Cicatrisation : quels progrès !

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Les chercheurs s’emploient activement à empêcher, atténuer voire effacer les traces d’une opération ou d’une plaie qui peine à se refermer. Et leurs efforts commencent à payer.

Aujourd’hui, les cicatrices chirurgicales sont de plus en plus discrètes, grâce aux techniques opératoires mini-invasives. Alors, c’est sur le front des plaies chroniques et des brûlures que la recherche est hyperactive. Un enjeu de santé publique quand deux millions de personnes en France souffrent d’escarres, d’ulcères veineux ou au pied (120 000 patients diabétiques admis aux urgences chaque année), qui n’en finissent pas malgré les soins prodigués.

Des pansements connectés qui surveillent les plaies

L’équipe d’ingénieurs de la start-up grenobloise Grapheal a mis au point un patch contenant une couche de graphène (un carbone très fin et flexible) qui s’intègre dans n’importe quel pansement. Le corps supporte parfaitement ce matériau et les cellules se régénèrent même plus vite à son contact. Un sacré avantage quand on veut accélérer la cicatrisation ! Mais ce n’est pas tout : en captant les fluctuations électriques, ce patch mesure en continu la nature du liquide en surface de la plaie, sa température, son taux d’acidité… Autant de précieux indices pour savoir si le processus se passe bien ou si une infection est en cours (le pH change). En passant un smartphone à proximité du pansement, le soignant lit ces infos sur une puce électronique et sait s’il faut changer le dispositif ou adapter les antibiotiques. « Cet outil pourrait améliorer le suivi des plaies chroniques qui durent des mois voire des années, favoriser le retour des patients à la maison et permettre de changer le pansement moins souvent tout en réduisant le risque d’infection et d’amputation », estime Vincent Bouchiat, ancien chercheur au CNRS cofondateur de Grapheal. Les essais cliniques viennent de commencer. « On cherche à démontrer que cette solution n’est pas un gadget et que son coût limité (moins de 10 euros l’unité) pourrait aider à réaliser des économies de santé », ajoute-t-il.

Des patchs électriques pour s’attaquer aux bactéries

Ce qui empêche de bien cicatriser, le plus souvent, c’est la présence d’un biofilm, une mince couche de micro-organismes − parmi lesquels des bactéries – qui vivent à la surface de certaines brûlures ou plaies postopératoires. Il causerait une bonne partie des infections et résiste souvent aux antibiotiques. Plusieurs universités américaines planchent sur un pansement à champ électrique. Des chercheurs de l’Ohio ont constaté (in vitro) que le courant électrique perturbait suffisamment le biofilm pour commencer à détruire ses bactéries. De quoi peut-être renforcer, voire remplacer dans certains cas, l’action des antibiotiques.

Une seconde peau en spray

D’autres labos travaillent sur un bandage à vaporiser. La société Nanomedic a par exemple développé SpinCare, une sorte de gros pistolet en plastique qui pulvérise un polymère transparent. Celui-ci s’adapte à la morphologie de la blessure. Le gros avantage ? On ne « touche » pas à la blessure, donc c’est moins douloureux. Et surtout, pas besoin de refaire le pansement : une fois installé, le polymère reste en place et forme une barrière protectrice le temps de la cicatrisation, puis « tombe » naturellement au bout de deux à trois semaines. Comme il est transparent, il permet aussi de surveiller l’évolution. SpinCare est déjà testé dans des hôpitaux en Israël (sur 120 patients, aucun cas d’infection n’a été rapporté) et en Allemagne.

Une peau sur mesure après une brûlure

Grâce à la bio-impression, on peut obtenir un nouveau tissu à la demande. Il « suffit » de prélever quelques cellules de peau saine sur un patient et de les diluer dans une encre gel. Une imprimante 3D délivre ensuite, en une quinzaine de minutes, différentes couches de gel qui forment une peau composée de l’hypoderme, du derme et de l’épiderme. Une fois appliquées sur une brûlure, les cellules se multiplient jour après jour pour entamer le processus de cicatrisation. Une révolution par rapport aux greffes de peau actuelles. « Celles-ci laissent des cicatrices car elles sont constituées seulement d’épiderme, peu souple et qui donne un aspect fripé et cassant. Avec l’utilisation de peau totale, d’après ce qu’on observe sur le modèle animal, on pourrait espérer n’avoir quasiment pas de cicatrices », s’enthousiasme Christophe Marquette, directeur de recherche au CNRS et fondateur de la plateforme 3D.Fab de l’université Lyon 1, qui développe ce projet avec la société LabSkin Creations. Surtout, cela limiterait drastiquement le risque d’infection : il faut aujourd’hui laisser pendant quarante jours la brûlure à découvert, très exposée aux bactéries, le temps de cultiver in vitro de la peau pour une greffe. Les tests sur les animaux (souris et cochons) se poursuivent avant, peut-être d’ici deux à trois ans, les premiers essais sur des patients.

Du plasma froid pour booster la cicatrisation

Toujours dans l’optique de mieux soigner les grands brûlés, on pourra sûrement compter sur le plasma froid. Ce gaz partiellement ionisé (il perd des électrons après application d’une décharge électrique) est omniprésent dans notre quotidien, des écrans de télé aux ampoules basse consommation. « En médecine, il faut imaginer une sorte de flamme (à température ambiante) qu’on applique à distance d’une plaie. Nous cherchons à voir s’il peut accélérer, grâce à son activité biologique, la cicatrisation des greffes de peau. Nos études in vitro et in vivo chez la souris montrent qu’il favorise notamment la production de nouveaux vaisseaux sanguins pour une meilleure vascularisation », explique Constance Duchesne, impliquée dans les projets PlasmaSkin et Placib, menés en partenariat avec l’Institut de recherche biomédicale des armées, l’Institut Pasteur et le Laboratoire de physique des plasmas de Polytechnique*. Au passage, le plasma a aussi l’avantage d’être antibactérien, ce qui minimise le risque d’infection. Objectif : développer d’ici cinq ans un outil utilisable à l’hôpital pour traiter les brûlures étendues. En Allemagne, plusieurs procédés ayant recours au plasma ont obtenu la certification CE pour le traitement des ulcères veineux et diabétiques. La société Coldplasmatech l’a même inséré dans un grand patch en silicone applicable directement sur la plaie. Autant dire que le contenu de notre trousse à pharmacie risque de faire peau neuve dans les années à venir !

Vive les tests de marque!

Les cicatrices chéloïdes (en relief) sont le cauchemar des chirurgiens et des dermatologues. Parfois la peau produit trop de collagène qui crée une zone épaisse et boursouflée. Si on sait que peaux noires, notamment, y sont plus sujettes, difficile de prédire cette complication. C’est l’objectif du test « Bilhi Skin Keloid », conçu par le Pr Alain Dessein, biologiste à l’Institut Pasteur. Il évalue notre prédisposition génétique à développer une cicatrice chéloïde grâce à un petit échantillon de salive. Si les résultats sont positifs (sous sept jours), le praticien peut adapter les soins postopératoires pour limiter les risques. Mais il faut compter 200 euros le test, non pris en charge par la Sécurité sociale.

* Soutenus et financés par la SATT-Paris-Saclay, l’Agence de l’innovation de défense, l’École polytechnique et la Fondation de l’École polytechnique.

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