L’écologie, un enjeu en danger dans la relance économique post-Covid

Cette crise sanitaire va-t-elle réussir à changer notre mode de consommation ? Un jour nouveau à l’horizon ou de belles promesses, qui vont s’évanouir aussi vite qu’elles sont arrivées ? De nombreux spécialistes, aussi bien politiques que scientifiques, veulent une relance économique qui prenne en compte les questions d’environnement et de climat. Une utopie, peut-être pas, mais en danger cela est certain.

Le temps du confinement a-t-il comme bonne grâce notre éveil sur nous-même et sur les problèmes du monde, c’est une vraie question à se poser. La nature via ce prisme glaçant d’une crise sanitaire pourrait ainsi nous remettre sur la voie de la raison en ce qui concerne la thématique de l’écologie. Pour dix ministres européens de l’Environnement c’est peut-être l’heure du changement. Ils ont ainsi appelé à ce que les plans de relance post-épidémie de coronavirus prennent en compte les questions d’environnement et de climat. Le texte est signé par les ministres autrichien, danois, italien, finlandais, letton, luxembourgeois, néerlandais, portugais, espagnol et suédois.

« Nous devrions nous préparer à reconstruire nos économies en introduisant des plans de relance destinés à redonner à l’Europe et à ses citoyens un progrès et une prospérité rénovés et soutenables« , écrivent-ils dans un texte publié par le site climatechangenews.com.

« Nous devons résister à la tentation de solutions à court terme en réponse à la crise actuelle qui risquent d’enfermer l’UE dans une économie basée sur les énergies fossiles pour des décennies. La leçon du Covid-19 est qu’il est essentiel d’agir rapidement. Nous devons donc tenir nos ambitions pour réduire les risques et les coûts de l’inaction dans les domaines du changement climatique et de la perte de biodiversité« , déclarent-ils aussi.

Ces politiciens appellent à une « réponse européenne commune » dans le cadre du « Green deal » européen annoncé par la commission de l’UE, et notamment à « accroître les investissements, particulièrement dans les domaines de la mobilité soutenable, de l’énergie renouvelable, la rénovation des bâtiments, la recherche et l’innovation, le rétablissement de la biodiversité et l’économie circulaire« .

Le « Green Deal » en danger ?

Les mauvaises nouvelles économiques assombrissent la Transition écologique, qui pourrait passer au second plan dans le fameux « monde d’après. » Avec plus de 9 millions de salariés sont au chômage partiel, le gouvernement français sort le carnet de chèques à tout-va. Notre pays vit une récession inédite depuis 1945. Des responsables politiques écolos craignent donc un retour en arrière sur les questions environnementales, qui n’auront pourtant pas disparu avec l’épidémie de coronavirus.

« En 2008, 80% du plan de sortie de crise tournait le dos ou n’intégrait absolument pas les questions climatiques. Ce risque, il est toujours là », explique le député européen Yannick Jadot, au HuffPost.

Pour David Cormand, l’ancien patron d’EELV (Europe Écologie Les Verts), désormais député au parlement européen,“l’important c’est de changer de modèle. C’était vrai avant la crise du coronavirus, ça l’est encore plus maintenant car cette crise met en lumière des limites de notre modèle de développement.

Schématiquement, deux offres politiques vont s’affronter sur la question du jour d’après. La première, défendue par les écologistes, consiste à dire que cette pandémie oblige à accélérer la Transition écologique. La seconde, c’est la volonté de certains dirigeants de laisser de côté les règles et les mesures “vertes” pour soigner plus rapidement les ravages économiques provoqués par le coronavirus.

Selon Le Monde, les manœuvres se multiplient au sein de l’Union européenne pour affaiblir l’ambition environnementale portée par la Commission avec son « green deal ». “Les oppositions d’hier sont les oppositions d’aujourd’hui. Cette crise ne fait pas bouger les lignes, mais elle risque de renforcer les clivages. Il y a un risque que le Green Deal passe au second plan”, regrette notamment Pascal Canfin, le président centriste (et ancien de WWF France) de la commission environnement au Parlement européen au quotidien du soir.

Il est clair pour l’ancien patron de EELV que le salut réside dans “la prise de conscience de la population.” Il donne notamment comme exemple les propositions “pragmatiques” mais “ambitieuses et radicales” des 150 citoyens de la Convention Citoyenne pour le Climat.

« On va investir des milliards dans des entreprises polluantes sans aucune contrepartie »

Un autre député est venu au secours de l’écologie, son nom : Matthieu Orphelin. Ce dernier, a exprimé son désaccord au projet qui consiste à augmenter la participation de l’État sans contrepartie dans des secteurs comme l’automobile ou l’aérien, durement touchés par l’épidémie due au coronavirus.

Dans le projet de budget rectificatif, voté en urgence ce vendredi à l’Assemblée nationale, il est prévu une ligne budgétaire de 20 milliards d’euros, dont l’objectif prioritaire est de « contribuer au redressement économique et financier des entreprises stratégiques les plus affectées par la crise sanitaire ». Le député écologiste du Maine-et-Loire Matthieu Orphelin (ex-La République en marche, LRM) estime que le gouvernement fait une erreur en ne conditionnant aucunement ces aides au respect de la trajectoire climatique de la France.

« Ce qui est en cours est absolument fou : on va voter sur 20 milliards de participation de l’Etat dans des entreprises sans demander aucune garantie ou aucune trajectoire qui respecte l’accord de Paris sur le climat ! Ces soutiens sont bien sûr indispensables pour préserver nos emplois, mais il faut les conditionner à des engagements de moyen terme. La logique dans laquelle est le gouvernement, c’est : Il faut d’abord sauver les entreprises, la transformation et le climat, on verra après. Cela révèle un problème de compréhension des enjeux : on va déverser des milliards d’argent public, sans fixer aucun cadre sur le monde d’après ? Les enjeux climatiques n’ont pas disparu soudainement. On voit que tous les lobbys industriels et polluants sont à l’œuvre.« , commente Matthieu Orphelin, au Monde.

Selon lui, le Medef a écrit à la ministre de la Transition écologique Élisabeth Borne pour remettre en cause « les lois sur la mobilité et l’économie circulaire ». « C’est comme si on n’apprenait rien d’une crise sur l’autre », regrette-t-il.

Un avis partagé par Oxfam, Greenpeace et les Amis de la Terre, qui ont dénoncé « un chèque aux grands pollueurs sans conditions », selon un communiqué.

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