Après une saison 1, récompensée du prix du public au festival Séries Mania 2019, Mytho revient pour une saison 2 encore plus singulière, jubilatoire, hilarante et émouvante que la précédente, grâce à la plume mordante d’Anne Berest et le regard acéré de Fabrice Gobert. Dans cette saison 2, déjà disponible sur Arte. Tv et diffusée dès ce jeudi sur
Arte à 20h55, Mathieu Demy renfile le costume drôlement pathétique de Patrick, le mari d’Elvira (Marina Hands), anéanti par le mensonge de son épouse, qui, souvenez-vous, a prétendu avoir un cancer en saison 1. 20 Minutes a rencontré à
Séries Mania l’artiste qui incarne avec beaucoup d’humour, de sensibilité et d’humanité cet homme au fond du gouffre.
Comment se sont passées les retrouvailles avec toute l’équipe de « Mytho » ?
Mytho est une espèce de tournage de rêve parce que tout le monde travaille en bonne intelligence. On s’entend très bien, on s’amuse bien ensemble. Au fur et à mesure de l’évolution de notre travail en commun, rien ne se dégrade, j’ai rarement vécu quelque chose d’aussi harmonieux sur la longueur. J’ai eu du plaisir à retrouver mes camarades. Ce sont des acteurs incroyables. Marina Hands est une actrice que j’admire énormément. Les acteurs qui incarnent les enfants sont formidables. Se retrouver sur ce projet a quelque chose de rassurant, parce qu’on sait que cela va être quelque chose de bien, un moment de création challengeant.
La saison 1 a été très bien accueillie…
C’est assez rare que l’écho du public, des professionnels et de la presse soit raccord. C’est le signe que Mytho tape juste, que la série est fine, compréhensible et lisible. C’est dommage quand certaines passent à côté. Là, j’ai eu l’impression que tout le monde se retrouve à plein degrés différents. On peut se laisser porter par les personnages et être diverti ou on peut creuser et trouver des choses intéressantes. La saison 1 démarre avec des archétypes. Mytho parle de la famille. On doit raconter l’ado en crise, le mari volage, la mère débordée, etc. C’est là où les gens se retrouvent, que la série a une résonance. Au fil des épisodes, les personnages deviennent plus subtils, plus complexes. Et pour ceux qui veulent creuser, c’est un puits sans fond. Anne Berest et Fabrice Gobert sont attentifs aux détails, à la symbolique des images, comme avec le jacuzzi ou les canards en saison 1. Tout le tissu esthétique de la série est bardé de références aux thèmes que la série aborde.
Comment décririez-vous le ton de cette saison 2 ?
Mytho est un mélange d’émotions, de comédie, de loufoque et d’étrange. Pas du fantastique au sens d’extra-réalité. Mytho parle des choses et des signes magiques de la vie. Je crois que le ton est le même qu’en saison 1. J’aime aussi le rythme particulier de la série qu’Anne Berest et Fabrice Gobert ont tissé, où l’on est laissé suspendu par les choses. Mytho n’est pas un produit facilement identifiable. C’est une œuvre complexe.
Comment se sont passées les retrouvailles avec votre personnage, Patrick ?
J’ai vraiment eu du plaisir à retrouver Patrick, c’est comme retrouver un vieux copain un peu con, mais qui fait rire !
Dans quel état d’esprit est Patrick en ce début de saison 2 selon vous ?
Il y a une ellipse entre la fin de la saison 1 et le début de la saison 2. On retrouve Patrick complètement au fond du gouffre, mais il nous fait rigoler quand même. Il s’est construit une cabane dans sa maison. Patrick est celui qui est le plus bouleversé par le mensonge d’Elvira en saison 1. Ce mensonge met en difficulté les fondations même de sa famille. Quand il dit : « J’ai l’impression qu’elle m’a menti depuis le début », on imagine très bien comment il a pu revisiter toute l’histoire de son couple à travers le filtre de ce mensonge. Pour lui, tout s’est effondré. Il est donc assez logique de le retrouver dans cet état. C’est lui qui a pris le plus cher pendant l’ellipse. On le retrouve donc énorme et au bout de sa life.
C’est pour cela qu’il éprouve du ressentiment envers Elvira ?
Le ressentiment que Patrick peut avoir envers Elvira, c’est de l’amour en creux. Son ressentiment n’est jamais aussi fort que l’amour qu’il a pu avoir pour elle.
En saison 1, vous aviez accordé un soin tout particulier à son look, on retrouve un Patrick métamorphosé en saison 2…
Quand j’ai lu cette scène où Patrick fait ses courses en robe de chambre. J’ai tout de suite pensé à l’ouverture de The Big Lebowski. Le Dude fait partie mon panthéon de personnages favoris de fiction et je me suis dit que c’était l’une des inspirations possibles pour le Patrick de ce début de saison 2. Parce qu’encore une fois, il a une trajectoire de dingue !
Il a aussi une nouvelle femme dans sa vie, Sandrine, campée par Marie Bouvet, comment voyez-vous leur relation ?
J’aime beaucoup le personnage de Sandrine. C’est une femme, a priori pleine de bonnes intentions, qui semble être la parfaite candidate pour réparer ce Patrick blessé. Mais, elle va se révéler être encore plus dingue que Elvira, plus vénéneuse et manipulatrice aussi. Patrick fait des efforts et essaie vraiment que cela fonctionne entre eux.
Accablé par les mensonges d’Elvira, il se dit être « en quête de vérité », j’ai l’impression qu’il se ment à lui-même…
C’est tout à fait juste. Cela renvoie encore au mensonge, le thème fondateur de Mytho. Est-ce que tous les couples sont fondés sur des mensonges ou pas ? En tout cas, il se ment à lui-même de manière assez évidente.
Brigitte, jouée Linh-Dan Pham, l’ex-maîtresse de Patrick, sort avec un homme qui est presque son sosie…
C’est vraiment drôle ! Cela raconte en creux que Patrick est tout de même digne d’amour. J’aimais la relation qu’avaient Brigitte et Patrick en saison 1. Et Linh-Dan Pham est une super actrice. Patrick a tous les défauts qu’un homme peut avoir, c’est aussi peut-être un bon coup ! Le fait que Brigitte soit folle de lui, essaye, une fois leur rupture actée, de retrouver un homme comme lui, cela dit que Patrick a quand même des qualités. Cela enrichit le personnage.
Il y a comme une inversion des rôles avec ses enfants, notamment avec Sam…
Sam est beaucoup plus affirmé. J’adore son look aussi. Il est magnifique, complexe. Il représente une jeunesse d’aujourd’hui beaucoup plus libre. Patrick, même s’il est un monstre d’égoïsme, arrivait parfois à être un père aimant, qui arrivait à parler à ses enfants, à les soutenir. Là, il est tellement mal qu’il a besoin qu’on s’occupe de lui. Il y a une inversion des situations. C’est beau. On n’arrête pas de dire que la famille de Mytho est dysfonctionnelle mais il y a quand même beaucoup d’amour entre les personnages.
Ce que je trouve particulièrement intéressant au travers votre personnage, c’est qu’il se retrouve à la croisée des interrogations actuelles sur la masculinité…
C’est une des choses qui m’a beaucoup plu dans Patrick dès la lecture de la saison 1. Patrick ne sait jamais s’il doit sortir les dents ou être gentil. Finalement, il questionne, même si ce n’est pas consciemment, sa virilité, sa paternité et sa masculinité. Il est au cœur de ces questionnements-là : qu’est-ce que c’est que d’être un homme peut-être aujourd’hui. Comme il s’écroule en saison 2, cela rajoute une couche à ce truc-là, parce qu’il se laisse complètement aller.
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