Le meilleur polar de 2019 est "Corps inflammables" de Laura Lippman | Vogue Paris

Il a beau se passer en plein été, le nouveau roman de Laura Lippman fait froid dans le dos autant qu’il réchauffe le cœur. L’histoire d’une rencontre pas si improbable entre le feu et la glace sur la côté est des États-Unis, idéale pour faire passer l’hiver.

En quête d'un excellent polar à (s')offrir cet hiver ? On vous conseille Corps inflammables de Laura Lippman.

Les deux héros sont menteurs, méfiants, calculateurs et surtout très humains. C’est là la force du polar de Laura Lippman

Dès la deuxième page de Corps inflammables, le lecteur est prévenu : rien ne colle dans cette histoire. À commencer par ce coup de soleil sur les épaules, le genre qui laisse la peau à vif. « Pourquoi une rousse qui a dépassé la trentaine ferait-elle pareille erreur de débutante ? » C’est la question que se pose Adam la première fois qu’il voit Polly et ses épaules meurtries. Ils se croisent à Belleville, Delaware, un trou perdu où l’on passe mais où l’on ne s’arrête pas. Adam est à la quête de quelque chose. Polly, elle, a fui, elle a laissé son mari et sa fille de trois ans sur une plage, avec en guise d’adieux quelques lignes imprimées sur une feuille blanche. Là aussi, rien ne colle. Comment une mère en vient-elle à abandonner sa fille, en pleine semaine de vacances ? Elle part pour fuir un passé douloureux où se mêlent la violence, la corruption, l’escroquerie et le meurtre. Mais qu’est-ce qui justifie d’abandonner un enfant ? Adam et Polly passeront l’été à Belleville, cette ville où l’on ne s’arrête pas, avec sa rue principale déserte baptisée « rue principale », son motel et son petit bar modeste où les habitués débitent chaque jour des blagues graveleuses au comptoir. Tous deux sont menteurs, méfiants, calculateurs et surtout très humains. C’est là la force du dernier roman de Laura Lippman. Narré au présent, il alterne les récits d’Adam et de Polly, mais aussi des personnages secondaires. Une barmaid jalouse, une détective amatrice de salades ou une grand-mère qui refuse de se voir vieillir, qui le temps d’un chapitre livre leur propre point de vue sur la vérité. Elle devient alors dangereusement malléable. Ils traversent le roman comme on traverse Belleville Delaware, juste assez longtemps pour l’enrichir et rappeler qu’aucune vie n’est jamais vraiment banale. Qu’on peut être froid par habitude plus que par nature, et que chaque homme aspire à la même forme de tranquillité, quelle que soit son histoire. Dans celle-ci, les mystères s’emboîtent comme des gigognes, et sont affaires de vérités humaines.

Corps inflammables

© Actes Sud

Corps inflammables de Laura Lippman, traduit de l’anglais (États-Unis) par Hélène Frappat, éditions Actes Sud, 352 pages, 22,50 €

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