C’est quoi le Festival du Mois Kréyol, qui promeut la langue créole ?

  • Ce jeudi 28 octobre, c’est la journée internationale des langues et des cultures créoles.
  • Depuis cinq ans, le Festival du Mois Kréyol organise une série d’évènements et d’ateliers durant deux mois pour promouvoir cette langue régionale, la plus parlée en France, à travers l’Hexagone et l’Outre-mer.
  • « Le créole a complètement sa place dans le patrimoine culturel français », explique Chantal Loïal, fondatrice de la compagnie Difé Kako et initiatrice du projet.

« Yékrik ! Yekrak ! » Dans les coulisses du Conservatoire Maurice Ravel dans le 13e arrondissement de
Paris, Chantal Loïal, présidente de la compagnie Difé Kako, met la touche finale avant l’entrée en scène de la troupe du Cercle égal demi-cercle au carré. La vingtaine de danseurs se produit en cette journée internationale de la langue et de la culture créole, dans le cadre du festival du
Mois Kréyol.

Après la tempête sanitaire qui a balayé la planète en 2020, l’événement, créé il y a cinq ans, reprend sa mission de promotion des cultures créoles avec une programmation riche de spectacles de théâtre, danse, musique, documentaires, ou encore tables rondes, jusqu’au 28 novembre, dans l’Hexagone, les
Outre-mer​, à Montréal et Trinité-et-Tobago. « Le festival appelle au rassemblement des diversités du monde », se réjouit Chantal Loïal, la cheffe d’orchestre du festival.

Pour un public qui connaît peu ou mal la culture créole… Le Festival du Mois Kréyol, en quelques mots, qu’est-ce que c’est ?

Le Festival, c’est déjà le créole. Nous faisons notamment des tables rondes sur cette langue pour la faire connaître. Nous sommes quand même plus de 10 millions à le parler dans le monde entier. Le Mois Kréyol, c’est aussi faire connaître la culture, la musique, la danse, le théâtre et aussi la cuisine. L’idée, c’est que les artistes créolophones puissent avoir une visibilité partout, aussi bien dans l’Hexagone qu’en Outre-mer et surtout de faire en sorte que la culture créole soit mieux connue et de se saisir de tous les créoles. Nous souhaitons d’ailleurs que toutes les associations puissent se fédérer et soient porteuses du projet. Le créole, c’est aussi le mélange des gens, de manière singulière et plurielle.

Pourquoi avoir lancé un tel événement ?

Parce qu’il y avait un manque dans l’Hexagone. Le créole, c’est une culture riche qui fait partie de la petite et de la grande histoire de la France. Cette culture arrive à être intergénérationnelle. Nous pouvons transmettre à nos enfants la musique, la danse. La France ne pourrait pas se passer d’un tel événement, qui est à la fois nourri de réflexions et à la fois de discussions avec des tables rondes très festives. Nous sommes des peuples qui ont été dans la souffrance et dans la résilience, qui nous ont amenés parfois à être dans le tragique mais aussi dans la joie. Nous savons aborder les questions politiques et sociétales auxquelles nous sommes confrontés comme le chlordécone, les
sargasses… A notre petite échelle d’îles insulaires et territoires, il est très important pour nous d’échanger, de faire avancer les choses, mais également de vivre des moments agréables, de vivre-ensemble.

Le créole est la langue régionale la plus parlée en France (avec plus de 1,6 million de locuteurs)… Peut-on dire que la culture créole a toute sa place dans le patrimoine culturel français ?

Le créole a complètement sa place dans le patrimoine culturel français. Faut-il déjà que les politiques l’acceptent… Les créoles, comme toutes les autres langues régionales telles que l’occitan, le basque ou le breton sont friands de leur langue. D’ailleurs, nous échangeons entre nous. Une langue, qui reste vivante, qui fait partie du patrimoine immatériel, est très importante pour se construire demain.

Comment représentez-vous la diversité des différents créoles (guadeloupéen, guyanais, réunionnais, etc.) ?

La diversité vient dans un premier temps de nos intervenants qui font le déplacement de leur territoire ultramarin, des scientifiques présents, de nos artistes peu importe leur discipline, des associations.

Les différents spectacles et ateliers sont-ils rendus accessibles à ceux qui ne parlent pas le créole ?

Le festival est ouvert à tout le monde. Nous parlons aussi le français. Nous avons des professeurs qui traduisent et travaillent avec des personnes qui ne sont pas créolophones, comme le conteur Igo Drané ou encore Manuel Allamellou, ainsi qu’avec des associations à l’international, au Canada, à Trinidad-et-Tobago. Tout est didactique. Nous avons également mis en place des échanges en visioconférences, disponibles tout au long de l’année.

Avez-vous observé des progrès dans la représentation du créole ou au contraire cette langue régionale est-elle menacée ?

La langue n’est plus menacée. Maintenant, il faudrait que les parents acceptent de la transmettre. Le créole n’est plus un interdit comme antan. Je trouve que les enfants d’aujourd’hui sont très fiers de parler créole, d’avoir l’accent créole, de l’appuyer pour qu’on sache d’où ils viennent. C’est très riche. Je suis assez positive et convaincue que c’est une langue qui va perdure. An sèten mèm (J’en suis certaine même).

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