Anh Bonaparte ou la quête d’identité. La fille adoptive du prince Charles Bonaparte et de sa seconde épouse Jeanne-Françoise Valliccioni a toujours cherché où était sa place à l’ombre de son illustre clan. Portrait d’une princesse des temps modernes, déterminée à faire entendre sa voix.
Elle arrive au loin, tête baissée mais le pas assuré, un timide sourire au coin des lèvres. Ne surtout pas se fier à ces photos hyper glamour exhibées sur son compte Instagram. En réalité, Anh Bonaparte est une jolie brunette de 24 ans au charme discret. Après avoir hésité pour la force d’un café, elle se ravise, et opte pour la douceur d’un chocolat chaud. Avec pudeur, Anh Bonaparte a accepté de se confier sur ce parcours si singulier qui est le sien. Sur les réseaux sociaux, son titre de princesse est clairement mis en évidence. Après avoir longtemps souffert de brimades dans la cour de récréation, ses camarades lui jetant au visage qu’elle n’avait ni château, ni couronne, la jeune femme tente désormais d’assumer pleinement son identité. Mais si les critiques ont cessé, les interrogations demeurent : « en tant qu’enfant adoptée, beaucoup de questions se posent. Il faut toujours se justifier, et expliquer pourquoi je suis asiatique« .
Née au Vietnam en 1998, Anh a été adoptée par le prince Charles Bonaparte et sa deuxième épouse Jeanne-Françoise Valliccioni. Le couple, qui a déjà une petite fille prénommée Sophie, n’a jamais vu la fillette en photo. Mais son histoire les touche en plein coeur. Dans un orphelinat, ils ont rencontré soeur Marie-Vincent qui leur a confié qu’une fillette peinait à trouver une famille… A un an passé, elle est déjà jugée trop vieille pour être adoptée… Jeanne-Françoise Valliccioni n’en dort pas de la nuit. Le lendemain, sa décision est prise, Anh fera partie de la famille. L’histoire fait la Une de la presse vietnamienne. Pour Charles et Jeanne-Françoise commencent six mois d’interminable attente avant qu’ils puissent rencontrer enfin la petite fille et la serrer dans leurs bras. S’ensuivront trois ans et demi pour qu’elle quitte l’orphelinat à leurs côtés en direction de la France. Jamais le couple n’a baissé les bras.
« La peur terrible d’être abandonnée m’avait enfin quittée »
Au cours de son enfance, Anh sait bien qu’elle est différente, mais ne demande rien. « Ma seule famille, c’était ma famille adoptive. Je ne voulais pas entendre parler du Vietnam. J’ai toujours su mon histoire, mais je n’étais pas prête », se remémore-t-elle. A 15 ans, elle a un déclic en cours de SVT et cherche à savoir d’où elle vient. Sa mère lui raconte alors les détails de son adoption. Avec ses parents, elle décide de se rendre au Vietnam dans l’orphelinat où elle a passé ses premières années. « Après ce voyage, je n’ai plus jamais parlé de mon adoption. La peur terrible d’être abandonnée m’avait enfin quittée, » confesse-t-elle, soulagée. A-t-elle la volonté de franchir une nouvelle étape et de rencontrer sa mère biologique ? « On ne peut pas naître sous X au Vietnam. Cela me laisse une porte ouverte. J’ai son nom, mais je ne ressens pas le besoin de la rencontrer », avoue-t-elle pour l’instant.
Plus sereine, la jeune femme de 24 ans tente aujourd’hui de tracer sa voie, de trouver sa place. Difficile avec ce prestigieux patronyme. « Pour fuir des personnalités malsaines, » Anh Bonaparte décide de prendre le large et de s’envoler pour l’Australie. Elle y apprend l’anglais et gagne sa vive en enchaînant les petits boulots : femme de ménage, job dans l’immobilier ou encore serveuse. Elle passe ensuite par la Belgique pour étudier le cinéma et gagne sa vie dans la restauration. « Je travaille depuis que j’ai 16 ans », affirme celle qui se défend d’avoir eu une enfance privilégiée. « Je ne suis princesse de rien, je n’ai pas de royaume, contrairement à ma demi-soeur et mon demi-frère », ironise-t-elle en évoquant les deux enfants issus du premier mariage de son père, Caroline et Jean-Christophe, « je n’ai jamais grandi avec leur pression. On m’a toujours donné le choix ». Si Caroline a préféré rester loin de toute vie mondaine, et vivre dans la discrétion, portant d’ailleurs le nom de son mari pour éviter toutes questions intrusives, pour Jean-Christophe Napoléon, désigné par son grand-père comme l’héritier du trône impérial, le destin est différent.
« Jean-Christophe a plus de facilités. Il n’a jamais eu besoin d’un prêt étudiant comme moi ! Entre Jean-Christophe et Caroline d’un côté (les enfants nés du premier mariage de Charles Bonaparte, ndlr), et Sophie et moi de l’autre, c’est un peu deux poids, deux mesures. Ma sœur Sophie a le même sentiment que moi, » regrette avec sincérité la jeune femme. Son frère, Anh Bonaparte ne l’a pas vu depuis une dizaine d’années. Un homme d’affaires « très occupé », qui partage sa vie entre Londres, Paris et New York. « Nous évoluons dans deux mondes très différents, je n’ai pas grandi dans l’aristocratie », souligne Anh Bonaparte avant de préciser, « pour ma grand-mère paternelle, tout revient à mon frère. Le second mariage de mon père n’a pas été très bien vu… « Entre le frère et la sœur, les relations sont distantes, à son grand regret. « J’aurais aimé que l’on soit plus proches » souffle la jeune femme en baissant les yeux.
« Je veux casser cette image cliché de princesse riche et privilégiée »
Anh Bonaparte n’a pu être présente au mariage de son frère en la cathédrale Saint-Louis des Invalides avec la comtesse Olympia Von Arco-Zinneberg en mars 2019, et n’a même jamais rencontré son épouse. Au centenaire de Napoléon en mai 2021, la jeune femme attendait un carton d’invitation pour se rendre à l’événement… en vain. Elle rêve pourtant d’être invitée à plus d’engagements. Sa tribune à elle, elle la trouve sur les réseaux sociaux. Elle y parle librement et sans tabou. « Je veux casser cette image cliché de princesse riche et privilégiée », lance-t-elle avec détermination. La photographie est également pour elle un passe-temps libérateur, « une forme de thérapie, pour s’accepter et se libérer de la pression ».
Et pourquoi ne pas surfer sur la notoriété de son nom pour défendre des causes qui lui sont chères ? « J’aimerais utiliser mon nom pour défendre les causes LGBT+, ou encore le droit des femmes ». Ses parents, séparés mais pas divorcés, ont confiance en elle et la soutiennent dans ses projets. Elle affirme n’avoir aucun interdit. « Je me mets toute seule la pression » concède-t-elle, « tout simplement parce que je n’ai aucune envie de me brouiller avec ma famille, et que je respecte mon nom ». Ce nom qu’elle assume et qui fait aujourd’hui partie intégrante de son identité. Si elle se marie, elle l’affirme, elle gardera son nom.
Crédits photos : Collection personnelle Anh Bonaparte
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