Deuil, maladie, violence… Comment font celles et ceux qui subissent ou ont subi des traumatismes (plus ou moins profonds) et qui, pourtant, sont parvenus à se reconstruire sans tomber dans la dépression ? C’est ce que les psys appellent la résilience. On vous explique…
- · La résilience, une capacité à surmonter les épreuves
- · Le développement du concept de résilience
- · Le mécanisme du processus de résilience
- · Les facteurs innés et acquis
- · Peut-on apprendre la résilience ?
- · célébrités qui ont surmonté le traumatisme ou connu la misère avant d’atteindre le succès
- · Une meilleure qualité de vie
- · Lire aussi sur aufeminin :
- · Les critiques
La résilience, une capacité à surmonter les épreuves
En physique, la résilience traduit l’aptitude d’un corps à résister aux chocs et à reprendre sa structure initiale. Adaptée à la psychologie, elle désigne la capacité d’un individu à surmonter les moments douloureux de l’existence et à se développer, en dépit de l’adversité dans son environnement. Le terme a aussi été employé dans le domaine du réchauffement climatique et du projet “Transition towns” pour rendre chaque société plus durable et résiliente face à la situation inquiétante du climat.
Autrement dit, la résilience consiste à prendre acte d’un traumatisme (crise, deuil, abandon, risque, inceste, violence sexuelle, maladie, guerre), apprendre à « vivre avec » et rebondir en changeant de perspective, voire même en retirer une certaine force.
Le développement du concept de résilience
Évoqué d’abord dans les années 1940 par des psychologues scolaires américains, puis en France au début des années 1980 par John Bowlby (pédiatre et psychanalyste), le concept de résilience fut popularisé par Boris Cyrulnik, éthologue, neuropsychiatre et psychanalyste.
A travers différents ouvrages à succès (dont Un merveilleux malheur), il a exposé au grand public la résilience comme vecteur d’espoir : “Le malheur n’est jamais pur, pas plus que le bonheur. Un mot permet d’organiser une autre manière de comprendre le mystère de ceux qui s’en sont sortis : la résilience, qui désigne la capacité à réussir, à vivre, à se développer en dépit d’adversité.” En partant de sa propre expérience et de l’observation de divers groupes d’individus (survivants des camps de concentration, enfants des rues boliviennes), il a démontré que l’on pouvait aborder la psychologie et la psychanalyse de façon plus optimiste et moins stigmatisante.
Le malheur doit donc être perçu comme une étape qu’il est possible de surmonter.
Bibliographie :
- Résilience, connaissances de base, par Boris Cyrulnik et Gérard Jorland, un ouvrage de référence chez Odile Jacob. 23,90 € à commander sur Amazon.
- La nuit, j’écrirais des soleils, de Boris Cyrulnik, chez Odile Jacob. Un livre bouleversant, dans lequel l’auteur évoque sur les déchirures d’écrivains célèbres, et met en lumière les pouvoirs de guérison que recèle l’écriture. Un vrai coup de coeur ! 22,90 € à commander en ligne ici.
Le mécanisme du processus de résilience
La crise du Coronavirus, les affaires d’inceste, les incendies en Californie et en Australie, les guerres ou les génocides… Ces derniers mois, la résilience individuelle et collective a certainement été remise en question. Selon les spécialistes, l’attitude résiliente est dynamique et passe par plusieurs phases de défense pour contrer les trajectoires négatives.
– Une personne résiliente passe par une révolte et un refus de se sentir condamnée au malheur.
– Viennent ensuite le rêve et le défi, c’est-à-dire le souhait de sortir d’un traumatisme plus fort, en atteignant un objectif.
– On note aussi l’attitude de déni, qui consiste à se créer une image de personne forte, pleine d’énergie afin de se protéger de la pitié de l’entourage, même si une fragilité intérieure demeure.
– Parfois, on a besoin d’un coup de pouce de l’extérieur pour trouver sa résilience, et cela ne nous rend pas plus faible ou vulnérable. Libérer sa parole, partager ses blessures, demander de l’aide … Ces actes font aussi preuve de la résilience, d’une volonté d’adresser ses souffrances et de les surmonter.
– Enfin l’humour : un résilient a tendance à développer une forme d’autodérision face à son traumatisme. Une manière de ne pas se complaire dans la tristesse et de cesser d’être exposé aux yeux des autres comme une victime de la vie.
A noter aussi que nombreuses sont les personnes résilientes pouvant entrer dans une phase ou projet de création (écriture, dessin). Une façon d’exorciser le malheur, de sortir des sentiers battus et de marquer indirectement leur différence dans la société.
Les facteurs innés et acquis
Certains déterminants génétiques sont à prendre en compte. En effet, selon les individus, le cerveau ne produira pas la même dose de dopamine, de sérotonine, et donc de substances euphorisantes. Certains enfants à la naissance seront donc plus «actifs» et psychiquement plus solides que d’autres. En outre, les enfants sont plus aptes en général à surmonter des traumatismes que les adultes grâce à leur souplesse psychique. Comme l’explique le Dr Michael Larara, psychiatre dans un article sur Parole de mamans, “L’enfant ne se défend pas contre les traumatismes comme un adulte, il les incorpore à sa vie, les digère et les métabolise. Il peut changer son référentiel et modifier des éléments de sa personnalité pour s’adapter le mieux possible.” Pour autant, certains traumatismes rejaillisent bien plus tard notamment dans les cas d’inceste.
Une étude dirigée par le Professeur Catherine Bungener et le Professeur Sébastien Montel de l’Université Paris Descartes souligne d’autres facteurs dans l’enfance qui favorisent la capacité de résilience si un drame se produit : le caractère de l’enfant (souple, confiant, n’ayant pas peur des risques) et le climat familial dans lequel il s’épanouit (harmonieux, sécurisant, attachement maternel fort).
Peut-on apprendre la résilience ?
Après un choc ou une douloureuse épreuve, un individu et ce, qu’importe son âge, est plus ou moins contraint de se créer un processus de résilience. Il s’agit alors d’accepter le coup du sort, de le maîtriser pour ensuite le transformer et pouvoir ainsi continuer à vivre normalement. Même si bien sûr, la blessure est présente et le restera toujours…
2 célébrités qui ont surmonté le traumatisme ou connu la misère avant d’atteindre le succès
Oprah Winfrey : Sans vraie figure parentale, enfant victime de la maltraitance, du viol, et d’inceste, Oprah Winfrey n’a pas vécu des étapes de dévéloppement faciles. Aujourd’hui c’est une reine résiliente du talk-show aux États-Unis où les grandes célébrités se sont livrées. Parmi elles, Michelle Obama, Beyoncé, et Meghan Markle.
Demi Lovato : Admise en cure de désintoxication pour des problèmes de santé mentale et physique, dont la boulimie et les troubles bipolaires, la chanteuse américaine lutte maintenant contre la stigmatisation des maladies mentales.
Une meilleure qualité de vie
Dans le livre “La résilience surmonter les traumatismes” (2003) de Marie Anaut, autrice et professeure de psychologie à l’Université Lumière Lyon-II, une citation révèle clairement l’impact de la qualité résiliente d’une personne sur son état, son énergie, et sa vie : “Nous pouvons dire que la résilience fait référence aux ressources développées par une personne, un groupe ou une communauté, pour tolérer et dépasser les effets délétères ou pathogènes des traumatismes et vivre malgré l’adversité, en gardant une qualité de vie avec le moins de dommage possible”. La résilience nous aide à traverser les moments douloureux de la vie avec la capacité de gérer les crises au lieu de tomber en dépression face à ces situations difficiles.
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Les critiques
Si le concept de résilience est bien accepté et utilisé sur le territoire des Etats-Unis, il semble plus difficile à imposer en Europe. La raison : les psychologues américains s’inspirent davantage du comportementalisme pour analyser certains phénomènes et établir des thérapies. De plus, les américains ont une psychologie individuelle et collective au long de la vie très résiliente. Dès les 18 ans, la plupart d’entre eux prennent des risques et quittent leur environnement familial pour enchaîner les études et le travail. Face aux coûts des études très élevés, en plus de peu d’aide des institutions gouvernementales, les américains confrontent la notion de la résilience, prennent des risques, et se créent de nouveaux projets dès le début.
En France, plusieurs psychanalystes dénoncent la notion de résilience comme un concept visant à se préoccuper davantage des symptômes plutôt que de l’origine des maux de l’individu. Alexandra Mignien, réalisatrice, lauréate du prix #EllesfontYouTube au Frames Festival pour sa vidéo “Je suis nue”, critique ce concept.
Dans sa vidéo sur YouTube, “Ce qui nous ne tue pas” , elle explique que le concept de la résilience est tellement populaire qu’il se transforme parfois en injonction. “Ce qui ne me tue pas me rend plus fort”. Mais la réalisatrice affirme au contraire que quand “on survit à ce qui ne nous a pas tué, on ne devient pas un survivant”. Autrement dit, l’idée de la résilience peut être mal perçue. On oublie que la résilience ne nous rend pas toujours plus fort.e, mais parfois “plus seul.e” et au lieu de cacher ses blessures, c’est justement mieux d’en parler.
Loin d’être perçue comme un signe d’invulnérabilité, la résilience présente néanmoins l’avantage de véhiculer aux yeux du grand public, un message optimiste et anti-fataliste, mieux encore un “réalisme de l’espérance” comme le dit la Fondation pour l’enfance.
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