Dans son autobiographie, le comédien de Friends évoque la descente aux enfers due à l’alcool et aux médicaments, sa love story avec Julia Roberts, son incapacité à s’engager… Un récit sans fard, empreint d’un humour irrésistible.
« Comment va Matthew Perry ? » Cette interrogation Lisa Kudrow, alias Phoebe, la partenaire du comédien dans la série Friends l’a entendue mille fois. « J’ai toujours été irritée quand cette question m’était posée par la presse, assure-t-elle, parce que je ne pouvais pas vraiment dire ce que je voulais, à savoir : “C’est son histoire, et elle lui appartient, je n’ai aucun droit de la raconter.” Préfacé par la comédienne, le livre de Matthew Perry, 53 ans, lève le voile sur l’envers du décor. Extraits de son autobiographie choc.
“BOIRE ET ME DROGUER”
« Eh oui, l’enfer existe. Ne laissez personne vous dire le contraire. J’y suis allé, il existe, fin de la discussion. […] À l’époque, je séjournais dans une maison de sobriété de Californie du Sud. Jusque-là, rien d’étonnant – j’ai passé la moitié de ma vie dans un centre de désintox ou un autre. Ce qui n’est pas très grave quand on a 24 ans mais un peu plus quand on en a 42. Moi, j’en avais 49 et je luttais toujours pour laisser ce démon derrière moi. A ce stade, j’en savais plus sur la toxicomanie et l’alcoolisme que tous les coachs et les médecins que j’avais rencontrés dans ces centres. Hélas, ce genre de connaissances n’est d’aucune utilité. Si la clé de la sobriété était l’effort et le savoir, ce monstre ne serait plus qu’un lointain souvenir. Je suis devenu un patient professionnel, ne serait-ce que pour rester en vie. N’y allons pas par quatre chemins : à 49 ans, j’étais toujours terrorisé à l’idée de me retrouver seul. Car quand on me laissait seul, mon cerveau malade (et pour info, il n’est malade que sur ce point précis) trouvait toujours une excuse pour me faire commettre l’impensable : boire et me droguer. Sachant que c’est ce qui a ruiné plusieurs décennies de ma vie, je suis toujours terrifié par l’idée que ça puisse recommencer. »
TROIS SEMAINES DE COMA
« L’établissement le plus proche, c’était Saint John’s. […] On a demandé à Erin (sa meilleure amie, ndlr) de partir quelques secondes après que je lui ai dit : “ S’il te plaît, ne pars pas” et j’ai fermé les yeux. Et je n’allais pas les rouvrir pendant trois semaines » […] “Matthew a 2 % de chances de passer la nuit.” Mon entourage était si bouleversé que certains se sont effondrés par terre au milieu du hall de l’hôpital. Je vais devoir passer le reste de ma vie avec la culpabilité de savoir que ma mère et mes proches ont entendu ces mots. […] La première chose que j’ai vue, c’est ma mère. “Que se passe-t-il ?” ai-je réussi à grommeler. Où suis-je, bon sang ? La dernière chose dont je me souvenais, c’était d’être en voiture avec Erin, et c’était un mois plus tôt. “Ton côlon a explosé”, a répondu ma mère. En apprenant cette nouvelle, j’ai fait ce que tout acteur comique aurait fait : j’ai levé les yeux au ciel et je me suis rendormi. […] Je suis sorti de l’hôpital au bout de cinq longs mois. »
BLESSURES D’ENFANCE
« J’ai toujours compris d’où venait la vraie douleur. (Je savais pourquoi je souffrais physiquement – parce qu’on ne peut pas boire autant que tu le fais, trou du cul.) Mais pour le reste, j’ai d’abord tenté de blâmer mes parents aimants et bien intentionnés… […] et incroyablement beaux, par-dessus le marché. […] Voilà donc l’adorable histoire de leur rencontre : un chanteur de folk et une miss qui tombent amoureux dans une ville canadienne bloquée sous la neige en 1967… L’homme le plus beau de la planète rencontre la plus belle femme de la planète. […] Mon père a pris ses jambes à son cou, pour aller Dieu sait où. Il n’est pas rentré du travail ce premier soir, ni le deuxième. J’espérais qu’il rentrerait au bout de trois jours, puis d’une semaine, puis d’un mois. J’ai arrêté d’espérer au bout de six semaines environ. De toute façon, j’étais trop jeune pour comprendre où était la Californie et ce que signifiait “poursuivre son rêve de devenir un acteur” – c’est quoi, un acteur, et où est mon père, putain ? Mon père, qui deviendrait plus tard un père formidable, venait de laisser son bébé seul avec une femme de 21 ans en sachant très bien qu’elle était trop jeune pour être mère célibataire. Elle était certes une femme merveilleuse et très aimante, mais tout bonnement trop jeune. On l’avait abandonnée elle aussi sur ce parking de la frontière entre les États-Unis et le Canada. »
FAIRE RIRE SA MÈRE ET SE BAGARRER AVEC JUSTIN TRUDEAU
« J’avais un esprit vif et une langue tranchante, même à l’époque. Ajoutez à ça une mère qui travaillait beaucoup, qui avait un job important et un esprit et une langue tout aussi affûtés que les miens… […] C’était l’attachée de presse de Pierre Trudeau, un coureur de jupons notoire qui était, à l’époque, le Premier ministre du Canada. […] En même temps, on parle d’un Premier ministre aussi charmant que mondain, qui était sorti avec Barbra Streisand, Kim Cattrall et Margot Kidder… […] Le travail de ma mère signifiait qu’elle était constamment en voyage d’affaires – et en matière d’attention, moi, je ne faisais pas le poids face aux enjeux d’une démocratie majeure de l’Occident et à son leader charismatique et chevaleresque. J’ai donc appris à être drôle (gaffes, vannes courtes qui font mouche, vous savez de quoi je parle) parce qu’il le fallait – ma mère était stressée par son boulot […] et déjà très émotive (et envahie elle aussi par ce sentiment d’abandon), et mon humour devait l’apaiser suffisamment pour qu’elle réussisse à me faire à dîner et à m’écouter lui raconter ma journée. […] C’est à ce moment que les mauvais comportements ont commencé – j’avais des notes pourries, je fumais en cachette, je me suis même battu avec Justin, le fils de Pierre Trudeau, qui finirait par devenir Premier ministre, lui aussi (j’ai décidé d’enterrer la hache de guerre entre nous le jour où il s’est retrouvé à la tête d’une armée). […] J’ai bu mon premier verre d’alcool à 14 ans. J’avais tenu aussi longtemps que possible.«
L’ALCOOLISME, FLÉAU FAMILIAL
« Los Angeles, mon père et une nouvelle vie m’appelaient, mais j’avais 15 ans et partir signifiait briser mon foyer et le cœur de ma mère. Mais elle ne m’avait rien demandé quand elle avait décidé d’épouser Keith, d’emménager à Toronto et de lui faire deux enfants… Et au Canada, j’étais constamment en colère ou en train de pleurer ou en train de boire, et ma mère et moi nous disputions et je ne faisais pas vraiment partie de la famille et j’étais nul à l’école et j’allais déménager un jour pas si lointain de toute façon, etc., etc., etc. Et puis merde, un enfant & a le droit d’avoir envie de connaître son père. […] Papa buvait lui aussi. Tous les soirs il rentrait du tournage sur lequel il était – ou n’était pas –, se servait une bonne lampée de vodka-tonic et déclarait : “Voilà la meilleure chose qui me soit arrivée de toute la journée.” Et c’était d’un verre d’alcool qu’il parlait. Assis à côté de son fils sur un canapé de Los Angeles, il en buvait quatre autres puis emportait le cinquième avec lui au lit. Mon père m’a enseigné beaucoup de bonnes choses mais c’est lui qui m’a appris à boire, sans aucun doute. Ce n’est pas un hasard si ma boisson de prédilection a longtemps été une double vodka-tonic et que, chaque fois que j’en buvais une, je me disais que c’était la meilleure chose qui me soit arrivée de toute la journée. »
JENNIFER, GWYNETH ET LES AUTRES
« Très tôt après le début du tournage, j’ai réalisé que j’en pinçais toujours pour Jennifer Aniston. Même nos “bonjour/bonsoir” étaient devenus compliqués pour moi. Je me posais des questions du genre : “Combien de temps je peux la regarder sans que ça soit bizarre ? Trois secondes, c’est trop long ?” Mais la tension a fini par disparaître, grâce au succès de la série (et au fait que je n’intéressais pas Jennifer). […] L’été venait de commencer et il allait falloir attendre deux mois avant que la série passe à la télé. Je me suis donc occupé grâce à trois activités : jouer à Vegas Friends , mes amours… sur ordre de Jim Burrows, voyager seul au Mexique et rouler des pelles dans un placard à Gwyneth Paltrow. J’étais de retour à Williamstown, dans le Massachusetts, quand j’ai rencontré Gwyneth. Elle jouait une pièce dans la région, et moi, je rendais visite à mon grand-père. Lors d’une grosse fête, nous nous sommes éclipsés dans un placard à balais pour s’embrasser. Nous étions tous les deux encore suffisamment inconnus pour que ça ne sorte pas dans les journaux le lendemain matin. »
SA LOVE STORY AVEC JULIA ROBERTS
« Il se trouve qu’on avait proposé à Julia de faire une apparition dans l’épisode du Super Bowl de la saison 2, mais qu’elle n’accepterait que si elle partageait ses scènes avec moi. […] Mais d’abord, il fallait que je l’impressionne. J’ai vraiment réfléchi longtemps à ce que j’allais écrire sur cette carte. Je voulais que ce soit à la fois professionnel, de star à star (enfin de star normale à mégastar), mais aussi légèrement séducteur, pour faire écho à ce qu’elle avait dit. Je suis encore fier de ma trouvaille. Je lui ai envoyé trois douzaines de roses rouges avec un mot qui disait : “La seule chose plus excitante que l’idée que vous participiez à la série, c’est que j’ai enfin une excuse pour vous envoyer des fleurs.” […] Elle m’a répondu que si j’arrivais à lui expliquer de façon intelligible la physique quantique, elle acceptait de jouer dans la série. Waouh ! […] Le lendemain, je lui ai envoyé un essai sur la dualité onde-corpuscule, la loi des probabilités et l’intrication, en m’assurant d’insister sur quelques métaphores. […]Non seulement Julia a accepté de faire une apparition dans la série, mais elle m’a également envoyé un cadeau : des bagels – des tonnes de bagels. Et pourquoi pas ? C’était Julia Roberts, putain. C’est comme ça qu’a commencé une cour de trois mois à coups de fax quotidiens. […] Au bout de dix minutes, les bruits métalliques de la machine – les bings, les bruissements et les sifflements de messages venus de l’espace – ont envahi mon appartement. “Appelle-moi”, pouvait-on lire, avec son numéro de téléphone en dessous. J’ai décroché mon téléphone et j’ai appelé Julia Roberts. J’étais nerveux comme jamais, nerveux comme ma première fois chez Letterman. Mais la conversation était fluide – je l’ai fait rire, mon Dieu ce rire… Elle était très intelligente, un vrai cerveau. J’ai tout de suite compris que c’était une des meilleures conteuses d’histoires que j’avais connues de ma vie. Ses anecdotes étaient si géniales que je lui ai même demandé si elle les avait écrites en avance. […] À 14 heures le samedi suivant, quelqu’un a frappé à ma porte. Respire, Matty. Quand j’ai ouvert elle était là, Julia Roberts, debout sur le seuil, avec son immense sourire. Je crois que j’ai dit quelque chose du genre : “Oh, cette Julia Roberts-là ! […] Elle a ri, avec son rire de Julia Roberts, celui qui aurait pu provoquer la guerre de Troie. Et la moindre tension s’est envolée. Elle m’a demandé comment j’allais. – “J’ai l’impression d’être le mec le plus chanceux de la planète. Et toi comment ça va ?” – “Tu devrais probablement m’inviter à entrer maintenant. Je l’ai laissée entrer, au sens propre comme au figuré, et c’est comme ça que notre relation a commencé. Nous étions déjà en couple au moment du tournage de l’épisode de Friends du Super Bowl. […] À la fin du mois d’avril 1996, j’ai participé à l’émission de Jay Leno et j’ai annoncé que j’étais célibataire. Sortir avec Julia Roberts s’était avéré trop pour moi. Je vivais dans la certitude constante qu’elle allait me larguer […] Je n’étais pas suffisant, je ne serais jamais suffisant, j’étais brisé, tordu, indigne d’amour. Donc plutôt que d’affronter la souffrance inévitable qui découlerait de son départ, j’avais rompu avec la belle et brillante Julia Roberts. Elle qui avait probablement dû considérer qu’elle jouait en dessous de sa catégorie en sortant avec un acteur de télé se faisait désormais larguer par un acteur de télé. Je n’ai pas de mots pour vous décrire son regard estomaqué lors de cette conversation fatidique.«
AIDÉ PAR LA FAMILLE “FRIENDS”
« Je me suis sevré soixante-cinq fois dans ma vie – la première à 26 ans. […] Vous pouvez comparer mes différences physiques entre le dernier épisode de la sixième saison et le premier de la septième – ceux où Chandler demande sa main à Monica. Je porte les mêmes habits dans les deux épisodes, vu que nous sommes censés être le même soir, mais j’ai perdu 22 kilos pendant l’été. Durant mes années Friends, mon poids a varié de 58 à 102 kilos. On peut suivre l’histoire de mon addiction en observant mes variations de poids d’une saison à l’autre – quand je suis gros c’est l’alcool, quand je suis mince, ce sont les pilules.[…] A l’époque où on aurait pu penser que Matthew Perry célébrait le fait d’être la star du moment à Hollywood, je me contentais en réalité de gérer mes dealers et vivais seul avec mon malheur dans une pièce sombre. Je prenais tellement de pilules que j’étais incapable de quitter ma chambre. Chez les pingouins, quand l’un d’entre eux se blesse, tous les autres se regroupent autour de lui pour s’en occuper jusqu’à ce qu’il aille mieux. C’est exactement ce qu’ont fait mes partenaires de Friends avec moi. Il m’arrivait de débarquer sur le plateau avec une incroyable gueule de bois et Jen et Courteney, convaincues qu’une séance de cardio peut vous guérir de tout, ont fait installer un vélo elliptique dans les coulisses. »
VERS LA LUMIÈRE
« Il fallait que je me détache de tout ce qui me faisait du mal, comme continuer à être en colère contre mes parents, avoir été non accompagné toutes ces années, ne pas être suffisant, être terrorisé par l’engagement parce que j’étais terrorisé par la fin de l’engagement. J’avais besoin de me rappeler que mon père était parti parce qu’il avait peur, et que ma mère était une gosse qui essayait juste de faire de son mieux. Ce n’était pas sa faute si elle devait consacrer autant de temps à ce putain de Premier ministre du Canada – ce job ne pouvait pas être un trente-cinq heures, même avec un gosse à la maison. Mais je ne pouvais pas le comprendre à l’époque… […] Quand j’aide un homme ou une femme à arrêter de boire, et que je vois la lumière reve-nir progressivement dans son regard, j’ai l’impression de voir Dieu. Et même si nous avons un lien spécial, et que je Lui suis reconnaissant malgré tout, j’ai parfois envie de Lui dire d’aller se faire foutre pour m’avoir rendu les choses aussi difficiles. […] Il y a trois jours, j’ai eu ma quatorzième opération – quatre ans après la première. J’ai à nouveau pleuré. Je devrais apprendre à m’y habituer, parce qu’il y aura toujours davantage d’opérations – ce ne sera jamais terminé. J’aurai toujours le côlon d’un mec de plus de 90 ans. En fait, je n’ai pas pleuré après une opération. Jamais. Mais j’ai arrêté d’appeler des dealers. Il y a tellement de cicatrices sur mon ventre que je n’ai qu’à baisser la tête pour me rappeler que j’ai connu la guerre, une guerre que je me suis moi-même menée. »
Friends, mes amours et cette terrible chose (Michel Lafon), en librairies ce 10 novembre. Cet article est à retrouver dans le Gala N°1534 en kiosque ce jeudi 3 novembre 2022.
Crédits photos : CPA / Bestimage
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