Comment bien me protéger des ondes ?

Depuis le 1er juillet 2020, tous les appareils émetteurs d’ondes que nous utilisons près du corps doivent indiquer leur niveau de diffusion. Ce qu’il faut savoir pour se protéger.

Restez informée

Parce que l’énergie transportée par les ondes électromagnétiques est en partie absorbée par le corps humain, les réglementations qui encadrent ces émissions se sont durcies ces dernières années pour les téléphones mobiles, et depuis le 1er juillet dernier pour tous les appareils d’une puissance d’émission de plus de 20 milliwatts que nous utilisons à moins de 20cm de notre corps. Des informations qu’il faut savoir décrypter.

Une réglementation en progrès

Une meilleure information

Désormais, les constructeurs sont tenus, dans leurs publicités, sur les lieux de vente et dans les modes d’emploi, d’indiquer le débit d’absorption spécifique (DAS) de tous les appareils émettant des ondes électromagnétiques et que nous utilisons ou portons près du corps : tablettes, montres connectées, écouteurs sans fil, radiocommandes… Cette obligation était jusqu’ici réservée au téléphones mobiles. Le DAS est la quantité d’énergie transportée par les ondes et absorbée par le corps humain. Exprimé en Watt par kilogramme (W/kg), il indique la valeur maximale que peut émettre l’appareil en fonctionnement. « C’est une mesure effectuée par les constructeurs eux-mêmes, en laboratoire« , explique Anne Perrin, de la Société française de radioprotection.

A savoir. Au moment de choisir une tablette ou un jouet radio-commandé, le consommateur peut donc opter pour ceux dont le DAS est moins élevé. L’obligation d’information vaut également pour les produits distribués à titre gratuit.

Des contrôles renforcés

En 2016 déjà, l’Union européenne avait décidé que les appareils maintenus près du corps ne devaient pas dépasser un DAS de 4 W/kg. Mais jusqu’ici, en l’absence de contrôle, les infractions n’étaient pas sanctionnées. Désormais, ces contrôles sont confiés en France à l’Agence nationale des fréquences. « Nous allons vérifier que les DAS réellement constatés ne dépassent pas le maximum réglementaire, et nous publierons les résultats de ces études sur notre site (data.anfr.fr), comme nous le faisons déjà pour les téléphones mobiles« , indique Gilles Brégant, directeur général de l’ANFR.

A savoir. L’amende que peut infliger l’ANFR aux fraudeurs est faible (7.500€), mais l’agence peut également engager des poursuites pénales devant les tribunaux.

Les mobiles déjà surveillés

Jusqu’à présent, seuls les téléphones portables étaient soumis à cette obligation d’information, et contrôlés par l’ANFR. Et la limite d’émissions fixée pour les mobiles est encore plus faible : 2W/kg. « Les DAS affichés sont ceux atteints lorsque l’appareil émet à son maximum : c’est le seuil qu’il ne doit jamais dépasser, même à pleine puissance« , souligne Anne Perrin. « Dans des conditions d’utilisation habituelles, les téléphones mobiles, comme les tablettes ou les montres connectées, ont des émissions bien inférieures aux limites réglementaires« . Le DAS maximum de 2W/kg est celui que pourrait atteindre un mobile dans une zone à très faible réception, où il devrait utiliser toute sa puissance pour tenter d’atteindre le réseau.

A savoir. Une façon de limiter l’exposition aux ondes est donc d’éviter de téléphoner d’endroits où l’on capte mal – ascenseur ou parking souterrain, par exemple.

Des téléphones hors normes

Encore aujourd’hui, lors des contrôles, l’ANFR découvre que certains mobiles dépassent le DAS réglementaire. C’est rarement le cas des modèles haut de gamme des constructeurs renommés, mais peut arriver en particulier pour des mobiles à petits prix, comme cela a été le cas pour des appareils des marques Xiaomi (Redmi 7), Gigaset (GS370 Plus) et tout récemment Razer (Phone 2). « Si le DAS est supérieur aux normes, le constructeur peut dans certains cas le réduire par une mise à jour. A défaut, il doit le retirer du marché et rappeler les modèles déjà vendus« , précise Gilles Brégant.

Prendre les bonnes mesures

Une question de distance

Jusqu’en 2016, les constructeurs pouvaient calculer le DAS d’un mobile en tenant l’appareil jusqu’à 25 mm du corps. Or, bien sûr, s’il est positionné loin du corps, ce dernier absorbe moins d’ondes, et le DAS est plus faible. Cette façon de mesurer a été critiquée par l’administration française car elle ne correspondait pas aux conditions réelles d’utilisation.

A savoir. Depuis 2016, le DAS des téléphones mobiles doit donc être calculé lorsque l’appareil est éloigné au maximum de 5 mm du corps, ce qui correspond à l’épaisseur d’un vêtement.

Smartphones, deux débits pris en compte

Autre progrès, pour les téléphones, le DAS ne peut dépasser 2W/kg quel que soit la positionnement du téléphone. Initialement, les constructeurs s’attachaient seulement respecter la norme de 2W/kg pour le « DAS tête » qui reflète l’usage du téléphone mobile placé entre l’oreille et la bouche, en conversation vocale. « Or, l’antenne est placée près de la bouche, qui est, dans cette position, le point le plus éloigné de la tête. Le DAS est plus élevé si l’on porte le téléphone dans la poche d’un vêtement, voire dans un sac à main, car l’antenne est alors plus près du corps« , souligne Gilles Brégant. Entre 2012 et 2016, l’ANFR avait réalisé des tests sur 300 téléphones, qui respectaient la réglementation en vigueur. Mais, à plat, près du corps, ces appareils émettaient parfois plus de 7W/kg.

A savoir. La réglementation contraint donc les constructeurs à respecter le seuil de 2W/kg tant pour le DAS tête que pour le « DAS tronc », qui correspond à l’usage du téléphone plaqué contre le corps.

Tablette, jouet, montre, des règles spécifiques

Pour les écouteurs sans fils, qui émettent très faiblement, la norme à respecter est aussi le DAS tête. Mais pour les tablettes, montres connectées, ce n’est ni le DAS tête, ni le DAS tronc qui compte, mais le « DAS membre »… Il reflète l’énergie absorbée par le corps quand l’appareil est en contact avec lui, mais avec une limite de 4W/kg au lieu de 2W/kg car « les membres contiennent moins de tissus/organes sensibles« , note l’ANFR.

A savoir. Ces limites sont déterminées par l’ICNIRP, Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants, un organisme reconnu par l’OMS qui regroupe des scientifiques spécialistes du rayonnement.

Plus de risques avec les vieux appareils

Les réglementations ne sont pas rétroactives. Rien n’oblige donc les constructeurs à mettre à jour les vieux appareils. Les tablettes achetées avant 2016 par exemple n’étaient pas tenues de respecter le DAS de 4W/kg. Et pour celles commercialisées depuis, rien n’assure que le constructeur, qui ne risquait aucune sanction, a volontairement appliqué la norme. Attention surtout aux vieux téléphones 2G qui émettent davantage d’ondes que les smartphones actuels, qui font appel à d’autres réseaux.

A savoir. Vous pouvez connaitre le DAS de votre smartphone Android en téléchargeant l’application gratuite Openbarres. Elle indique le DAS tête et le DAS tronc calculés par le fabricant pour votre appareil, et ceux éventuellement contrôlés par l’ANFR.

Santé, des effets incertains

A la différence des ondes « ionisantes » – rayons X utilisés en radiologie, ondes gamma radioactives, et aussi UV émis par le soleil, très dangereuses pour notre santé et dont il faut absolument se protéger, les ondes dites de radiofréquence émettent une énergie beaucoup moins élevée. Leur impact sur notre santé serait donc beaucoup plus faible. Cette question fait toutefois l’objet de multiples controverses opposant les scientifiques du monde entier. Depuis vingt ans, les milliers d’études ayant évalué l’impact des radiofréquences sur la santé n’ont identifié aucun effet à court terme. En revanche, il persiste des doutes sur leurs effets à long terme, notamment pour le téléphone portable, qui pourrait augmenter le risque de tumeurs cérébrales chez les utilisateurs intensifs.

A savoir. L’impact sur la fertilité est un autre sujet d’inquiétude, dans la mesure où nous portons souvent notre smartphone dans une poche de pantalon. Mais là encore aucun lien n’a été établi par une étude officielle.

Prudence pour les enfants

L’agence nationale de Sécurité sanitaire (Anses) a publié en 2016 un rapport d’expertise concernant l’exposition des enfants aux radiofréquences et ses effets potentiels sur leur santé. Dans ce texte, l’Agence souligne que les enfants peuvent être plus exposés que les adultes en raison de leurs spécificités morphologiques et anatomiques, et notamment de leur petite taille, ainsi que des caractéristiques de certains de leurs tissus. Tout en recommandant de limiter l’exposition des enfants aux sources d’ondes, notamment les téléphones portables, l’agence a émis des recommandations visant à adapter les valeurs limites réglementaires au jeune public.

A savoir. L’Anses a également pointé les risques psychosociaux lié à l’utilisation excessive des nouvelles technologies par les jeunes enfants, et préconise un usage modéré et encadré.

Et dans la maison ?

Des émissions multiples

Chez nous, de nombreux appareils émettent des ondes radio : tous les objets connectés (enceinte bluetooth…), les box internet, la télécommande de la télévision, le babyphone… Mais ils sont, eux, utilisés à une certaine distance du corps humain, ce qui rend possible, avec des sondes, la mesure de l’intensité du champ électrique émis, sans avoir à évaluer le DAS. Cette intensité électrique se chiffre en Volt par mètre. « La plaque à induction est l’équipement qui émet le plus de Volts par mètre dans la maison, mais d’autres sont également puissants, comme le four à micro-ondes, qui, pour cette raison, est isolé par des parois spécifiques, qui forment une cage de Faraday« , indique Gilles Brégant.

Les compteurs aussi

Sur le site de l’ANFR, vous pouvez mesurer les émissions dans chacune des pièces de la maison. Les valeurs estimées en moyenne des équipements sont comparées aux limites réglementaires. Par exemple, le champ électrique d’une plaque à induction est évalueé par l’agence à 30V/m, quand le seuil réglementaire est de 87V/m. « Nous avons mesuré les compteurs Linky. Ils suscitent beaucoup d’inquiétudes, mais c’est l’un des compteurs qui émet le moins d’ondes dans la maison, beaucoup moins que Gazpar, par exemple, ou encore ceux qui communiquent à distance les relevés de consommation d’eau », poursuit Gilles Brégant.

Un effet de cummul ?

Tous ces cocktails d’ondes ne finissent-ils pas par dépasser nos capacités d’absorption ? « Non, les ondes se déplacent en ondulant, comme les vagues. Mais elles ne sont pas synchronisées. C’est pourquoi elles ne s’additionnent pas. De plus, beaucoup d’appareils émettent des quantités d’ondes dérisoires, comme les écouteurs sans fil ou le Wi-Fi par exemple, et la réglementation prend en compte les expositions multiples » rassure Anne Perrin.

Faire mesurer les ondes chez soi

C’est un service gratuit ! Vous pouvez demander à l’ANFR d’envoyer un technicien mesurer les ondes à votre domicile. Pour cela, vous devez remplir le formulaire Cerfa n°15003*02, disponible sur service-public.fr, le faire contresigner par la mairie ou une association agréée de protection de l’environnement, avant de l’adresser à l’ANFR. Il est également possible de regarder les taux d’exposition aux ondes électromagnétiques autour de chez vous, sur le site Cartoradio de l’ANFR : il répertorie toutes les mesures déjà effectuées autour de chez vous, ainsi que l’emplacement des stations radioélectriques les plus puissantes – antennes relais de téléphonie mobile, TV, radio…

Qu’est-ce que l’électro-hypersensibilité (EHS) ?

La sensibilité accrue aux ondes se manifeste par des troubles dermatologiques (rougeurs, picotements, sensations de brûlure…), neurasthéniques (fatigue, difficultés de concentration…) et neurovégétatifs (vertiges, palpitations cardiaques …). Une expertise réalisée par l’Anses en 2018 observe « une absence de preuve expérimentale solide permettant d’établir un lien de causalité entre l’exposition aux champs électromagnétiques et les symptômes décrits par les personnes se déclarant EHS« . L’agence reconnaît toutefois que ces symptômes « correspondent à une réalité vécue, peuvent avoir un retentissement important sur leur qualité de vie et justifient une prise en charge médicale« . L’association P.R.I.A.R.T.EM (priartem.fr) milite pour la défense des personnes EHS.

L’avis de l’expert

Gilles Brégant, directeur général de l’Agence nationale des fréquences (ANFR).

« La 5G suscite des craintes car ce nouveau réseau va encore accroître notre exposition aux ondes. La 5G utilise le même réseau que la 4G, mais à travers une nouvelle fréquence, encore jamais utilisée pour un réseau mobile en France, la bande des 3,5GHz, ainsi que par une fréquence plus haute, de 26GHz. C’est une étape nécessaire pour éviter la saturation des réseaux, alors que de plus en plus de données circulent et que l’on veut développer l’échange d’informations sans fil, notamment en ville pour les véhicules connectés. La 5G est déjà utilisée en Suisse, aux Etats-Unis, en Corée, au Japon et même en Chine. La multiplication des antennes de courte portée, peu puissantes, a suscité dans certains pays des réactions, mais il n’y a pas eu pour l’instant d’études mettant en évidence des conséquences pour la santé.« 

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