Au coeur de Belleville, le Babel Hôtel invite au voyage

Même après deux ans de pandémie, Paris continue de fourmiller de nouveaux hôtels désireux de renouveler le vocabulaire de cet univers un brin guindé. Parmi ces nouvelles adresses aux valeurs aiguisées, le Babel Hôtel tire son épingle du jeu avec son esprit « comme à la maison ». Le lieu invite à déposer ses valises de touriste et son temps-libre de parisien dans le quartier populaire de Belleville. Sur ce pavé de l’Est de la capitale se côtoient encore ateliers d’artistes et bars de nuit, boucheries halal et synagogues. Babel prône fièrement les valeurs d’ouverture de son point d’ancrage. Et cette générosité sensible a le mérite d’être précisée. Elle s’exprime aussi bien de l’assiette à la décoration des lieux, en passant par une politique d’embauche menée en partenariat avec des associations locales. Inspiré du bout du monde et de la rue d’à côté, Babel s’apparente à un voyage immobile qui saura séduire les parisiens en mal de voyage et les voyageurs en mal d’originalité dans un Paris qui flirte parfois trop avec les clichés.

Babel, un hôtel généreux et chaleureux

A la tête de ce projet : un hôtelier chevronné et désireux de renouveler son domaine Joris Bruneel (co-fondateur du groupe MyHotels) et la jeune cheffe franco-afghane Claire Feral-Akram. Ensemble, ils ont imaginé ce cadre de vie nourrit aux bons produits et aux bonnes ondes « comme un sanctuaire qui ait du sens et donne la force de croire au vivre-ensemble ». Dans une rue calme et piétonne, ce sanctuaire moderne est ouvert à tous pour un café comme pour une nuit ou plus. L’accueil est tout sourire et l’ambiance feutrée, forcément rassurante quand on chérit les lieux avec supplément d’âme.

Loin des standards de la déco du moment, le Babel cultive sa différence avec aisance grâce à l’oeil intransigeant et curieux de Daphné Desjeux. En charge de cet ambitieux projet, l’architecte d’intérieur a excellé dans l’art de ne pas plaire à tout le monde, une spécialité qui lui tient à coeur. Ici rien de réellement tendance en perspective, mais de l’amour à foison pour les meubles et objets chinés avec attention, un soin particulier porté au caractère des matériaux (ré)employés, des tissus, des luminaires exquis…

« Metteuse en scène » de ce voyage immobile, Daphné Desjeux a eu à coeur de « ne rien faire de clinquant » et de « privilégier les imperfections ». Pendant plusieurs mois, elle a chiné des pièces au rythme de ses coups de coeur. Des perles rares exposés dès le rez-de-chaussée des lieux comme ce beau meuble qui fait office de comptoir d’accueil ou cette grande tenture blanche qui surplombe l’immense banquette dans la partie haute du restaurant sous une verrière. En offrant une seconde vie à ces pièces coups de coeur, la décoratrice suggère un cadre aux multiples vies et cultures, un écho stylistique au quartier de Belleville.

Des chambres inspirées par l’univers du voyage

Cette impression gagne également les étages. Pour les atteindre, on emprunte un ascenseur-oeuvre. Les étages y défilent tout au long d’une impressionnante Tour de Babel dessinée à l’encre de chine par l’artiste Juliette Seban. Arrivé à bon port, le visiteur découvre des couloirs feutrés où une moquette aux inspirations berbères assure le décor. L’hôtel propose 31 chambres. Petites parfois comme le veut ce quartier parisien aux immeubles exigus, elles ont fait de leurs timides dimensions un point fort pour renforcer cette sensation de refuge.

Sérénité et chaleur sont les douces promesses de ces chambres. Leur aménagement est exemplaire, leur décoration riche en détails. Leur petite taille pour certaines d’entre elles a conduit Daphné Desjeux a imaginé un coin salle de bains intégré à l’espace nuit. Pour réussir à gagner de l’espace avec style, elle s’est inspirée du célèbre Orient-Express et de ses cabines au style impeccable. Meuble vasque et petite penderie ouverte en métal façonnent cette esthétique refuge, renforcée par une grande tête de lit cosy arborant touche de laiton et un tramage typique des tisserands de l’Afrique du noir. Sur les tables de nuit, fibres naturelles et céramique s’imposent sur des lampes irrésistibles. Outre un soin apporté aux choix des matériaux, la décoratrice s’est particulièrement plu à jouer avec une palette de nuances fanées, « aux doux airs de souvenir » précise t-elle. Un effet patiné, surprenant au premier abord, puis séduisant pour sa capacité à faire surgir un décor lointain dans le temps ou dans l’espace. C’est Rosatelier qui a réalisé toutes ses précieuses patines et tissé entre les espaces nuits et le rez-de-chaussée cette sensation enveloppante et rassurante. Dans cette fabrication d’un décor tour à tour voyageur et familier, la décoration murale brille par son accrochage représentant les souvenirs d’un peuple « babelien ».

Dans ses moindres détails, l’élaboration du décor orchestrée par Daphné Desjeux veille à témoigner des kilomètres parcourus, des paysages aperçus, des sensations récoltées par les êtres et cultures croisées. Entre détails raffinés et accueil décontracté, le Babel réussit son pari dans un Paris où la mixité est reine.

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Babel Hôtel

3 Rue Lemon

75020 Paris

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