Confinement : comment accompagner nos proches en fin de vie ?

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Cynthia Mauro, psychologue et docteure en psychologie en unité de soins palliatifs, nous donne des clés pour mieux vivre cette période si particulière qui empêche ou limite nos visites à nos proches hospitalisés ou en Ehpad.

Vous travaillez comme psychologue en unité de soins palliatifs, comment la crise sanitaire bouscule-t-elle vos pratiques ?

Cynthia Mauro : Face à cette crise, l’ensemble du dispositif hospitalier et médical de ville a dû être reconfiguré et ajusté pour éviter les saturations en service de réanimation et garantir une bonne prise en charge des malades. L’une des grandes difficultés est qu’aujourd’hui la seule réponse offensive que nous ayons, en dehors des gestes barrières de précautions sanitaires, est la distanciation sociale pour se protéger les uns les autres. Nous avons largement entendu dans les médias des messages d’alerte bouleversants comme celui de cette aide-soignante éprouvée : « Nos personnes âgées ne mourront pas du coronavirus, elles mourront de chagrin« . Il est vrai, qu’aux premiers cas de contamination, les mesures gouvernementales mises en place ont privilégié la santé physique et la mise en sécurité des plus fragiles en minimisant la santé psychique et les besoins du cœur. Les visites étaient formellement interdites ou extrêmement restreintes selon les structures ou les départements. La situation a évolué. Les familles peuvent accompagner avec tendresse et humanité leur proche, lui apporter des objets, des dessins ou tout autre témoignage d’affection en relais des personnes qui pensent à lui et qui ne peuvent être présentes. Il n’est pas question que cette épidémie génère une épidémie de solitude. En tant que soignants, nous veillons à porter la même attention à nos patients, aux familles. Finalement, cette crise a fait émerger d’autres possibles d’accompagnement et moins d’impossibles.

Comment les familles vivent-elles les mesures de restrictions et comment les accompagnez-vous ?

Les familles sont nombreuses à partager avec nous leurs sentiments d’impuissance, de culpabilité, de colère. Etre restreint ou empêché d’être aux côtés de ceux que l’on aime est particulièrement éprouvant et ajoute de la souffrance psychologique à la souffrance de savoir son proche sur le point de mourir. L’annonce de l’aggravation irréversible de son état de santé, et de son décès imminent est, et surtout par téléphone, profondément anxiogène et douloureuse. Il ne faut pas hésiter à demander des informations médicales précises pour comprendre la situation et exprimer ses souffrances et ses besoins d’accompagnement. Nos vécus sont singuliers et il est impossible de généraliser une conduite à tenir. Il nous est parfois trop pénible psychologiquement d’être en présence physique, il nous est parfois indispensable d’être là. C’est pourquoi, il est important de solliciter ce soutien téléphonique dans l’unité de soins pour éclairer la prise de décision, pouvoir en discuter en famille, et faire des choix d’apaisement et d’accomplissement.

Quelles propositions faites-vous pour aider les patients isolés et ces familles qui ne peuvent pas être présentes ?

Beaucoup d’équipes soignantes tentent de développer le recours aux outils numériques par l’utilisation de tablettes, d’ordinateurs portables, via Skype, WhatsApp, Messenger ou toute autre application de communication, pour maintenir le contact et préserver le lien avec son proche quand la parole est encore accessible. Ce sont des outils précieux pour rompre le sentiment d’isolement du patient. Ces échanges représentent un exutoire, une ouverture vers l’extérieur. Aujourd’hui, je dois parfois prendre rendez-vous avec certains patients dont les agendas sont remplis de visioconférences ! De leurs côtés, les familles, qui peuvent voir leur proche, l’entendre, voir sa chambre, mais aussi les soignants qui l’accompagnent, y trouvent de l’apaisement. Mais il nous faut parfois faire appel aux dons et à la générosité pour équiper correctement les unités et les services. Ce n’est pas simple à mettre en œuvre en termes de logistique et de disponibilité des soignants extrêmement mobilisés. Chacun fait de son mieux.

Comment lutter contre le sentiment de culpabilité de ne pas accompagner son proche comme on le devrait ?

Les mesures de confinement ne nous permettra peut-être pas de trouver le réconfort nécessaire dans les bras de ceux que l’on aime, et d’être dans le partage émotionnel en présentiel. Beaucoup de familles s’inquiètent de ne pas pouvoir être là dans le tout dernier instant, celui que l’on peut appeler le dernier souffle. Mais il est important de dire aux familles que cette absence contrainte ne peut pas être vécu uniquement comme un rendez-vous manqué inconsolable ou irréparable. Car rien ne peut annuler l’affection et l’amour qu’on porte à son proche, ni la puissance de l’attachement qui a une valeur inestimable. Les familles peuvent aussi être assurées de la présence entière, sincère et dévouée des équipes soignantes qui sont une présence relai. Dans notre unité, nous avons un arbre de mémoire et nous proposons aux familles d’accrocher pour elles, en attendant qu’elles puissent venir si elles le souhaitent plus tard, un petit carton pour symboliser leur présence, noter quelques mots importants, laisser une trace et se souvenir de leur proche décédé.

Quels rituels peut-on mettre en place pour « être avec » malgré la distance ?

Innovons, renouons avec ces petits riens d’ordinaires qui ont pourtant une puissance symbolique majeure. Une bougie allumée pour veiller à distance, une fleur plantée dans une jardinière ou fabriquée avec du papier, une photo de son proche comme un autel de pensées, un ballon envoyé dans le ciel, un carnet dans lequel on pose ce que l’on aimerait encore lui dire, ce que l’on a partagé, ce que l’on n’oubliera jamais.

Note de la rédaction : Depuis lundi 20 avril, le ministre de la Santé Olivier Véran a annoncé un assouplissement du droit de visite aux personnes âgées en Ehpad. Très encadrées, ces visites sont soumises à des conditions strictes (trente minutes, deux personnes maximum, sans contacts physiques, etc.)

Et après : Organiser une cérémonie en hommage à nos défunts. Happy End vous accompagne pour célébrer l’être aimé et lui rendre un dernier hommage.

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