- Billie Jean King, une joueuse emblématique et une femme engagée
- Le match d’une féministe contre un misogyne
- Le 20 septembre 1973 : un match au sommet
- Un match très sérieux qu’il fallait gagner
- Battle of sexes : une rencontre historique portée à l’écran
C’était le 20 septembre 1973. La joueuse de tennis américaine Billie Jean King, ancienne numéro un mondiale et détentrice de 39 titres du Grand Chelem (douze en simple, seize en double dames et onze en double mixte), relève un défi de taille : disputer un match face au joueur Bobby Riggs.
Cette rencontre historique, connue sous le nom de « Guerre des sexes » ou “Battle of sexes’- et depuis portée sur grand écran – représentait un enjeu incroyable pour la lutte pour l’égalité dans le sport.
« La pression était incroyable », avait ainsi témoigné Billie Jean King, comme le relaie l’édition américaine de Marie Claire dans un article de 2017, année de sortie du film avec Emma Stone et Steve Carrell. « Nous nous battions si fort pour changer les cœurs et les esprits sur la valeur des femmes dans la société. J’avais l’impression que tout le monde comptait sur moi pour le battre. »
Billie Jean King, une joueuse emblématique et une femme engagée
Billie Jean King fait partie des joueuses emblématiques de l’histoire du tennis féminin. Elle commence sa carrière en 1959 et la termine en 1983 (en match simple) et sept ans plus tard pour les rencontres en double. Au total, l’Américaine raflera 129 titres, dont 12 en Grand Chelem en simple (et donc seize en double dames et onze en double mixte).
Mais hors des courts, Billie Jean King est également une femme de poigne quand il s’agit de faire entendre sa voix et ses convictions. Féministe convaincue, elle n’hésite pas à oeuvrer pour plus d’égalité dans le sport, en relevant le défi lancé par l’ancien numéro 1 mondial alors à la retraite Bobby Riggs.
Le match d’une féministe contre un misogyne
Misogyne, plaidant pour la puissance des hommes, l’homme qui est alors âgé de 55 ans, cherche à attirer l’attention en arguant qu’il pourrait battre les meilleures joueuses du circuit. Il propose un défi à celles-ci, notamment à l’Australienne Margaret Court et à Billie Jean King, qui venait de gagner les Internationaux de France, le tournoi de Wimbledon et l’US Open. Cette dernière refuse, mais sa consoeur consent à relever le défi et le perd.
Billie Jean King ne comprend pas vraiment cette conception du vivre ensemble. « Mon frère et moi étions toujours proches, et mes parents étaient bons les uns envers les autres (…) Je n’ai jamais eu en tête que l’un des sexes était meilleur que l’autre, le féminisme n’a rien à voir avec le fait de ne pas aimer les hommes”, avait-elle déclaré à l’époque.
Je voulais dire quelque chose qui représentait mes valeurs sans pour autant perdre tout le monde dans le processus
“Ulcérée par ce qu’elle interprète (à juste titre, il suffit de lire la presse de l’époque) comme un revers dans sa lutte, Billie Jean King, qui considérait jusqu’alors l’opération comme indigne d’elle, décide d’affronter Bobby Riggs”, partage Le Monde.
Quand le jour J, le commentateur de télévision Frank Gifford demande à l’intéressée si elle se considère féministe, celle-ci semble prise en étau. Si le mot fait aujourd’hui partie de notre quotidien, à l’époque il était compliqué de se l’approprier publiquement. « Je devais penser vite, parce que même si j’aime le mot, c’est un mot chargé. Alors j’ai dit ‘Je suis pour le mouvement des femmes’. […] « 90 millions de personnes regardaient l’interview, si j’avais dit que j’étais féministe, cela aurait été fini. Les hommes détestaient le terme, beaucoup de femmes le détestaient aussi, la sémantique était puissante, je voulais dire quelque chose qui représentait mes valeurs sans pour autant perdre tout le monde dans le processus. […] J’avais l’impression d’être sur une corde raide », peut-on lire dans l’article de Marie Claire.
Le 20 septembre 1973 : un match au sommet
Au total, le 20 septembre 1973, 32 472 personnes se sont rendues à Houston pour assister à ce match historique qui oppose Billie Jean Kean et Bobby Riggs. Un record resté intouchable jusqu’en 2010. À noter également que comme le rappelle l’Express, le match fut diffusé à la télévision et 90 000 personnes l’avaient vu par écran interposé.
Quand Billie Jean King entre sur le court, elle est si nerveuse qu’elle n’ose pas lever les yeux pour observer la foule. Elle sait simplement que ses parents sont présents ce jour-là pour la soutenir, alors qu’ils ne s’intéressent pas plus que cela au monde du tennis.
Lorsqu’elle décide de jeter un rapide coup d’oeil au public, elle aperçoit une pancarte sur laquelle il est écrit « Bye Bye Bobby ». Une anecdote qui l’aide à souffler face à la pression. Il faut dire que la joueuse n’est pas donnée gagnante par les observateurs. Sans sponsors – aucune marque ne l’a sollicitée avant la rencontre – elle doit faire face à la veste criarde de son adversaire siglée du logo « Sugar Daddy ». La marque aurait payé 50 000 $ au joueur pour qu’il arbore cette tenue.
Un match très sérieux qu’il fallait gagner
« À l’âge de 11 ans, je voulais être la meilleure joueuse de tennis du monde, parce que je savais que je pouvais faire la différence, tout ce que je pouvais penser était que toute la lutte du mouvement serait pour rien si je perdais, je n’avais pas d’autres choix, je devais gagner”, avait-elle expliqué bien des années plus tard à Marie Claire.
Si le début du match fut éprouvant pour la jeune femme, elle finit par gagner le premier set 6-4, puis le second 6-3. Son adversaire qui reste collé à sa ligne de fond de court semble avoir sous-estimé la rencontre … et la joueuse. Quand Billie Jean King remporte le troisième set 6-3, elle lance sa raquette en l’air de joie. “Vous savez, je vous ai vraiment sous-estimé”, lui aurait même dit Bobby Riggs en lui serrant la main en fin de match.
Vous devez comprendre qu’à ce moment-là, il avait 55 ans et moi 29 ans. Il s’agissait plus d’une bataille psychologique que physique.
Pour autant, des années durant, des rumeurs notamment lancées par ESPN laissent entendre que l’homme aurait laissé gagner la championne “pour rembourser ses dettes de jeu”. Une version que Billie Jean King balaie d’un revers de main. « Vous devez comprendre qu’à ce moment-là, il avait 55 ans et moi 29 ans. Il s’agissait plus d’une bataille psychologique que physique. »
Et si le match n’a pas fondamentalement changé les mentalités, il reste une étape importante dans la bataille pour l’égalité des sexes dans le sport et dans la société.
Battle of sexes : une rencontre historique portée à l’écran
Depuis 2017, ce match historique a même fait son entrée dans la pop culture puis qu’un film “Battle of sexe” avec Emma Stone et Steve Carell est sorti en salles.
Dans la version grand écran, quelques différences avec la réalité : le duo est présenté comme de vieux amis qui se côtoient dans le monde du tennis. En réalité, ils ne se connaissaient pas bien. Le joueur avait 25 ans de plus que la tenniswoman et s’était retiré du monde du tennis quand Billie Jean King était âgée de 6 ans. Elle-même le considérait comme une star du tennis à la retraite, ayant suivi comme tout le monde ses victoires.
Une autre différence : la scène dans laquelle Marilyn Barnett (Andrea Riseborough) assistante de la joueuse, la coiffe juste avant le fatidique match, aurait bien eu lieu mais bien plus tôt à Los Angeles, avant même que la jeune femme ne décolle pour Houston.
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