Laurent Mariotte sillonne la France à la rencontre des producteurs locaux et se bat pour une cuisine de saison. Sa passion met l’eau à la bouche…
Closer D’où vient cette passion pour la cuisine ?
Laurent Mariotte Je suis fils et petit-fils de paysan. J’ai grandi dans les Vosges et j’ai beaucoup observé ma grand-mère cuisiner des plats rustiques. Mon grand-père m’emmenait tuer les canards, les lapins et les poulets qu’ils élevaient toute l’année. J’ai repris leur ferme avec toujours le même potager et c’est là-bas que je me ressource.
A 35 ans, vous avez passé un CAP de cuisine au sein de la prestigieuse école Ferrandi. C’est très courageux !
Je commençais à tourner en rond à lire des prompteurs, alors j’ai décidé de changer de vie. J’avais derrière la tête une envie d’ouvrir un restaurant avec des copains. Mais la télé (sur TF1 dans Petits Plats en équilibre, et sur Europe 1 avec La Table des bons vivants, ndlr) m’a rattrapé et j’ai pu concilier mes deux passions ! Un jour, peut-être, j’ouvrirai un restaurant, avec une carte très courte autour des produits locaux et de saison.
"Le vegan a l’intérêt d’alerter sur le bien-être animal"
Est-ce difficile d’être légitime dans le milieu de la cuisine ?
Ce n’est pas parce que je suis fils de paysan que je suis expert en cuisine ! Mais comme les cuisiniers sont de gros bosseurs, ils apprécient de voir que j’ai suivi une formation.
Que pensez-vous du bio et de la nouvelle vague du vegan ?
Je ne suis pas intégriste du bio mais, lorsque l’on peut en manger, c’est mieux. Le vegan a un intérêt, celui d’alerter les gens sur le bien-être animal. Il faut sortir de l’élevage intensif, arrêter de manger des cochons qui n’ont jamais vu le jour et des poulets de batterie bourrés d’antibiotiques. Mais quand le mouvement vegan insulte des bouchers, ça va beaucoup trop loin ! Je n’aime pas l’extrémisme de certains. Il faut manger de tout et introduire plus de végétal dans nos recettes. Je n’ai pas envie de me faire engueuler parce que j’aime les rognons ou la tête de veau !
Avez-vous changé votre façon de consommer ?
Oui, je suis flexitarien. Je mange moins de viande qu’avant et je fais très attention à sa provenance. Par exemple, je n’achèterai jamais de cordon-bleu, même chez le boucher…
Même chez le boucher, les cordons-bleus sont industriels ?
S’ils sont tous formatés, même gabarit, même calibre, c’est probablement de l’industriel. Désolé de casser un mythe ! (Rires.)
Aimez-vous Top Chef?
Oui, ces émissions ont remis en lumière un métier qui, autrefois, était moyennement bien vu. Il y a vingt ans, quand un enfant ne travaillait pas bien à l’école, on lui disait : "Tu vas devenir cuisinier." Aujourd’hui, ce sont des stars ! Les techniques de Top Chef sont celles des cuisines de restaurants étoilés. Cette émission fait rêver. Mais attention, parfois, les techniques sont si pointues et sophistiquées qu’elles peuvent décourager. Par exemple, il faudrait peut-être un peu plus de pédagogie sur les produits. Je suis très à cheval sur la saisonnalité, la biodiversité et le local ! Nous habitons un pays tellement riche en variétés. Que ce soient les fromages, les légumes ou encore les races à viande.
"Il faut être fou pour acheter en plein hiver des cerises du Chili dans des containers bourrés d’eau de javel !"
Auriez-vous pu participer à Top Chef ?
Je ne suis pas un chef. Je fais de la cuisine de tous les jours. Je ne suis pas un professionnel du dressage et je n’ai pas la patience de passer une heure sur une assiette avec la pince à épiler. Parfois, la cuisine est un peu trop élitiste et je m’attache à la rendre facile et accessible. Allons à la simplicité et arrêtons le snobisme !
Qu’avez-vous envie de dire à une personne qui achète des framboises en décembre ?
Qu’elle doit considérer les saisons comme des rendez-vous. C’est terriblement cher de faire venir des produits qui poussent à l’autre bout de la planète, alors qu’il y en a chez nous certaines périodes de l’année. Il faut être fou pour acheter en plein hiver des cerises du Chili dans des containers bourrés d’eau de javel leur permettant de supporter le transport !
Difficile de garder la ligne ?
Etre un bon vivant n’est pas forcément synonyme d’être gros mangeur. J’aime manger des bons plats, mais je ne suis jamais dans l’excès. Je sais m’arrêter. Dans certaines régions, les assiettes sont trop généreuses. Il faut manger moins vite et prendre le temps. La satiété arrive au bout de vingt minutes…
Et le bon vin ?
J’adore le vin, mais avec modération. En janvier dernier, j’ai fait le mois sans alcool. Ce fut difficile, voire très chiant ! (Rires.)
Avouez-le… Rien de mieux qu’un bon McDo de temps en temps ?
Vous ne me ferez jamais dire que j’aime le McDo ! Je déteste le goût que ça laisse dans la bouche et cette sensation de gras me dégoûte. Je préfère un vrai burger maison dans un bistrot ! Mon fils y va de temps en temps et je ne peux pas le lui interdire. C’est une histoire de génération.
La cuisine est-elle un outil de séduction ?
Evidemment ! Cuisiner pour les autres est un acte altruiste. La cuisine nourricière est le premier geste d’amour de la mère.
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