L’hibiscus est bénéfique pour l’hypertension artérielle. Souvent consommée en infusion ou en thé, cette fleur comestible se trouve aussi sous sa forme naturelle, en confitures ou en salades.
À noter qu’il existe également des fleurs plus simples et tout aussi bénéfiques, que l’on trouve dans les recoins de son jardin (pâquerette, fleur de trèfle, etc.)
Comment bien les préparer
Les fleurs comestibles se marient avec une grande palette de plats et de saveurs ; crues, cuites ou séchées, chacun selon son envie. On trouve des muffins à la rhubarbe et aux fleurs de bleuets, des pizzas à la bourrache ou encore des rouleaux de printemps aux fleurs de capucine.
Si l’on en croit les conseils avisés de Pascal Garbe, une fleur comestible se déguste fraîche, et surtout lorsqu’elle est produite de manière naturelle et qu’elle a échappé aux traitements, aux pesticides et à la lumière artificielle. Par ailleurs, une fleur comestible a une durée de vie de 24 heures et il est conseillé de la consommer au moment de sa maturité, car c’est là qu’elle contient le plus de réserves nutritives.
Agréable surprise pour l’œil, les fleurs comestibles le sont aussi pour le goût. Par exemple, utiliser une fleur à la saveur poivrée permet de se passer de poivre, ou encore de la bourrache pour sa note iodé ou l’œillet d’Inde pour sa saveur anisée. Pascal Garbe partage aussi sa recette du Garbouillou, une sorte de “symphonie végétale” dans laquelle il n’utilise ni sel, ni poivre, ni huile.
“On mange aussi avec les yeux”
En plus d’alléger un plat et de servir de substitut aux condiments, voire aux arômes artificiels, les fleurs comestibles permettent de “juxtaposer le bon et le beau”, affirme Pascal Garbe, guidé par ses deux concepts, le “décomestible” et la “gourmaculture”.
C’est un point de vue que Caroline Seguin, notre comportementaliste, approuve. L’ornementation de l’assiette “joue un rôle décisif dans le rapport à la nourriture et change la donne. On mange aussi avec les yeux.”
A cet égard, on reconnaît que déguster une assiette de fleur possède un pouvoir poétique et psychologique important. “Les fleurs, qu’on les offre ou qu’on les donne à déguster, provoquent toujours une réaction positive. La nourriture est aussi une forme de langage.” Bienvenue aux pays de la fée Clochette !
Une denrée à portée de main
Comment se procurer ce bouquet de fraîcheur ? Vous ne vous en doutiez peut-être pas, mais c’est aussi dans votre jardin que vous pouvez dénicher des fleurs comestibles. En effet, la plupart des herbes aromatiques que nous consommons sont dotées de fleurs tout aussi mangeables. C’est un grand atout, notamment pour les citadins qui n’ont pas la place d’avoir un grand potager : il suffit de laisser germer sa ciboulette ou son oignon et d’en récolter les fleurs.
Pour ce qui est du reste, les fleurs comestibles se multiplient dans les marchés, en barquettes souvent, chez des pépiniéristes pour les plus rares ou dans les épiceries fines. Sinon, vous pouvez aller les chercher vous-mêmes dans les prés. Attention, “il ne faut pas improviser”, prévient Pascal Garbe. Ne consommez une fleur, ou une plante, que lorsque vous êtes absolument certain de sa non-toxicité.
Néanmoins, il en existe de plus faciles à cultiver que d’autres (en faisant aussi attention au cycle des saisons). En voici quelques exemples :
La capucine, que l’on cultive l’été et dont on peut récolter les boutons floraux et les feuilles. La fleur de petit pois, au goût doux et sucré. La fleur de ciboulette, au goût aillé. La fleur d’Hémérocalle, aussi appelé le lys d’un jour, que l’on peut utiliser comme récipient et qui a une texture croquante en bouche. La fleur de sureau, sucrée aussi, peu consommée crue, mais en beignet ou infusée. Et enfin, la rose, dont nous avons parlé plus haut.
Vous savez désormais comment occuper vos journées passées à la campagne (en n’oubliant pas les consignes des experts) et revisiter les bonnes vieilles recettes de famille.
*Pascal Garbe, Didier Willery, Toutes les plantes belles et comestibles, Ed. Eugen Ulmer, 320 p., 24,90 €
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