C’est une affaire qui a marqué la lutte contre les violences sexuelles faites aux mineurs. Mercredi 2 novembre 2022, au tribunal judiciaire de Pontoise (Val-d’Oise), s’est ouvert le procès d’Antoine*, jugé pour un viol sur mineure qu’il aurait commis en 2017 alors qu’il avait 28 ans.
Ce dernier, accusé par Sarah*, âgée de 11 ans à l’époque des faits dénoncés, devait être poursuivi en 2018 pour « atteinte sexuelle sur mineur ». Une qualification qui avait provoqué l’indignation, accusée de minimiser les faits rapportés par les parents de la victime.
Antoine, accusé de viol sur mineure de moins de 15 ans
Le 24 avril 2017, Sarah sort de son collège à Montmagny (Val-d’Oise). Arrivée dans un square, la pré-adolescente aurait croisé Antoine, 28 ans, qu’elle dit avoir déjà rencontré à deux reprises. Lui, est père d’un enfant de 9 ans, il l’aurait abordé et lui aurait dit qu’il voulait lui apprendre « à embrasser ». L’enfant, qui n’avait alors aucune expérience sexuelle et intime aurait accepté et l’aurait suivi dans une cage d’escalier d’immeuble, puis dans son appartement.
Ensuite, Sarah aurait eu des rapports sexuels avec l’homme aujourd’hui trentenaire. Et selon lui, sans exprimer de refus. Aux enquêteurs, il aurait ensuite expliqué ne pas s’être débattue par peur. Une fois sortie du logement, l’élève de 6e en larmes aurait appelé sa mère et lui aurait confié avoir été violée.
À la suite des événements décrits par la petite, la famille de Sarah a porté plainte pour viol. Mais en février 2018, le parquet a jugé qu’elle était consentante et a modifié l’accusation en « atteinte sexuelle sur mineur », qui est simplement un délit et non un crime. Aux yeux de la loi française d’alors, malgré son jeune âge, il fallait prouver qu’il y a eu « violence, contrainte, menace ou surprise » durant l’acte sexuel pour le considérer comme un viol.
La question du consentement sur les mineurs débattue
Cette décision a choqué l’opinion publique et a poussé plusieurs associations féministes à dénoncer la culture du viol qui favoriserait les violences sexuelles et la pédocriminalité. L’affaire Sarah a ainsi ouvert le débat sur le consentement sexuel des mineurs avec cette question : une enfant de 11 ans peut-elle être consentante ?
Face à l’ampleur médiatique, le tribunal correctionnel a ajourné le procès et ordonné une nouvelle enquête. Après une longue instruction de trois ans, les magistrats ont finalement modifié le chef d’accusation d’Antoine. L' »atteinte sexuelle » est alors devenue « viol sur mineur de moins de 15 ans ». Cette fois la contrainte morale et la surprise ont été retenues, ce qui explique le renvoi de l’accusé devant la cour criminelle du Val d’Oise.
Pour sa défense, l’accusé a déclaré qu’il ne connaissait pas l’âge de Sarah et dit avoir estimé qu’elle avait entre 16 et 18 ans. Or, cette dernière affirme lui avoir montré son carnet de correspondance de 6e.
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Une affaire qui influence la législation
L’affaire Pontoise devait participer au renforcement de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles avec la loi Schiappa de 2018, mais le Conseil d’État avait jugé le seuil d’âge de consentement inconstitutionnel. Finalement, cette promesse a été votée dans la loi Billon du 21 avril 2021 « visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste ». Le texte instaure un seuil d’âge de consentement à partir de 15 ans pour les victimes de violences sexuelles et de 18 ans en cas d’inceste. C’est-à-dire que les enfants avant ces âges-là ne peuvent être considérés comme consentants.
À noter que, puisque la loi n’est pas rétroactive, cette législation ne sera pas appliquée pour ce procès puisqu’à l’époque des faits elle n’existait pas encore.
L’avocate de Sarah et de sa famille, Carine Durrieu-Diebolt, a précisé à l’AFP (Agence-de-Presse française) que le huis-clos total serait demandé et que le verdict serait rendu le vendredi 4 novembre. Le suspect risque vingt ans de prison.
*Les prénoms ont été modifiés
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