La fille de Romy Schneider et Daniel Biasini dédie un livre à sa fille Anna et s’exprime pour la première fois sur sa mère. Elle évoque le manque, la construction, la vie et l’espoir.
A propos de
Romy Schneider
Sarah Biasini
Daniel Biasini
Elle le confie encore : sa mère lui a très peu manqué enfant. Sarah était si petite quand elle est partie. Sa grand-mère paternelle Monique, son père, sa nounou étaient si présents, si aimants. Devenue femme, Sarah Biasini a ressenti soudain l’absence, « le manque véritable. Celui de la relation entre deux femmes. Ne jamais avoir connu cette complicité, rigoler ensemble », expliquait-elle déjà en 2014 à Paris-Match. C’est ce sentiment qui l’a poussée, la quarantaine passée, à mettre enfin des mots sur ses douleurs, sa réalité à « aimer publiquement » Romy Schneider dans un livre publié chez Stock*. Joliment intitulé La beauté du ciel, il fait référence à celle qui l’observe sans doute de là-haut. « C’est plus doux, de se dire que nos morts nous regardent, non ?», raconte dans les colonnes du magazine Elle, celle qui «aime attraper plein de signes».
Ce livre, on ne l’attendait plus, tant la fille du journaliste Daniel Biasini, mari de Romy de 1975 à 1981, gardait ses distances avec le mythe, l’icône que le public s’était approprié, la privant de sa figure maternelle. Elle n’avait livré au fond qu’une interview officielle sur l’actrice jusqu’ici, qui accompagnait un ouvrage de photos réalisé par Jean-Pierre Lavoignat, en 2018. Le premier livre de Sarah est, selon la psychanalyste Catherine Bergeret-Amselek, « l’affirmation d’une femme qui a fait un travail analytique pour se déprendre de toutes les images que le public lui renvoyait de sa mère. Le travail d’écriture l’a sans doute aidée à intégrer son chagrin de petite fille de 4ans. Cette créativité lui a permis d’engager un dialogue avec la mère de son enfance pour devenir mère à son tour. » Et de percer le mystère Romy Schneider.
Sarah n’a que 4 ans lorsque sa mère est retrouvée morte dans son appartement de la rue Barbet-de-Jouy, dans le 7e arrondissement de Paris. Non loin de son corps, une boîte de médicaments, et un verre de vin. Romy « s’est laissé mourir », dira pudiquement Alain Delon, qui savait combien le décès de son fils, David, un an plus tôt, avait été un drame insupportable. Intolérable. A 4 ans, on n’est pas capable de faire un travail de deuil. A fortiori lorsqu’on n’a pas assisté à l’enterrement de sa maman et que les souvenirs fugaces ne reposent que sur ce que la famille rapporte, «un déjeuner le dimanche, un grand prix de F1 regardé ensemble à la télévision, des moments banals de bonheur partagé», énumère-t-elle dans le magazine Elle. Des anecdotes bien loin des biopics tire-larmes, des histoires tragiques de cette femme que l’on a dépeinte malheureuse et tourmentée… Ce qui met Sarah particulièrement en colère. Mais comment rétorquer quand tout le monde a mieux connu votre mère que vous ? C’est en tout cas à une femme humaine, « normale » et gaie à qui elle a voulu rendre hommage.
Après le choc de la profanation de la tombe de sa mère et de son frère, elle tombe enceinte…
Mais La beauté du ciel est aussi une déclaration d’amour à la fille de Sarah, Anna, née en 2018, de son union avec le metteur en scène Gil Lefeuvre. Et ce, après un épisode troublant. « Elle n’est pas arrivée par hasard », explique Sarah Biasini. En 2017, un coup de fil lui apprend que la tombe où reposent sa mère et David a été profanée. C’est d’abord un choc, puis une libération. « Cela m’a bouleversée de me retrouver devant ces deux noms gravés, ceux de ma mère et de mon frère. C’était un moment juste pour moi […] comme un petit enterrement privé », analyse-t-elle. Dans les jours qui suivent cet événement, Sarah ressent « un truc physique bizarre, l’envie de revivre cette journée constamment. » Trois semaines plus tard, elle découvre qu’elle est enfin enceinte alors qu’elle essayait d’avoir un enfant depuis dix ans. « C’est comme s’il y avait eu un déblocage. » Pour la psychanalyste Catherine Bergeret-Amselek, « c’est souvent difficile de tomber enceinte quand on a perdu sa mère, parce qu’il y a un voyage intérieur à effectuer pour retisser un cordon de transmission qui s’est rompu. Un parcours que l’on fait en psychanalyse. Cette terrible épreuve d’avoir à refermer le tombeau de sa mère lui a sans doute permis de s’autoriser à devenir mère à son tour ». Le plus beau symbole de ce lien recréé est le prénom que porte la fille de Sarah Biasini : Anna Rosalie. « Anna, j’adore », dit-elle. « Quant à Rosalie, c’est tout simplement le prénom du plus beau personnage de Romy à l’écran. » Touchantes retrouvailles.
Crédits photos : Action Press / Bestimage
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