Tranquillement planquée derrière votre tablette ou fièrement cramponnée à notre bon vieux livre en papier, on fond littéralement pour les livres excitants, qui font monter la température entre deux polars, une bio passionnante et un roman d’amour. Vous peinez à vous y retrouver dans un menu « littérature érotique » un peu trop dense ? On vous a fait une petite sélection. Ca va être chaud.
Le plus culte : Fifty Shades of Grey, de L.A James
Lorsqu’il a paru en 2011 aux Etats-Unis, puis un an plus tard en France, 50 nuances de Grey a provoqué une véritable déflagration dans les chambres à coucher du monde entier. Volontiers qualifié de « porno pour maman », la romance culte qui rendit Anastasia Steele et Christian Grey mondialement célèbres fit également rentrer dans les mœurs les pratiques plus ou moins BDSM. Gentiment SM, « Fifty Shades » enchaine les scènes de domination où le beau Grey, évidemment milliardaire, évidemment froid et cruel mais évidemment fragilisé par un insondable secret enfoui, initie son innocente partenaire aux plaisirs de sa chambre rouge. Résultat de ce ras de marée de librairie ? Une rupture de stock générale chez les vendeurs de menottes et une envolée des ventes de sex-toys qui ne quittèrent plus dès lors les tiroirs des tables de chevet. Vous êtes passé à côté du phénomène ? Ne serait-ce que ne pas l’avoir lu, c’est un peu comme dire qu’on n’a jamais vu Les Bronzés ou mangé de raclette, vous êtes obligé de tester au moins le tome 1.
Le + ? Efficace, pas mal écrit, scénario honnête.
Le – ? Un personnage féminin nunuchissime. Une révolution littéraire pas très féministe.
Cinquante nuances de Grey, E L James, éditions Lattès, en vente sur la Fnac
Le plus féministe : June, de Virginie Bégaudeau
Parce que la littérature érotique, ça n’est pas qu’un milliardaire, un médecin ou une rock star qui enlève une oie blanche dans son hélicoptère pour lui faire enfin expérimenter l’orgasme, les éditions La Musardine et la collection .G, « écrite par des femmes, pour des femmes », ont su adapter leur catalogue à d’autres fantasmes féminins. Plus réalistes, moins patriarcaux, plus féministes, quoi. June en est la preuve. Sorte de Thelma et Louise de papier, ce roman hot emmène son héroïne, June, mère de famille initiée par sa jeune voisine Elsa, à travers un road trip dans l’Amérique brûlante des années 70. « Il y a des hommes dans ce roman mais ils ne sont pas là pour dominer, pour traiter les femmes en objet. Ce sont des femmes libres qui ne sont ni jugées ni moralisées », déclarait l’auteure à la sortie de son livre en 2017. On craque pour ce portrait de femmes fortes et émancipées qui vont au bout de leurs rêves et de leurs désirs, et ouvrit la voie à une nouvelle vague de récits érotiques à l’imaginaire enfin libéré.
Le + ? Au-delà des scènes érotiques, on goûte le plaisir d’une évasion dans le temps et les grands espaces d’une Amérique brûlante.
Le – ? L’intervention (évitable ?) d’un personnage masculin dans ce duo lesbien qui aurait pu le rester.
June, de Virginie Bégaudeau, éditions La Musardine, en vente sur Amazon
Le plus « réel » : L’Emprise, d’Alexandre Contart
Il caracole en tête des ventes depuis sa sortie à compte d’auteur, et c’est surtout l’un des (très) rares romans du genre à être écrit par un homme. Le pitch de « L’Emprise » ? « 50 nuances était un fantasme, L’Emprise est inspiré de faits réels ». Vécus par l’auteur ? Il semble bien. Comme son héros – dont il porte le prénom –, celui-ci vit à Lille, où se déroule cette intrigue « très DSK », où se mêlent luxe et luxure, champagne et soirées libertines. On a l’impression d’être une petite souris infiltrée dans ce monde secret des boîtes coquines dans lesquelles on n’a jamais osé rentrer (tout comme dans la tête d’un homme, ce qui est indéniablement intéressant). Les lecteurs d’Amazon ont adoré, et continuent de placer cet opus parmi leurs préférés des mois après sa sortie. Un gage.
Le + ? Une intrigue qui se déroule en France, sans Cindy, John et anglicismes en tout genre, ça change.
Le – ? Le côté SM, pour celles à qui ça ne fait ni chaud ni froid
L’Emprise, d’Alexandre Contart, ed. Alexandre Contart, en vente sur Amazon
Le plus littéraire : Vénus érotica, d’Anaïs Nin
Preuve que la littérature érotique féminine ne date pas d’hier, et ne se démode pas forcément, Venus erotica, écrit il y a sept décennies, caracole encore aujourd’hui en tête des ventes des classiques du genre. Commande d’un mystérieux collectionneur à Anaïs Nin, compagne d’Henry Miller, ces quinze nouvelles poétiques, sensuelles et fantasmagoriques parviennent à concilier qualité littéraire, transgression et amour. On y croise des personnages récurrents, des univers parfois déroutants, le tout dépeint dans un style savoureux, qui rend ce recueil assez inclassable mais pour le moins incontournable. « A cinq heures, je sentais en moi des frissons de sensualité que je partageais avec Paris. Dès que la lumière déclinait, j’avais l’impression que toutes les femmes couraient retrouver leur amant, que tous les hommes couraient vers leur maîtresse. » L’amour avant le confinement.
Le + ? Le chic du vintage et d’une langue élégante.
Le – ? Certaines nouvelles dont les mœurs déroutantes datent d’un temps qu’on est contents d’avoir vu disparaître.
Vénus érotica, Anaïs Nin, Le Livre de poche, en vente sur la Fnac
Le plus visuel : Fraise et chocolat, d’Aurélia Aurita
Pourquoi ne pas ajouter un peu d’image au récit, pour faire monter plus encore son excitation ? C’est ce que font depuis des décennies les (nombreux) aficionados de BD érotiques, univers longtemps resté très masculin. Bonne nouvelle, les auteures s’y font doucement une jolie place, et nous offrent des albums piquants, coquins, aux fantasmes plus proches des nôtres (moins de pirates, de soubrettes et de poitrines XXXL). C’est le cas d’Aurélia Aurita, et de son Fraise et chocolat (tomes 1 et 2, quitte), préfacé par le maître Joann Sfar. Fraîche, drôle et ultra sincère, cette autobiographie illustrée en deux volumes raconte, sans fards, la vie de couple de l’auteure et de son compagnon. Au-delà de scènes de sexe crues et très contemporaines, on suite le quotidien de protagonistes qui nous ressemblent, et nous éloignent enfin des héros souvent trop clichés, riches ou musclés des classiques du genre. Une jolie façon de pénétrer dans l’univers peu connu de la BD érotique féminine avec cet ovni littéraire devenu du jour au lendemain un incontournable.
Le + ? Comme les gamins, on aime quand même bien quand il y a des dessins.
Le – ? Comme beaucoup de livres très autobiographiques, il faut réussir à se défaire de l’image de l’auteure sous les traits de l’héroïne.
Fraise et chocolat, d’Aurélia Aurita, Les Impressions nouvelles, en vente sur Amazon