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- Aujourd’hui, « À la lisière des vagues » de Béatrice Hammer paru le 17 février 2023 aux Éditions Avallon & Combe.
Marceline Bodier, bookstagrameuse et contributrice du groupe de lecture 20 Minutes Books, vous recommande « À la lisière des vagues » de Béatrice Hammer, paru le 17 février 2023 aux Éditions Avallon & Combe.
Sa citation préférée :
Elle se retient de rire. C’est là, c’est aujourd’hui qu’on croit qu’elle s’est noyée, alors qu’elle a passé sa vie d’adulte à sombrer sans qu’on la secoure.
Pourquoi ce livre ?
- Parce que c’est un livre sur la place du désir de l’autre dans la vie des femmes. Le désir de Franck a façonné la vie de Mona. Mais à la cinquantaine, il la quitte : et ça, Mona ne l’avait pas vu venir. Ça vous paraît banal ? Non, car le livre nous mène à la lisière de plusieurs vagues : celles de l’océan où Mona part faire le point, celle de cette déflagration qui pourrait emporter sa vie dont le sens l’a quittée… et pourquoi pas celle de l’adjectif « vague », synonyme du flou dans lequel le brouillard maintenait sa vie ? Le départ de Franck l’a dissipé : de quoi est-ce la nouvelle lisière ?
- Parce que le texte est très dense et très court, mais il est tapissé de miroirs dans lesquels on voit se refléter la deuxième partie de Belle du Seigneur, celle du désastre. Certes, l’extrême incandescence de la passion de la Belle et de son Seigneur avait fait chuter le couple d’Ariane et Solal de bien plus haut que celui de Mona et Franck, mais c’est tout de même toujours sur le même sol que se fracassent les rêves des couples : celui du quotidien. Eh oui, « Franck n’avait pas prévu le quotidien ». Comme chez Albert Cohen, Mona a la tentation d’en finir. Mais n’y a-t-il pas mieux à faire ?
- Parce que oui, il y a mieux à faire ! C’est un roman sur la liberté, qui dépasse brillamment la contradiction entre le désir de faire ce qu’on veut quand on le veut et la servitude volontaire que cette intention masque trop souvent. Mona a vécu en étant « certaine d’accomplir une mission » : que faire si ce n’était qu’une illusion ? Si personne, ni son mari, ni ses enfants, ne lui a jamais demandé de se perdre de vue pour eux ? Eh bien, pour commencer… pourquoi exclure d’emblée la possibilité d’assumer enfin ce qu’on avait subi quand on était dans le brouillard du quotidien ?
- Parce que le livre commence comme un récit qui n’est pas autobiographique, mais pourrait l’être et dans lequel beaucoup de femmes se reconnaîtront. Puis, au moment où le personnage se met à suivre sa liberté de s’en remettre au hasard, l’autrice, elle, explore la liberté de rêver : le livre devient un conte où Violaine, jeune fille aussi onirique que dans la pièce de Claudel qui porte son nom, permet à Mona de se confier et d’entendre son histoire. Cela fonctionne comme un miroir où se reflète son passé, qu’elle peut enfin regarder, reconnaître comme sien et envisager aussi comme avenir.
- Parce que c’est un roman sur les quinquagénaires qui prend le contrepied du #quinquapower. Le #quinquapower, c’est quand on refuse l’échec, qu’on « se révolte », qu’on « refuse la nature humaine ». Mais on sait bien que refuser cet échec-là est tout aussi voué à l’échec… alors « quand le monde n’est pas tel qu’on le voudrait, il faut le vouloir tel qu’il est ». On dirait du Descartes (« il faut changer ses désirs plutôt que l’ordre du monde »), mais dans une version enfin charnelle et incarnée : #quinquapower ou #sagesseduphilosophe, lisez À la lisière des vagues pour choisir votre camp !
L’essentiel en 2 minutes
L’intrigue. Franck vient de quitter Mona, et Mona ne l’avait pas vu venir. Est-ce un « effondrement [qui] marquait la fin de tout », ou seulement celle « d’une illusion » ? Voilà Mona à la lisière des vagues… mais sont-elles devant, ou derrière elle ?
Les personnages. Comme tout bon personnage, Mona a surpris sa propre autrice, qui ne s’attendait pas à la fin de son histoire. Voilà qui devrait vous captiver, puisque Franck et Mona, c’est vous et moi ! Violaine, c’est encore vous et moi ! Et même plus : c’est vous et moi, mais après dissipation du brouillard.
Les lieux. Mona quitte la ville pour partir littéralement à la lisière des vagues d’une mer où elle arrive au hasard du premier train. Mais le vrai lieu du roman n’est-il pas la valise noire préparée pour les autres et qu’elle n’a finalement sortie que pour elle, « tout près du vide de celle de Franck » ?
L’époque. L’époque n’a aucune importance dans les contes, puisqu’ils ont une portée universelle. Je vous le prédis : dans un siècle, nos descendants reliront l’histoire de Franck et de Mona et ils pourront redire avec elle, « Pas besoin d’être folle pour être libre ».
L’auteur. « C’est quand on manque qu’on veut créer », fait dire Béatrice Hammer à ses personnages. Et moi, c’est pour ce genre de phrase que je lis systématiquement tous ses romans. De toute façon, comment faire autrement quand une autrice offre des possibilités d’identification aussi évidentes ?
Ce livre a été lu avec l’envie d’y croire, moi aussi : « Tout aurait été terminé, alors qu’elle y croyait toujours, à ce je-ne-sais-quoi qu’elle aimerait créer, qu’elle voudrait contempler, peut-être pour le jeter, peut-être pour l’admirer, ce fragment délicat qui n’était pas encore venu, malgré l’âge qu’elle avait. »
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