Ajoutez cet article à vos favoris en cliquant sur ce bouton !
Dépassée par la violence de son fils de 17 ans, cette mère de deux enfants se résout à porter plainte non pas contre lui mais pour lui. Le seul moyen qu’elle ait trouvée pour l’obliger à se soigner.
Peggy Silberling, 42 ans, directrice artistique. Son témoignage, “Pour lui” co-écrit avec son compagnon, l’écrivain Harold Cobert (Stock), s’adresse à tous les parents dont l’adolescent “dévisse” (drogue, décrochage scolaire, délinquance). Objectif : libérer la parole et attirer l’attention sur les dysfonctionnements de notre système.
Mère à 21 ans, veuve à 25 ans. Depuis le suicide de son ex-mari, violent, alcoolique et bipolaire, Peggy aime son fils d’un amour exclusif et protecteur. Face à la détresse d’Evan, orphelin de père à l’âge de 4 ans, elle lui fait cette promesse qui inflencera leur relation : “Jamais je ne laisserai tomber. Toi et moi contre le reste du monde ! ”
“Je ne supportais pas qu’il soit triste”
« Avec le recul, je prends conscience à quel point j’ai été une maman “airbag”. Sans doute pour compenser les graves défaillances de mes parents, qui me frappaient et n’ont pas su me protéger à l’âge de 5 ans d’un cousin abusif. Tomber enceinte fut le grand bonheur de ma vie. L’enfance d’Evan ayant commencé par un drame absolu, le suicide de son père, je décidai que plus personne ne devait lui faire du mal. C’est ainsi que je prenais systématiquement sa défense lorsque je le trouvais injustement puni à l’école. Jusqu’à la sixième, c’était un petit garçon joyeux, curieux, jamais en opposition. Notre complicité sautait aux yeux.
“C’est la fameuse “crise d’ado” ! »
Après sept ans à essayer de reconstruire à Lille une vie de famille normale avec Joseph, mon deuxième mari, et la naissance de Mélodie, je suis retournée vivre à Paris. Seule, avec mes deux enfants sous le bras. Mais les déménagements et changements d’écoles successifs ont fragilisé Evan. Pour se faire accepter par ses nouveaux amis, il se croyait forcé de faire le guignol. Ses notes ont commencé à chuter. Pour sa quatrième il accepta d’aller en internat à Pontoise, en région parisienne. C’est là qu’il a commencé à fumer de l’herbe… Viré de l‘internat, Evan a démarré sa troisième à la Rochelle. Entre-temps, il a rencontré Laetitia. Jaloux, parano, il ne supportait pas d’être séparé d’elle. Laetitia, elle, savait appuyer sur les bons boutons pour le faire exploser. Leur relation est vite devenue toxique et violente. A Pâques, il est sorti du système scolaire…
“Pour la première fois, je me suis sentie dépassée”
Comment imposer mon autorité à un ado d’1m87 qui faisait des crises à répétition et me volait de l’argent ? J’ai opté pour la fermeté, arrêté l’argent de poche, interdit les sorties. Des amis ont essayé de le raisonner afin de l’amener à entreprendre une formation, quelle qu’elle soit. Peine perdue. Impuissante, j’ai assisté à sa dégringolade, que j’expliquais par l’absence d’une véritable autorité paternelle : tentatives de suicide, urgences psychiatriques de Sainte-Anne, gardes à vue au commissariat pour détention de drogue et violence sur policiers… Seul espoir : Evan devait se rendre trois fois par semaine au CIAPA, un centre pour adolescents, pour suivre une thérapie assidue. Qui n’a donné aucun résultat tangible. Evan a continué de fumer joint sur joint, de se disputer avec Laetitia, d’insulter les forces de l’ordre…
“ Je tente d’obtenir l’aide des institutions. En vain.”
Face au refus d’Evan de consulter un addictologue, je me suis mise à adresser plusieurs courriers au juge des affaires familiales et aux aides sociales pour obtenir une aide éducative. Sans réponse. Je me suis alors rapprochée de la police, des psychiatres, mais tous se renvoyaient sans cesse la balle. J’ai aussi pris contact avec des assistantes sociales. Mais, bien qu’au chômage et en chute libre, je n’étais pas jugée prioritaire… Tout juste accusée d’être laxiste ! Lors de la deuxième convocation chez le procureur, je m’aperçois avec stupeur que les affaires ne sont pas recoupées lorsqu’il s’agit de « petits » délits commis par des adolescents, en vertu de la “protection des mineurs”. La seule manière d’obtenir un recoupement, c’est de porter plainte contre l’auteur des faits afin qu’une enquête soit ouverte. Porter plainte contre son propre enfant… Quel parent pourrait envisager un acte aussi contre nature ?
“J’avais espoir qu’il soit condamné à une obligation de soins”
Je m’y suis pourtant résolue, le 28 novembre 2015, suite à une nième altercation très violente avec mon fils. Pour Harold, mon compagnon, je n’ai plus d’autre choix. Le procès n’aura lieu qu’en juin 2017. Evan s’en sortira avec un simple rappel à la loi. J’en sors effarée, inquiète. Je ne revois mon fils que six mois plus tard, lors de l’enterrement de mon père. Comme je le craignais, Evan zone et a dépensé tout son héritage, débloqué à sa majorité. A l’approche de son anniversaire, nous convenons d’une date pour déjeuner. Je lui parle de mon projet de livre. C’est important pour moi qu’il comprenne mon histoire, comment j’ai vécu les choses. Je me dis que cela peut l’aider. Le titre, “Pour lui”, l’émeut. Il me fait promettre d’aller jusqu’au bout. Mais il refuse toujours de consulter. Il pense pouvoir s’en sortir tout seul ! Je comprends que je dois accepter de lui lâcher la main pour lui permettre de grandir, et surtout apprendre à vivre sans lui…”
⋙ « Le père, même décevant, même absent, est un repère qui structure »
⋙ 5 aides sociales dont vous ignorez l’existence
⋙ Enfant : comment lui parler pour qu’il écoute ?
⋙ 8 conseils pour parler de la mort aux enfants
Source: Lire L’Article Complet