Destinée à féminiser une langue française accusée de sexisme, l’écriture inclusive fait l’objet de débats très violents… Le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, vient d’annoncer son interdiction dans les classes dans une circulaire publiée au Bulletin officiel de l’éducation nationale, ce 6 mai 2021.
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La langue française a une expression bien à elle pour évoquer ces questions qui divisent les esprits et ressortent régulièrement : un serpent de mer. La guéguerre médiatique autour de l’écriture inclusive en est une parfaite illustration, la nouvelle obsession des milieux politiques, intellectuels et militants, qui s’écharpent joyeusement sur le sujet. Dernier assaut, celui du député LREM François Jolivet, à l’initiative d’une proposition de loi visant à interdire « l’usage de l’écriture inclusive pour les personnes morales en charge d’une mission de service public » ranimant une polémique surréaliste dont se contrefiche l’écrasante majorité du pays. Un « péril mortel » dénonce l’Académie française, qui ne donne pas dans la nuance. Ce langage égalitaire doit se généraliser pour mettre fin à l’oppression du patriarcat, revendiquent des supportrices, guère plus modérées. Chaque camp caricature l’adversaire : conservateurs machistes contre féministes hystériques.
De l’inclusif à l’exclusion, il n’y a qu’un point
Mais de quoi cause-t-on ? Explication : l’écriture inclusive est l’expression de la volonté de démasculiniser la langue française : féminisation des noms métiers ; utilisation de l’épicène (des mots dont la forme ne varie pas en changeant de genre) ou de termes neutres (« scientifiques » plutôt que « chercheurs ») pour effacer la supériorité du masculin sur le féminin. Pourquoi pas ? Mais le diable se niche dans un détail : le « point médian » qui regroupe le féminin et le masculin : un.e apprenti.e, des « ingénieur.e.s ». Moche à l’écrit, impraticable à l’oral, il faut bien le reconnaître… « Sur des textes longs, ce n’est pas viable, souligne Mathieu Avanzi, maître de conférence en langue française à la Sorbonne Université. Cela crée une insécurité linguistique et pose un réel problème pour les gens qui ont des difficultés d’apprentissage. »
« Ce n’est qu’une abréviation pour l’écrit, précise Eliane Viennot, linguiste et professeur émérite de littérature de la Renaissance, pour défendre l’écriture inclusive. Plusieurs formes ont été essayées et celle-ci est la plus juste, car elle n’est pas connotée. » Les deux camps semblent irréconciliables. Franchement, au lieu de s’étriper pour des absurdités comme un pronom personnel sujet « iels » (mélange de « ils » et de « elles », histoire de ne froisser personne), ne serait-il pas plus avisé de s’inquiéter du niveau de l’orthographe, en chute libre, et de trouver des solutions pour l’enseigner correctement ?
Témoignages : ce qu’ils pensent de l’écriture inclusive
Valérie, 50 ans, professeur de yoga : « J’avoue que je ne sais pas quoi penser de l’écriture inclusive. Mais il faudrait aussi s’interroger sur l’usage de certains mots féminins comme “folle” ou “maîtresse” employés de façon très péjorative. »
Christine, 65 ans, retraitée : « Pour moi, c’est un débat de nantis, celui d’une élite intellectuelle qui n’est pas confrontée aux inégalités persistant entre les hommes et les femmes : salaires, promotion sociale ou encore répartition des tâches domestiques. »
Alain, 60 ans, enseignant : « Le procédé est compliqué à l’écrit et il rend la lecture pénible. Je pense qu’il ne faut pas l’imposer : chacun doit pouvoir faire comme il veut. »
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