Maman d’un garçon de 2 ans, elle venait de fêter ses vingt printemps. Jeune et jolie, elle croquait la vie à pleines dents. Jusqu’à ce sombre samedi 22 octobre…
À Brive-la-Gaillarde, les distractions ne sont pas légion. Les jeunes de la région aiment donc à se retrouver, pour boire et danser à La Charrette, par exemple, l’un des rares établissements de nuit de cette Corrèze un peu oubliée des médias parisiens – à la notoire exception du regretté Jean-Pierre Pernaut. La soirée est déjà bien avancée quand Justine Vayrac, accompagnée de ses amis, dont le jeune Théo, avec qui elle s’est liée d’amitié, se laisse porter par la musique, la fête, la joie d’être ensemble. Seulement voilà, sur le coup des quatre heures du matin, elle a un peu abusé de boissons fortes. D’où un besoin pressant d’aller respirer l’air frais. Ne la sentant pas dans la meilleure des formes, Théo l’accompagne aussitôt. Sur le parking de la boîte de nuit, le couple croise alors un certain Lucas L…
Charmeur, noceur et impulsif
Théo : « Visiblement, Justine le connaissait déjà. Elle avait fait plusieurs soirées avec lui. Ils avaient une attitude amicale l’un envers l’autre. Je n’avais pas de quoi m’inquiéter. Elle se sentait de plus en plus mal. Avec Lucas, nous l’avons raccompagnée à sa voiture. Une fois là-bas, Justine dit qu’elle voulait se reposer une heure dans la voiture. Lui m’a dit vouloir aussi se reposer. Les deux se sont allongés dans le véhicule. »
Puis l’état de Justine n’allant pas en s’arrangeant, Lucas L. se propose de la raccompagner chez lui. Théo, toujours : « C’est à ce moment-là que je suis parti, en m’assurant qu’il s’occuperait d’elle. Comme je ne le connaissais pas, j’ai préféré prendre son numéro. Je lui ai demandé de me passer un coup de fil, ce qu’il a fait volontiers. Et j’ai enregistré son portable. » Et là se joue le drame. Théo, confiant, peut-être trop, rejoint ses amis sur la piste de danse. Ils ne reverront plus jamais Justine vivante…
Le suspect, le matin même du drame, a en effet affiché un comportement pour le moins glaçant. Il aurait rétorqué au texto de Théo qui s’enquérait du bien-être de son amie : « J’ai autre chose à faire que de penser à ta pote bourrée ».
Car, dès les premières lueurs de l’aube, les parents de la jeune fille, ainsi que son petit ami, s’inquiètent de ne plus avoir de ses nouvelles. Un avis de recherche est sitôt lancé. Aussitôt, Théo communique le numéro de portable de Lucas L. aux gendarmes, permettant à ces derniers de l’interpeller immédiatement chez lui, à Beynat, petite commune de 1 300 habitants. Mais qui est ce fameux Lucas L, qui n’a pas tardé à reconnaître ces faits accablants ? C’est un enfant du village dont la famille est honorablement connue de tous depuis des décennies. Il travaille dans la ferme de ses parents, à Eyzat-haut, hameau perché sur une colline avoisinante. Sa grande passion ? Les vaches limousines dont il poste régulièrement des photos sur son compte Instagram. Ce joueur assidu du club de foot local est, de plus, réputé aimable et serviable. Ses proches amis sont alors sous le choc : Lucas L. est certes charmeur, mais « n’insiste jamais » quand une fille refuse ses avances, apprend-t-on, au moment où il n’est encore qu’en garde à vue. Un jeune homme de 21 ans, a priori sans histoires. Vraiment ?
En effet, il ne faut pas longtemps aux gendarmes pour apprendre qu’en 2020, ce dernier a volontairement incendié une grange pour des motifs demeurés des plus flous à ce jour ; ce qui lui a valu quelques mois de prison. Pourtant, libéré l’année dernière et placé sous contrôle judiciaire, Lucas L. aurait toujours respecté les obligations relatives à sa libération conditionnelle. L’autre détail qui met illico la puce à l’oreille des enquêteurs, c’est que ce dimanche 23 octobre, le lendemain de la disparition de Justine Vayrac, Lucas L. assiste tranquillement au match de foot opposant l’équipe de Beynat à celle de Saint-Jal.
Zones d’ombre
Mais à peine ses aveux sont-ils rendus publics, qu’aussitôt les langues se délient. Le garçon modèle pouvait aussi se révéler « impulsif », si ce n’est « violent », allant jusqu’à être expulsé du collège de Beynat, où il était tenu pour rigoureusement incontrôlable.
Aujourd’hui, cité par Le Parisien du 28 octobre, un certain Vincent peine encore à comprendre : « Qu’est-ce qui s’est passé dans la tête de ce mec pour faire ça ? » Ce d’autant plus qu’il semblait bien connaître sa présumée victime et entretenir avec elle des rapports parfaitement amicaux. Car la confession de celui qui vient d’être mis en examen pour « enlèvement, viol, séquestration et meurtre » est proprement terrifiante. À l’en croire, après avoir ramené Justine Vayrac chez lui, il y aurait eu rapport sexuel consenti ; mais le coup de poing qu’il lui aurait donné en pleine tête aurait entraîné sa mort. Mais voilà qui est bien court et n’a évidemment pas convaincu les gendarmes. Car si ce « rapport sexuel » a été « consenti », pourquoi le « coup de poing » ? Et si c’était, tel qu’il le prétend, un simple « accident », pourquoi ne pas avoir immédiatement appelé les secours ?
La vérité, c’est que la version du présumé coupable ne tient pas la route une seule seconde. Ou alors, comment expliquer, selon d’autres aveux ne tardant pas à venir, que Lucas L. soit parti pleine forêt, sur un engin agricole, avec le corps de la défunte à moitié dénudé, pour y creuser un trou et ensuite l’enterrer ? Et comment expliquer encore ces traces de sang découvertes dans sa chambre, ainsi que sur le levier de vitesse de l’engin agricole en question ? Sans oublier le fait que le sac à main de la victime ait été « découvert, calciné, à proximité du domicile du suspect », tel que révélé par la procureure de la République de Brive ?
Plus grave encore : Lucas L. évoque un unique « coup de poing » ayant entraîné la mort de Justine Vayrac, alors que les enquêteurs affirment : « Le corps présentait une pluralité de coups au niveau de la face, dont au moins un avec une arme contondante »… Nous voilà donc bien loin de l’étreinte amoureuse présentée pour avoir été librement consentie.
Au stade actuel de l’enquête et selon les premiers résultats de l’autopsie, la malheureuse aurait succombé à une strangulation, après avoir reçu de nombreux coups sur le visage donnés par Lucas. Depuis, le présumé coupable dort en prison. Il y a fort à parier qu’il n’en sorte pas de sitôt. `
En attendant, les parents et les amis de Justine Vayrac pleurent, enfermés qu’ils sont désormais entre les murs de leur chagrin. Une autre prison qui, jamais, ne connaîtra la remise de peine.
Nicolas GAUTHIER
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