Pour le meilleur ou pour le pire, le milliardaire australien, qui fête ses 91 ans ce 11 mars, a radicalement changé le paysage médiatique et politique en Europe et aux Etats-Unis au cours de ces dernières décennies. Récit.
L’histoire commence dans la ville de Melbourne sur le continent australien où naît Rupert Murdoch, fils d’un journaliste de guerre et magnat de presse régionale, le 11 mars 1931. Après de brillantes études à Oxford en Angleterre, le jeune homme rentre au pays afin de revendre la plupart des journaux hérités à la mort de son père pour n’en garder qu’un seul. Sa stratégie est simple: faire du scandale et du sexe son fonds de commerce. Par amour pour l’accroche provocatrice, il va jusqu’à écrire lui-même ses titres de couverture. Sans hésiter, bien sûr, à verser dans le racoleur.
La réussite est totale. «The News» devient un tel succès que Rupert Murdoch est rapidement en position d’acquérir un autre journal, puis un autre… En très peu de temps, l’homme d’affaire étend ce qui est devenu un véritable empire, au-delà des frontières de l’Australie. Il met d’abord le cap sur la Nouvelle-Zélande puis débarque au Royaume-Uni et enfin aux USA. La machine Murdoch est en marche.
Rupert Murdoch, « le faiseur de présidents »
En achetant des tabloïds qui visent un lectorat populaire, Rupert Murdoch acquiert une immense influence dans chaque pays où il s’installe, et il prend ainsi le contrôle de l’opinion publique. En un rien de temps, il peut faire ou défaire la carrière d’une actrice ou d’un politicien. Pas du genre à bouder ni son plaisir, ni son pouvoir, il héritera du surnom « faiseur de présidents ».
Propriétaire du Times, Sunday Times, The Sun et News of the World en Angleterre, l’Australien est un fervent supporteur de la politique conservatrice de Margaret Thatcher durant les années 1980. Pourtant, à la surprise générale, Murdoch soutient le travailliste Tony Blair en le faisant élire au pouvoir en 1997. Mais, seulement après que ce dernier ait revu son programme pour le rendre plus « centriste »… La gauche comme la droite, rares sont ceux qui savent lui résister.
« Murdoch représente un réel danger pour les démocraties libérales, souligne l’acteur britannique, Hugh Grant, dans un documentaire réalisé par la « BBC » au sujet du magnat de presse. Les tabloïds ont commencé à écrire sur moi lorsque j’ai rencontré un certain succès après la sortie de « Quatre Mariages et Un Enterrement » en 1994. Je savais que mon aventure avec Divine Brown allait m’attirer des ennuis mais je ne pouvais plus me déplacer sans qu’un paparazzo sorte de nulle part. Je me demandais comment ils savaient constamment où j’allais être. Ma vie est devenue insupportable et l’est restée pendant dix ou quinze ans».
Au cours des dernières années, les journaux de Murdoch ont vivement encouragé le Brexit et aux Etats-Unis, le milliardaire est reconnu comme largement responsable pour l’élection du président Donald Trump. Notamment grâce à sa chaîne de télévision, Fox News et sa joyeuse bande de présentateurs aux voix stridentes qui déchirent l’Amérique.
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Family Business
En amour, comme en affaires, Rupert Murdoch est sans cesse à la recherche d’une nouvelle opportunité. Marié à quatre reprises, l’homme d’affaires est père de six enfants au total, issus de ses différentes unions. A savoir Prudence, Elizabeth, Lachlan, James et enfin Grace et Chloe. Les quatre ainés travaillent, ou ont travaillé, au sein de l’empire familiale, tandis que ses deux dernières filles sont encore à l’université aux Etats-Unis. Depuis 2016, Rupert Murdoch file le parfait amour avec la Texane Jerry Hall, l’ex-compagne de Mick Jagger et mère du mannequin, Georgia May Jagger.
Si ses enfants semblent prédestinés à suivre dans ses pas et se fraient bravement un chemin – patronyme reconnu à l’appui – dans le monde des médias, il y a toutefois une ombre au tableau: la rivalité. Quand beaucoup d’argent est en jeu, jalousie, envie et autre cupidité ne sont jamais bien loin. La famille Murdoch ne fait pas exception. De quoi inspirer d’ailleurs, la série HBO « Succession».
Alors que ses frères et soeurs occupent des postes à responsabilités dans diverses branches de la corporation, James Murdoch se détache de peu à peu du clan. Lors d’une interview accordée au journal «The New Yorker» il révèle que sa relation avec son père est au point mort depuis quelque temps. « Il y a beaucoup de périodes durant lesquelles nous ne nous adressons pas la parole», souligne-t-il, le regard noir. James démissionne lorsque son grand frère Lachlan est nommé Directeur Général de Fox Corporation. Une couleuvre de trop à avaler peut-être, pour celui qui avait porté la responsabilité de l’affaire des écoutes en 2009 ?
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« News of the world » : la chronique de la honte
En Juillet 2009, « The Guardian » publie une enquête approfondie réalisée par le journaliste Nick Davies sur les méthodes « d’investigation », ou plutôt d’espionnage, illégales pratiquées au quotidien par les reporters du magazine « News of the World ». Le journal britannique révèle ainsi que les rédacteurs-en-chefs, dont Piers Morgan, autorisent, entre autres, le piratage des répondeurs téléphoniques des stars, des membres de la royauté et même ceux de familles de victimes de meurtre ou d’attentats, afin d’obtenir des scoops. Les reporters font également appel régulièrement à des détectives privés et les backchichs distribués à tour de bras sont remboursés en notes de frais.
Malgré les révélations choquantes dévoilées par « The Guardian », le scandale passe initialement inaperçu. Après tout, le système judiciaire anglais est réticent à s’affronter à l’un des hommes les plus puissants de la planète, et les juges craignent les représailles. Il faudra donc attendre la création d’une étonnante alliance entre stars, journalistes et autres figures publiques dont Max Mosely, ancien patron de la Formule 1 – tous victimes du tabloïd – pour que l’affaire prenne de l’ampleur et soit entendue par un tribunal. Soudain, l’opinion publique est outrée et réclame sa vengeance.
Après des mois d’investigation policière, un procès hautement médiatisée, maintes démissions et évidement une flopée de condamnations, « News of the World» s’arrête au mois de juillet 2011, après 168 années d’existence. James Murdoch vice-président de News Corporation, annonce la nouvelle avant d’être rapatrié aux Etats-Unis mais sa réputation a pris un sacré coup…Son père, Rupert Murdoch, avait pris le parti de jouer les vieillards séniles devant le tribunal. Une stratégie de défense parfaitement absurde pour l’homme qui, dix ans plus tard, dirige toujours près d’une centaines de médias à travers le monde.
L’histoire de Rupert Murdoch est celle d’une réussite sans équivoque. C’est le parcours d’un homme prêt à tout pour contrôler la narration de son époque. A condition bien sûr de ne pas avoir à subir, ni à payer pour les conséquences de ses actions… Alors que le magnat de presse célèbre son 91ème anniversaire, la question se pose: qui va hériter de son empire?
Crédits photos : Getty Images
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