Déguster des algues aux repas pourrait vite rentrer dans nos habitudes. Car haricot de mer, chlorelle et autres spiruline font de plus en plus parler d’elles sur la scène culinaire grâce à leurs exceptionnelles vertus santé. Zoom sur ces produits, sous le regard avisé de spécialistes.
Marée basse à table ! Kombu royal, dulse, nori, haricot de mer, chlorelle, spiruline… Avec les algues alimentaires, vos assiettes pourraient bien se colorer de vert, de brun ou de rouge. «Peu consommées en Occident, elles tirent pourtant énormément de bienfaits du milieu dans lequel elles évoluent, l’eau de mer pour la plupart», affirme la diététicienne nutritionniste Sibylle Naud. Mais alors, lesquelles choisir et, surtout, comment les consommer au quotidien ? Mode d’emploi.
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Un allié riche en minéraux
«Aux IIe et IIIe siècles avant Jésus-Christ, les algues étaient déjà consommées sur les côtes chiliennes, près de Terre-Neuve, en Amérique du Nord, et en Europe», rappelle Line Le Gall, maître de conférences au Muséum national d’histoire naturelle (Paris V) et coauteure de Algues, étonnants paysages (1). Marcher dans les pas de nos prédécesseurs en les consommant régulièrement reviendrait à profiter d’«atouts indéniables en matière de tonus et de stimulation des défenses immunitaires, surtout aux changements de saison», ajoute Benoît Legrain (2), spirulinier dans le Gard et auteur des Incroyables vertus de la spiruline (2).
Ses atouts ? Les oligo-éléments : «l’iode et le cuivre, qui participent au bon fonctionnement de la thyroïde, une glande située au niveau du cou et impliquée dans le bon fonctionnement de l’organisme», précise la diététicienne Sibylle Naud. Milieu marin oblige, les algues renferment une quantité indéniable de sels minéraux, notamment du fer et du magnésium «pour un effet bonne humeur et antifatigue, ainsi que du calcium qui va réguler la santé osseuse», ajoute la spécialiste. «C’est d’ailleurs les algues rouges nommées corallines qui fournissent le calcium des compléments alimentaires et des boissons à base de soja», complète la maître de conférences Line Le Gall.
Une source de fibres et de protéines
Riches en fibres, protéines et oligo-éléments : mangez des algues.
Les protéines se révèlent nombreuses, avec une teneur qui s’élève de «60 à 70 % pour la spiruline», précise Benoît Legrain. D’après Line Le Gall, «on en trouve aussi beaucoup dans les algues rouges et notamment l’espèce palmaria palmata, aussi appelée « dulse »». Les protéines sont indispensables au bon équilibre alimentaire et au renouvellement de la masse musculaire. L’algue dulse contient également des fibres «qui ralentissent le temps de digestion, prolongent la satiété et régulent le transit intestinal», souligne la diététicienne.
Des propriétés antioxydantes
Leur puissant pouvoir antioxydant provient notamment de «l’alliance de la vitamine C, la vitamine A, des caroténoïdes et des flavonoïdes, précise Sybille Naud. Ils ont pour mission de piéger les radicaux libres, des substances toxiques pour notre organisme». De son côté, la spiruline se révèle intéressante pour les femmes enceintes, «avec la présence de vitamine B9, dont elles ont besoin durant la grossesse. Pour les sportifs, la phycocyanine, un antioxydant, apporte de l’énergie et aide à la récupération», note le spirulinier.
Prudence avec la mousse d’Irlande
La chondrus crispus, plus communément appelée lichen carrageen, goémon blanc ou mousse d’Irlande, fait partie de ces nouveaux «superaliments» plébiscités sur le réseau social Pinterest. Source de fibres, acides aminés, lipides et minéraux comme ses semblables iodées, on lui prête des vertus anti-inflammatoires, digestives ou encore régulatrices de la thyroïde. Sauf que contrairement à la dulse, avec laquelle on la confond parfois, cette algue frisée rouge foncée de 10 cm, cultivée sur nos côtes européennes et dans des bassins au Canada, s’avère immangeable à l’état brut. «Sa paroi est robuste comme du plastique, assure Régine Quéva, spécialiste des algues (1). Si on souhaite la consommer, il faut la sécher afin de retirer toute l’iode, pour finalement se retrouver avec un résultat fade et pauvre en nutriments dans l’assiette.»
En réalité, son intérêt réside dans sa richesse en carraghénanes, des molécules utilisées et transformées par l’industrie alimentaire pour épaissir et gélifier les préparations. «Elles interagissent bien avec les protéines laitières et apportent de l’onctuosité», confirme Hélène Marfaing, chef de projet agroalimentaire au Centre d’étude et de valorisation des algues (Ceva). On en retrouve aussi dans les flans, les glaces, le jambon ou encore la bière derrière le code E407. La cosmétique y a également recours en raison de ses propriétés texturantes, assouplissantes et antivirales au contact de la peau.
Mais pour extraire ce fameux E407, les procédés industriels ne sont pas toujours sans conséquence. «L’algue est plongée dans de l’acide sulfurique puis dans de l’ammoniaque avant d’être transformée en paillettes et en poudre. Une fois passés par les stations d’épuration, ces bains saturés se transforment en boues acides qui sont épandues sur les champs pour finir par brûler la terre et ruisseler jusqu’à la mer», alerte Régine Quéva, qui propose des sorties algues et cuisine sur les côtes bretonnes pour sensibiliser les citoyens (reportées à 2021).
(1) Les Super-pouvoirs des algues de Régine Quéva, avec la collaboration du Dr Bruno Obriot; publié aux éditions Larousse, 144 pages, 12,90€.
Où les trouver et comment les consommer ?
Il faut privilégier les magasins bio qui offrent une large gamme d’algues à la fois séchées et fraîches, comme la kombu royal, la chlorelle ou la spiruline. On peut aussi se tourner vers les épiceries spécialisées en produits asiatiques, qui proposent notamment les wakame et nori. Une fois dans le rayon, mieux vaut se tourner vers des algues fraîches, conseille Sibylle Naud, car «on conserve plus de nutriments et la mâche incitera à manger plus lentement».
Dans le cas de la spiruline, notre attention doit d’abord se porter sur la façon dont elle est cultivée : dans des bassins à ciel ouvert (et non sous serre). On bannit la spiruline de Chine et on privilégie l’origine France. En 2017, après des signalements d’effets indésirables en France et un cas de réaction allergique, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) recommandait de «privilégier les circuits d’approvisionnement les mieux contrôlés par les pouvoirs publics». En terme de dosage, Benoît Legrain recommande de «ne pas dépasser 3 à 5 grammes, soit 1 à 2 cuillères à café par jour».
Fraîches ou séchées
Pour les enfants en bas âge et les femmes enceintes, il est recommandé de choisir des algues séchées pour éviter de contracter toute infection.
Pour conserver les algues fraîches, Line Le Gall conseille de les couvrir de gros sel.
Pour profiter de la texture douce et iodée, on peut utiliser les algues en condiment, en confectionnant un beurre. Pour cela, rien de plus simple : on fait ramollir du beurre et on incorpore les algues rouges dulse ou nori, sous la forme séchée. On mélange le tout et on tartine sur du pain en ajoutant des crudités. En plat, la variété brune kombu royal peut enrober un poisson lors d’une cuisson dans un bouillon, y laissant ainsi toute sa saveur. En accompagnement et pour varier les textures, on peut songer à marier des spaghettis à l’algue brune haricot de mer.
(1) Algues, étonnants paysages, de Line Le Gall et Denis Lamy, Éditions Delachaux et Niestlé, 192p., 29,90 €.
(2) Les Incroyables Vertus de la spiruline, de Géraldine Laval Legrain et Benoît Legrain, Éditions Jouvence, 144p., 8,70 €.
* Initialement publié le 6 septemble 2019, cet article a fait l’objet d’une mise à jour.
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