1 Heure avec… Moundir : “J'ai vu la mort en face”

À l’occasion de la parution de son livre, Père et Fils, il s’est confié sur sa carrière et sa famille. Des moteurs qui lui ont permis de sortir de soins intensifs après un Covid long…

Public : Comment se passe votre convalescence post-Covid ?

Moundir : Ça fait près de quatre-vingt-dix jours que je suis sorti de l’hôpital et je m’accroche pour récupérer toutes mes facultés physiques. Le corps ne ressort pas indemne de cinquante-cinq jours d’hospitalisation et cinq jours de réanimation. Ce virus a touché mes poumons à 80 %. J’ai repris le sport il y a quinze jours mais tout mon poumon gauche est mort. Je dois attendre que mon tissu pulmonaire revienne à la vie. Le retour à la normale sera long.

Vous avez vu la mort de près. Que retenez-vous de cette expérience ?

 

J’ai frôlé la mort mais ça n’a pas été un moment violent. C’était très doux de la toucher de si près, je me sentais bien. J’avais accepté mon sort. Je ne contrôlais plus rien, je devais juste me laisser porter et attendre que le destin me prenne ou non… Quand je suis entré en réanimation, j’étais lucide, je savais que j’étais très atteint, que mes jambes et l’un de mes bras ne fonctionnaient plus. J’avais une sorte de voile blanc devant les yeux. Je me souviens de tout.

Ce n’est pas la première longue convalescence que vous vivez, n’est-ce pas ?

C’est vrai. Quand j’étais plus jeune, j’ai été renversé par un scooter. J’ai été opéré pour une fracture du tibia, on m’a posé des broches et des vis dans la jambe. J’ai mis un an à m’en remettre. Mais si j’avais eu le choix entre revivre cette opération et être atteint par le Covid, j’aurais choisi la fracture sans hésiter. Les douleurs du Covid sont insupportables.

Votre maladie a retardé la promotion de votre autobiographie. À sa lecture, on découvre que vos parents vous ont toujours servi de modèle…

Ma mère, c’est l’amour et la tendresse incarnés. Mon père était moins expressif, moins démonstratif, il était plus pudique. Il avait vécu l’occupation française en Algérie et mon grand-père avait été très dur avec lui ; alors, forcément, il était un peu rigide. Mais on était très fier de lui, de sa manière de nous regarder, de poser sa main sur nous. C’était la force et le pilier de notre famille. Il a fait énormément de sacrifices pour que nous ayons un bel avenir, mes cinq frères et moi.

Vous avez pris exemple sur lui pour forger votre rôle de père ?

Oui, bien sûr. Même si je suis un vrai papa poule, à la maison, il y a des règles que les enfants doivent respecter. Ma femme est plus stricte que moi mais je tiens à cette discipline. Et puis, je prends garde qu’il n’y ait pas de tablettes ni de téléphones. C’est hors de question.

On sent une pointe de nostalgie quand vous parlez de votre enfance sans Internet. Pensez-vous qu’il est plus difficile d’élever des enfants à l’heure du numérique ?

Oui, je suis nostalgique de l’époque où l’on pouvait s’amuser sans Internet et sans gadget. Je trouve que l’on évolue dans un monde “azerty”, où l’on échange moins en face à face. J’ai quitté Paris pour que mes enfants grandissent dans la nature, avec des animaux, en faisant du sport plutôt que d’être scotchés sur les réseaux…

« J’ai grandi à l’époque des skinheads »

Justement, vous menez une guerre sans merci contre ceux que vous appelez “les influementeurs”. Pourquoi cette croisade ?

J’ai toujours été engagé dans la défense des opprimés, je tiens ça de ma mère. Depuis trois ou quatre ans, des gens me signalent qu’ils ne reçoivent pas leurs commandes, ou qu’ils sont débités deux fois après avoir acheté des produits dont les influenceurs font la publicité. À un moment, il faut une réglementation, et que les agences assument leur part de responsabilité. J’ai donné un coup de pied dans la fourmilière et Bruno Le Maire s’en est mêlé, c’est un bon début.

Vous n’avez pas peur que cela nuise à votre carrière ?

Je ne crois pas que ce soit le cas. Inciter les gens à porter plainte quand ils se font arnaquer, ce n’est pas ce que je fais toute la journée, c’est juste un petit coup de pouce. Je continue de me concentrer sur mon métier, sur mes enfants et sur mon épouse. C’est ça le plus important.

Justement, vous avez l’air encore plus amoureux que lors de votre rencontre. Quel est le secret de votre couple ?

Ma rencontre avec elle a changé ma vie. On est pareils, elle et moi, elle est engagée, elle fait tout pour sa famille. Elle s’est battue comme une guerrière quand j’étais à l’hôpital. Elle est exemplaire. Je sais que je lui dois tout. Il n’y a pas de secret quand il y a de l’amour. Parfois on a des disputes, c’est sûr, mais elles finissent très vite. On s’écoute, on partage… voilà tout.

Vous relatez sa conversion, son envie de porter le hijab. Vous n’approuvez pas totalement ce choix…

Quand elle a décidé de se convertir à l’islam, c’était après une illumination et beaucoup de réflexion. Et quand elle a fait son premier ramadan, elle a été très combative. J’étais admiratif. C’est elle qui décidera si elle veut porter le hijab ou non, elle est libre. Mais c’est vrai que ça m’inquiète. Je ne veux pas qu’elle soit critiquée, insultée ou attaquée. Je risquerais de très mal réagir. Le contexte est compliqué. En France, il y a beaucoup de discriminations…

Vous faites également part de votre expérience du racisme. Vous vous sentez encore stigmatisé aujourd’hui ?

Mes parents ont été discriminés, et ces discriminations continuent. C’est à nous, deuxième ou troisième génération d’immigrés, de tout faire pour que l’extrême droite n’ait pas matière à nous dire que nous ne sommes pas des vrais Français. Il faut travailler dur, prouver que l’on a sa place, c’est comme ça. Je n’ai pas peur de ces nouveaux mouvements identitaires. J’ai grandi à l’époque des skinheads et j’entraîne mes enfants à repérer les discours de haine.

Dans votre livre, vous vous interrogez sur la corrélation entre la stagnation de votre carrière et vos origines. Vous pensez que le milieu du showbiz et de la télé est raciste ?

On ne m’a jamais traité de sale Arabe dans ce milieu, mais il faut travailler cent fois plus pour y arriver. Quand on est un bon animateur et que l’on est bankable, on doit avoir un plan de carrière. W9 ne m’en a jamais proposé. Et je ne comprends pas pourquoi, alors que mon émission a marché pendant quatre ans, on n’a pas fait le forcing pour me garder et que l’on m’a dit : “C’est soit ça, soit rien.” Voilà pourquoi je suis parti vers de nouvelles aventures.

Dates clés

1. 4 septembre 1973

Moundir naît à Paris. Il est le deuxième enfant d’une famille de six garçons. Sa mère est d’origine espagnole, son père, algérien.

2. Juin 2003

Après avoir envoyé un CV et une lettre de motivation, il participe à la saison 3 de Koh-Lanta.

3. Mai 2016

W9 lui offre sa propre émission, Moundir et les Apprentis aventuriers. C’est un carton d’audience.

4. Mai 2021

Il publie son premier livre, Père et Fils, aux éditions Robert Laffont. Une autobiographie dans laquelle il rend hommage à son papa, décédé d’une tumeur au cerveau il y a près de seize ans.

À voir également : Zapping : Le témoignage bouleversant de Moundir, qui a survécu au Covid-19

Léa Hasvry

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