L'ablation de l'utérus augmenterait le risque de diabète de type 2

Indiquée en cas de prolapsus, d’endométriose, de fibrome utérin et de cancers des ovaires ou de l’utérus, l’hystérectomie correspond à une ablation définitive de l’utérus, pouvant impliquer la suppression du col de l’utérus, des ovaires et des trompes de Fallope.

Selon des chercheurs français, dont la nouvelle étude E3N a été présentée lors du congrès annuel de l’Association européenne pour l’étude du diabète (EASD), cette opération augmenterait les risques de développer un diabète de type 2 (DT2), partagent-t-ils dans un communiqué, publié le 21 septembre 2022.

« Il y a des circonstances où une hystérectomie est le meilleur choix pour une femme, mais nous devons nous assurer que les patientes sont conscientes des risques potentiels pour la santé associés à cette procédure, en particulier avant l’âge de 45 ans, et sont informées des thérapies alternatives non chirurgicales », a déclaré le professeur Bonnet, du CHU de Rennes et du centre de Recherche en Epidémiologie et Santé des Populations, à Villejuif.

Avant 45 ans, un sur-risque de développer un diabète de type 2

Pour les besoins de l’étude, 83 582 femmes – âgées de 51 ans en moyenne et non-diabétiques au début de la recherche -, ont été suivies pendant près de 16 ans. 

Tous les deux ans, elles ont été invitées à remplir un questionnaire portant sur plusieurs données relatives à leur alimentation, leur pratique sportive, leur indice de masse corporelle, leur statut tabagique mais aussi leur âge aux premières règles, leur statut ménopausique, l’usage ou non de contraceptifs oraux, ainsi qu’un éventuel diagnostic de diabète de type 2.

Au terme du suivi, 17 141 femmes avaient subi une hystérectomie quand 2 672 femmes ont développé un DT2. Au total, 27 % des femmes ayant subi l’ablation de l’utérus étaient plus susceptibles de développer ce diabète, indiquent les chercheurs. Et ce, avec la prise en compte du niveau d’éducation, du statut tabagique et des antécédents familiaux de diabète, pouvant influencer le diagnostic.

Des chiffres similaires ont été obtenus après prise en compte des facteurs de reproduction (âge aux premières règles, statut ménopausique, traitements hormonaux…) et d’hygiène de vie (activité physique, alimentation).

Autre fait notable de l’étude : le fait d’avoir une hystérectomie sans retrait des ovaires était associé à un risque accru de diabète de 13 %, contre un risque accru de 26 % après une hystérectomie couplée à une ovariectomie. Ce qui suggère que la préservation des ovaires pourrait s’avérer utile pour réduire le sur-risque de diabète.

D’autre part, selon l’étude, les femmes ayant subi une hystérectomie avant l’âge de 45 ans avaient un sur-risque 52% plus élevé. Ce qui n’était pas le cas pour les femmes plus âgées. 

Comment expliquer le développement d’un diabète de type 2 après une ablation de l’utérus ?

Alors comment expliquer ce lien entre diabète de type 2 et hystérectomie ?

Selon les chercheurs, la réponse résiderait dans le fait que les femmes ayant subi une ablation de l’utérus sont plus sujettes à la dépression. « Il est bien connu que la dépression est associée au risque de diabète. Et nos données suggèrent que l’augmentation des traits dépressifs peut jouer un rôle dans l’association entre l’hystérectomie et un risque accru de diabète », analyse le professeur Bonnet. 

Aussi, si elle est parfois vécue comme une délivrance – notamment pour les femmes ménopausées -, des femmes plus jeunes vivent généralement plus difficilement le contre-coup. Et notamment le fait que tout projet de grossesse soit rendu impossible. Cela expliquerait donc pourquoi il existerait un sur-risque pour celles qui ont été opérées avant 45 ans. 

Un lien entre ablation de l’utérus et dépression avait déjà été établi en 2019, à travers deux études menées par le Dr Laughlin-Tommaso à la Mayo Clinic dans le Minnesota (États-Unis). Ses conclusions avaient mis en lumière un risque « accru de problèmes de santé mentale à long terme notamment la dépression et l’anxiété » après une hystérectomie.

Des recherches à approfondir

Si l’on sait que l’hystérectomie peut favoriser les saignements vaginaux, les complications intestinales et urinaires ou, selon les chercheurs de l’étude E3N, l’hypertension artérielle et les accidents vasculaires cérébraux, le lien avec le DT2 était encore largement méconnu.

Toutefois, selon les scientifiques français, il n’est pas question d’affirmer que toutes les femmes de moins de 45 ans déclencheront un diabète après une ablation de l’utérus. Ils indiquent « plutôt une association de risque modéré », et « ne peuvent pas exclure la possibilité que d’autres facteurs non mesurés ou des données manquantes puissent avoir affecté les résultats ».

« Des recherches supplémentaires doivent également être menées pour déterminer les mécanismes sous-jacents conduisant au diabète chez ces femmes », a précisé le Pr Bonnet.

Environ 80 000 hystérectomies sont pratiquées chaque année en France, selon les chercheurs. Des chiffres en baisse depuis 10 ans, d’après l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes).

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