Choix des fruits et légumes, sucre, cuisson, conservation… Comment réussir à coup sûr ses confitures ? Mode d’emploi avec le spécialiste Stéphan Perrotte, détenteur du double titre de Meilleur Confiturier de France et de Champion du Monde.
Alors que les fruits d’été mûrissent encore dans les vergers, on en profite pour réaliser de délicieuses confitures maison et ainsi garder pour l’hiver les saveurs et les couleurs de ces mois ensoleillés. Figues, prunes, rhubarbe, tomates, framboises, mirabelles ou même courgettes, on varie les plaisirs. Mais avant de s’y mettre, on fait le point avec Stéphan Perrotte (1), Meilleur Confiturier de France 2014, et détenteur du titre de Champion du Monde 2015. Du choix du matériel à la quantité de sucre en passant par la cuisson et la conservation, il nous livre son mode d’emploi.
Fruits, légumes : tous en pot !
Remplir le pot de confiture à deux à trois millimètres du bord.
Avant de commencer, le pro de la confiture tient à mettre les choses au clair : la légende urbaine selon laquelle il faudrait utiliser des fruits trop mûrs, tapés ou abîmés est fausse. «Le chef cuisinier n’attend pas que sa viande sente le vinaigre avant de la cuire. Pareil pour les confitures : on sélectionne de bons produits», insiste-t-il. Lesquels ? Stéphan Perrotte assure : «tous les fruits et légumes peuvent se décliner en confitures». La seule limite de nos recettes étant celle de notre imagination. C’est dit.
Le bon matériel
Second point à savoir avant de débuter : si préparer des confitures maison ne requiert pas beaucoup de matériel, voici tout de même une petite liste des ustensiles à avoir :
Une bassine en cuivre à fond épais et assez large, qui permet une répartition homogène de la chaleur. Pas de casserole ? «Non, les bords droits de la casserole ne permettent pas à l’eau de bien s’évaporer», explique l’artisan du goût. Si on n’a pas de bassine en cuivre ? Un wok est l’idéal.
Une écumoire pour retirer les impuretés qui remontent à la surface.
Un thermomètre à sucre pour contrôler la cuisson précisément.
Des pots stérilisés pour éviter le développement de moisissures. Stéphan Perrotte indique : «Il existe deux techniques pour stériliser les pots de confitures : les mettre au four à 150 °C pendant dix minutes, ou les mettre à l’envers dans un cuit-vapeur pendant le même temps».
Le choix du sucre
«Indispensable, il est l’ingrédient qui permet la conservation des fruits», rappelle le spécialiste qui préconise deux dosages différents. Premièrement, le fameux 50 % de fruits pour 50 % de sucre. Une fois le sucre naturellement contenu dans les fruits évaporé, on obtiendra une confiture concentrée à 65 % de sucre (celle que l’on retrouve le plus souvent au supermarché). Si l’on souhaite réaliser une confiture moins sucrée et plus fruitée, on se contentera d’une proportion de 650 g ou 700 g de sucre pour un kilo de fruits. Du sucre oui, mais quel sucre ?
Le sucre blanc est le plus souvent utilisé et «fonctionne très bien pour faire de la confiture», selon l’artisan. «La cassonade contient quelques impuretés, aussi je ne la recommande pas dans la préparation d’une recette maison. Toutefois, si l’on décide de faire une confiture avec de la cassonade, il faut impérativement baisser le taux de sucre de la recette car son goût est très prononcé». En ce qui concerne les alternatives au sucre comme l’aspartame, la stévia ou encore le sirop d’agave, le professionnel les déconseille. «La stévia donne à la préparation un petit goût de réglisse qui me dérange, explique-t-il en tempérant, bien sûr, c’est une question de goût.» À noter toutefois pour les «épicurieux» qui auraient tout de même envie d’essayer : les édulcorants n’offrent pas les mêmes facultés de conservation que le sucre.
Quels gélifiants utiliser ?
Quelle est la différence entre une confiture et une gelée ?
Une confiture se réalise à partir de fruits entiers quand une gelée est concoctée à partir d’extraction de jus.
La gélatine : un agent gélifiant fabriqué à partir de peau ou d’os d’animaux. Très facile à travailler, elle va rendre la confiture plus compacte. Avant de l’incorporer dans une préparation, on la réhydrate dans de l’eau froide pendant une dizaine de minutes. On utilise deux feuilles de gélatine pour 1 kilo de fruits.
L’agar-agar : une substance naturelle extraite d’algues rouges. On la trouve le plus souvent sous forme de poudre. Comme la gélatine, l’agar-agar va rendre la confiture plus compacte. Ici aussi, on a la main légère : on utilise 1 à 2 grammes d’agar-agar par kilo de fruits.
La pectine : une substance d’origine végétale que l’on retrouve dans les pépins de nombreux fruits et zestes d’agrumes. Stéphan Perrotte ne jure que par ce gélifiant «naturel et déjà présent dans le fruit». On la mélange avec du sucre avant de l’ajouter dans sa confiture au moment de la préparation, accompagnée de jus de citron (la pectine ne gélifiant qu’en présence d’un acide). On compte 15 grammes de pectine pour un kilo de fruits et de sucre.
Nos plus belles recettes de confitures maison
Il est important de remuer la confiture tout au long de la cuisson afin d’éviter qu’elle n’attache.
À la royale : dans une bassine en cuivre. Faire macérer les fruits, le sucre, le gélifiant (si nécessaire) et le jus de citron. Le professionnel conseille «entre 18 et 20 minutes sur le feu». Utiliser le thermomètre à sucre pour vérifier que vous ne dépassez pas les 105 °C. Il est important de remuer la confiture tout au long de la cuisson afin d’éviter qu’elle n’attache et de l’écumer en permanence.
Au sirop : les fruits sont plongés dans un sirop concentré réalisé à partir de fruits cuits. Feu doux, feu vif ? «Cela dépend des préparations, assure Stéphan Perrotte. On cuit une confiture de framboises à feu plutôt vif, quand on fait mijoter une confiture de poires à feu plus doux». Ici aussi, le professionnel conseille l’utilisation du thermomètre à sucre pour vérifier que la température de la préparation ne dépasse pas les 105 °C. Encore une fois, le confiseur préconise «entre 18 et 20 minutes de cuisson».
«Sans thermomètre, on effectue le test de l’assiette froide.» Placer une assiette au réfrigérateur pendant une dizaine de minutes. Lorsque la confiture semble avoir bien pris, verser quelques gouttes sur l’assiette : celles-ci doivent se figer sans trop couler. «Au micro-ondes, on peut également tout à fait se concocter une petite compotée minute : il suffit de mettre quelques fruits dans une assiette et de les réchauffer. Mais, puisque l’on n’ajoute pas de sucre à cette préparation, il faut la consommer tout de suite.»
Trop liquide, trop épaisse… les erreurs à ne pas commettre
Non pas que l’on remette en cause vos talents de confiturier, mais personne n’est parfait. Et réussir sa confiture avec brio n’est pas une mince affaire. «Une confiture trop liquide révèle une cuisson trop longue», avertit Stéphan Perrotte. Pour rattraper le coup, on ajoute de la pectine qui solidifiera la préparation. Si votre confiture est trop épaisse, l’astuce de grand-mère consiste à ajouter un peu d’eau et un filet de jus de citron. Dernière erreur potentielle : une confiture trop sucrée. Que faire dans ce cas-là ? «Ajouter du jus de citron», déclare-t-il avant de compléter : «si par malheur les pots fermentent (c’est-à-dire que la capsule de la confiture explose ou que le liquide sort du pot alors qu’il est fermé), il n’y aura pas de rattrapage possible… votre mélange devra alors directement être jeté à la poubelle». Pour éviter ce «drame», on remplit ses pots à deux ou trois millimètres du bord pour éviter de créer des trous d’air.
La conservation
Si toutes les règles d’hygiène et si les quantités de sucre ont été respectées, avant ouverture, un pot de confiture peut se conserver au minimum deux ans. Après ouverture, tout dépend de la teneur en sucre. Si le pot contient moins de 55 g de sucre, il faudra impérativement le conserver au réfrigérateur. Au-delà, il est possible de le garder dans un placard frais et sec. Mais si votre confiture est réussie, nul doute qu’elle ne passera pas l’hiver.
(1) Stéphan Perrotte a fondé Maison Perrotte, son entreprise de confitures haut de gamme, en 2016.
Cet article, initialement publié le 1 septembre 2017, a fait l’objet d’une mise à jour.
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