Trois ans après Je suis né à 17 ans…, dans lequel il se livrait sur son passé d’enfant battu, Thierry Beccaro a décidé de se raconter dans un nouveau livre intitulé Ma résilience à moi (Éd. Plon) paru le 4 novembre. L’ancien animateur de Motus est revenu sur le long et difficile chemin de la résilience. Pour l’occasion, il s’est confié à Gala.fr.
Thierry Beccaro revient de loin. Derrière le sourire de façade qu’il a longtemps eu à la télévision, se cachait des années de souffrance et de douleur. Dans un nouveau livre intitulé Ma résilience à moi, paru le 4 novembre dernier aux éditions Plon, celui qui a été victime des coups de son père s’est livré sur le long chemin de la résilience qu’il a entrepris, après une enfance marquée au fer rouge par la maltraitance. Aujourd’hui père de trois enfants, celui qui est actuellement sur les planches avec sa pièce Sans rancune a décidé d’avancer, malgré cette fêlure, et de se mettre au service des autres. Rencontre.
Gala.fr : Trois ans après Je suis né à 17 ans…, vous revenez avec Ma résilience à moi. Qu’est-ce qui vous a décidé à écrire ce nouveau livre ?
Thierry Beccaro : En me livrant sur ma maltraitance et ce père violent, je me suis aperçu que je n’étais pas le seul à vivre ça. J’ai tellement pensé que j’étais seul dans mon malheur. En ouvrant cette porte, j’ai permis à plein de gens de s’y engouffrer. Le mot ‘résilience’ est employé un peu à toutes les sauces, mais la vraie résilience demande beaucoup de temps. Ce ne sont pas ceux qui font du mal qui sont résilients, mais ceux qui subissent ce mal. Ma résilience, c’est mon chemin à moi. J’espère simplement qu’il va croiser le chemin d’autres personnes, qui vont se reconnaître et se dire qu’elles peuvent s’en sortir.
Gala.fr : Après la sortie de votre premier livre, vous avez reçu de nombreux témoignages de soutien de la part du public. Comment l’avez-vous vécu ?
Thierry Beccaro : Lorsque j’ai déjeuné avec mon éditeur, je l’ai remercié de ce que ce premier livre m’a apporté, c’est-à-dire énormément d’amour. Si mon parcours peut permettre aux autres de s’exprimer, s’ils peuvent se retrouver à travers moi, tant mieux. C’est à cela que ça doit servir.
Gala.fr : Vos proches étaient-ils au courant de votre démarche ?
Thierry Beccaro : À part ma mère, pas vraiment. C’est peut-être pour ma famille que ça a été le plus difficile. Je ne la vois plus beaucoup et je pense qu’elle n’a pas bien saisi le sens de ma démarche. Certains d’entre eux ont peut-être pensé que je faisais ça pour l’argent, mais ce n’est pas du tout le cas. Ça m’a permis d’aider les autres à se reconstruire et c’est ça qui m’intéresse aujourd’hui.
Gala.fr : Vous essayez d’avancer, malgré ce poids qui continue de peser sur vos épaules. Vous le porterez toute votre vie ?
Thierry Beccaro : Je pense oui. Ceux qui sont passés par là sont ce que j’appelle des corps ‘puzzle’. Si en principe, chaque pièce s’imbrique dans l’autre, il arrive qu’il en manque une ou deux. Chez moi, c’est peut-être l’insouciance et la paix, qui sont des choses que je recherche encore. Il faut vivre avec et se dire que ce n’est pas mal d’avoir reconstituer une grande partie du puzzle. Mais pour en arriver là, il a fallu du courage et du travail.
« Parfois, les choses sont tellement difficiles à admettre qu’on préfère fermer le rideau »
Gala.fr : Concernant votre père, vous avez un grand regret, c’est qu’il ne vous ait pas demandé pardon avant de partir. Vous y avez cru jusqu’à la fin ?
Thierry Beccaro : Vers la fin de sa vie, pendant un repas, je lui ai demandé s’il avait été heureux, s’il n’avait pas voulu changer de vie à un moment donné. J’ai essayé de l’emmener sur ce terrain, mais il m’a répondu : ‘Non, pour moi, il n’y a que ta mère qui compte.’ À ce moment-là, j’ai senti que je ne pouvais pas franchir une étape supplémentaire. La seule fois où j’ai essayé de lui faire comprendre ce qu’il s’était passé, avec la scène du fusil (que son père a braqué sur sa mère, ndlr), il m’a répondu : ‘Qu’est-ce que tu veux, un jour qui n’est pas fait comme un autre.’
Gala.fr : Lorsque vous tentez d’évoquer cette scène terrible avec votre mère, elle est dans le déni…
Thierry Beccaro : Ça a été terrible… Parfois, les choses sont tellement difficiles à admettre qu’on préfère fermer le rideau. Ça a été le cas pour elle, mais aussi pour mon père qui était sous l’emprise de l’alcool. Les gens qui boivent, dès le lendemain, ils oublient ou ils ont un souvenir très vague de ce qui s’est passé. Ce coup de fusil, c’est moi qui l’ai pris ce jour-là.
« Je n’ai pas pu être ce héros que j’aurais aimé être »
Gala.fr : Est-ce qu’un enfant comme celui que vous étiez comprenait ce qui se passait ?
Thierry Beccaro : Un enfant de 5-6 ans n’a pas la structure psychologique pour analyser ce type d’événement. Quand je me prenais des coups, je me disais que j’avais dû faire une bêtise. D’autant qu’après, mon père venait me voir et me disait qu’il m’aimait… Derrière les coups, il y a la violence psychologique aussi. Ce n’est pas une vie.
Gala.fr : Contrairement à vous, votre sœur Valérie n’a jamais craint votre père. Vous avez parlé avec elle de ce passé douloureux ?
Thierry Beccaro : Ma sœur n’a pas été touchée par mon père. Et elle n’a jamais vraiment eu de tendresse pour lui. Quand j’ai quitté la maison, elle est restée et elle a été la protectrice de ma mère. Malheureusement, je n’ai pas pu être ce héros que j’aurais aimé être. Après la sortie de mon premier livre, on en a parlé tous les deux. Elle a été témoin de ce que je vivais et m’a demandé pardon.
Gala.fr : La maltraitance peut avoir de terribles conséquences et entraîner des addictions… Vous, ça a été les médicaments. Comment êtes-vous parvenu à vous en sortir ?
Thierry Beccaro : Je me suis dit que les médicaments m’aideraient à m’évader. On espère que ça aille un peu mieux. On a envie que ça nous soulage et nous permette de ne plus penser. Mais c’est dangereux. Je m’en suis sorti parce que j’ai fait un travail d’analyse et j’ai essayé de comprendre ce qui se passait. Mais j’avoue que j’ai toujours ma petite boîte dans ma poche, au cas où. La prochaine étape, c’est quand je pourrai justement me passer de cette boîte.
Gala.fr : Au fond, est-ce que la télévision n’a pas été un moyen de vous faire aimer, vous qui avez manqué d’amour plus jeune ?
Thierry Beccaro : Totalement ! Dans Motus, j’ai rencontré des gens formidables, des Gilets jaunes, d’autres au chômage, qui venaient pour le plaisir de jouer. Certains, quand ils gagnaient 1.500, 3.000 ou 6.000 euros, c’était une moitié d’année pour eux ! D’autres, qui remportaient des plus grosses sommes, me disaient : ‘Peu importe, c’est juste le plaisir de venir jouer avec vous Thierry.’ Ça m’a tellement ému. Ça fait partie des belles choses de la vie. Un jour, un ami m’a dit : ‘la lumière, ce n’est pas fait pour briller, mais pour éclairer.’ Briller, je n’ai plus de souci avec ça, maintenant, si je pouvais éclairer…
« J’ai toujours accompagné mes enfants, que ce soit dans l’échec ou la réussite »
Gala.fr : Quand Hélène, la mère de votre premier enfant, vous annonce qu’elle est enceinte, vous parlez d’un « choc« . Vous aviez peur de reproduire le même schéma que votre père ?
Thierry Beccaro : Ça a même été un électrochoc. J’avais très peur d’être père. Je mettais tout ça sur le compte du monde dans lequel nous vivons, mais j’avais surtout peur de reproduire ce que j’avais vécu. Après, j’ai pensé : ‘pourvu que ce soit une fille !’ Je me suis dit qu’avec une fille, j’aurais plus de tendresse. La naissance de Pauline, ça a été merveilleux. Et depuis, j’ai eu un fils !
Gala.fr : Vous avez 3 enfants aujourd’hui. Est-ce qu’à l’inverse de vos parents, vous dialoguez avec eux ?
Thierry Beccaro : Bien sûr. Je me suis construit tout seul et je ne sais pas ce que c’est d’avoir les conseils d’un père. Mes enfants, je les ai toujours accompagnés, que ce soit dans l’échec ou la réussite. Je les ai encouragés. Même affectivement, j’essaie d’être avec eux. Quand ma fille Pauline me parlait de ces histoires de jeune fille, je lui demandais : ‘Est-ce qu’il est gentil ? Si tu sors, tu fais bien attention.’ Toute cette présence au côté d’un enfant, ça fait toute la différence. Les parents peuvent être ennuyants quand ils vous répètent toujours la même chose, mais c’est tellement mieux que de ne rien dire du tout… Même je suis un peu chiant parfois, je pense que je suis un bon père.
Gala.fr : Désormais, vous envisagez d’adapter votre premier livre au théâtre. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Thierry Beccaro : Ça serait bien ! L’adaptation a été faite et il se peut que je joue ça au Festival d’Avignon au mois de juillet 2022. On est en train de travailler sur ce projet. Je pense que ça sera un beau spectacle.
Crédits photos : BEST IMAGE
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