En 1977, alors que Jacques Chirac a quitté Matignon et son poste de Premier ministre de Valéry Giscard d’Estaing pour fonder le RPR et entrer en concurrence avec le président en place, le clan chiraquien a orchestré une terrible rumeur pour affaiblir le locataire de l’Elysée, comme le rapporte Georges Valance dans son ouvrage, VGE Une vie.
Entre Valery Giscard d’Estaing et Jacques Chirac, ça a été une longue, une très longue relation, et très complexe. Deux grands homes politiques aux mêmes ambitions, véritables bêtes de campagnes, avec un penchant commun pour la gent féminine pour laquelle ils étaient tous les deux insatiables. Une véritable concurrence entre les deux qui ont chacun, à leur époque, atteint la fonction suprême, Giscard entre 1974 et 1981, et Chirac entre 1995 et 2007.
Malgré le « respect » plus ou moins affiché l’un pour l’autre aux yeux du grand public (Chirac fut le Premier ministre de Giscard au début de son septennat), les deux se sont livrés tout au long de leurs vies à une véritable relation d’amour vache, et les exemples ne manquent pas, jusqu’aux obsèques de Jacques Chirac durant lesquelles VGE s’est permis une petite sortie dont il a le secret. Si bien que leur histoire commune de près de cinquante ans révèle bien des secrets ; des secrets levés en partie par Georges Valance, dans son ouvrage intitulé VGE Une vie, publié en 2011 aux éditions Flammarion.
L’histoire prend place au milieu des années 70. Après le rituel message télévisé des bons voeux du président diffusés le 31 décembre 1976 – durant lequel Giscard fait preuve de peu de psychologie en s’épongeant sur les angoisses du peuple français et les derniers mois difficiles, plutôt que de tenir un discours énergique, motivant et positif -, la cote de VGE est au plus bas et ses « ennemis » vont en profiter. Il faut dire que le locataire de l’Elysée est dans une situation des plus tendues à ce moment : son bilan est catastrophique, et son ancien Premier ministre… Jacques Chirac, s’est émancipé en créant une nouvelle formation politique, le RPR, avec comme ambition non dissimulée de succéder à VGE. Les mois suivants, les municipalités – lors des élections locales – créent encore des dissensions au sein de la majorité qui finit par s’écharper, et même Giscard est alors pris à partie via des publications qui l’associent par exemple au régime de Vichy, dont notamment La Lettre de la Nation, feuille politique… du RPR. Le tout, pour donner bien sûr une image de faiblesse au président en place et convaincre les Français de ne pas revoter pour lui en 1981. C’est alors, comme le confie l’auteur dans son livre, qu’une terrible rumeur est lancée concernant le chef d’Etat : « Giscard est en psychanalyse », sous-entendu : est-ce que la France est prête à laisser les codes de la puissance nucléaire à un homme fragile mentalement et qui se cherche ?
En politique plus qu’ailleurs, tous les coups sont permis, et cette rumeur aurait été, selon l’auteur, orchestrée par le clan Chirac pour affaiblir son principal concurrent à droite. C’est ainsi, que dès février 1977, le magazine Le Point se targue d’un article dénonçant : « Le président de la République a été ulcéré de voir La Lettre de la Nation invoquer la ‘psychanalyse’ pour expliquer certains propos de sa dernière émission télévisée. VGE y voit le signe d’une campagne injurieuse développée contre lui au sein du RPR. » Mais le mal est fait et c’est un véritable déferlement auquel doit faire alors face le chef d’Etat : de Pierre Charpy (le responsable de La Lettre) en passant par Michel Debré ou encore Yves Guéna, délégué politique du RPR, qui va jusqu’à demander un retrait définitif du président en place.
Une terrible rumeur, fausse bien sûr, mais qui donnera une image de faiblesse à VGE et qui aura sans doute contribué à sa perte de l’élection présidentielle de 1981, au profit de François Mitterrand… et non de Chirac, qui devra encore patienter quatorze ans avant de s’installer enfin à l’Elysée. Le karma.
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