Interviewée par "L’Équipe", Clémentine Sarlat, ancienne co-présentatrice "de Stade 2", a révélé avoir subi du harcèlement moral au sein de la rédaction, qu’elle a fini par quitter en juin 2018. La directrice de France Télévisions, Delphine Ernotte, a annoncé l’ouverture d’une enquête interne.
Samedi 4 avril après-midi, au lendemain de la parution d’une enquête de L’Équipe sur le sexisme subi par les journalistes de sport à la télé et l’interview de Clémentine Sarlat, ancienne co-présentatrice de Stade 2, qui révèle y avoir vécu du harcèlement moral, France Télévisions a ouvert une enquête interne. La chaîne l’a annoncé le jour-même via communiqué.
Marginalisée après son congé maternité
« J’allais à Stade 2 en pleurant », lâche Clémentine Sarlat à Sacha Nokovitch, journaliste média à L’Équipe. La journaliste spécialiste du rugby affirme avoir été victime de harcèlement moral au service des sports de France Télévisions, surtout après son retour de congé maternité, alors qu’il s’agit d’ « une période fragile pour les femmes », regrette-t-elle.
Elle raconte : « En mai 2017, avant mon congé maternité, la direction des sports m’annonce que je vais co-présenter Stade 2 avec Matthieu Lartot. En réalité, c’était de la com. Il fallait juste annoncer une présentatrice. Lorsque je reviens, en janvier 2018, on me dit : ‘À cause des lumières et des caméras, tu ne pourras pas être à côté de Matthieu’. Je n’étais plus co-présentatrice. »
À cette même période l’ex-journaliste télé de 32 ans demande une augmentation. « Rends-toi d’abord indispensable ! », lui aurait-on alors répondu.
Clémentine Sarlat souffre aussi d’avoir été déplacée « dans un bureau à part, loin des rédacteurs en chef », là où aucun de ses confrères ne vient lui parler. La « goutte d’eau » ? Lorsqu’elle est mise en RTT sur les jours de télé-travail qu’elle avait demandés « pour [s]’occuper plus facilement de [s]on bébé. »
C’en est trop : elle décide de quitter ses fonctions et le milieu de la télévision en juin 2018. Créatrice et productrice du podast La Matrescence, sur les changements qui se produisent dans la vie des parents après la naissance de leur enfant, la mère se sent bien aujourd’hui dans ce métier où « il n’y a pas d’image ».
Des réflexions sur ses compétences, des blagues sexistes…
Avant ce douloureux retour en rédaction, Clémentine Sarlat essuyait déjà des blagues lourdes ou des réflexions à propos de ses compétences. Elle se souvient par exemple ne pas avoir ri à une « blague » sexiste d’un collègue, et être passée pour la « reloue » : « Il a répété : ‘On ne peut rien dire aux femmes’. »
Quant à ses compétences, dur d’être mise en confiance quand on lui lance qu’elle est là « seulement parce qu'[elle est] blonde aux yeux verts. » « Au service des sports, on côtoie des gens géniaux mais aussi des gros cons. Avec les vieux, dès que je mettais une jupe, j’avais forcément le droit à une réflexion », révèle-t-elle encore.
Pourquoi ne pas en avoir parlé publiquement ? « Je me suis toujours demandé si ce que j’avais vécu était assez grave pour prendre la parole, explique-t-elle, toujours à L’Équipe. Mais MeToo fait prendre conscience aux gens qu’on a le droit de dire qu’on vit un quotidien difficile. »
Le harcèlement est intolérable, « particulièrement dans le service public »
Des propos qui ne sont pas passés inaperçus, et ont été beaucoup relayés sur les réseaux sociaux durant le weekend. Jusqu’à remonter à la direction de France Télévisions. « J’ai lu les propos de Clémentine Sarlat (paru dans l’édition de L’Équipe du vendredi 3 avril, ndlr). J’ignorais cette situation et j’ai engagé immédiatement une enquête », confirme Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions au quotidien sportif, dans un nouvel article paru le dimanche 5 avril.
La présidente du groupe audiovisuel tient à être ferme : « Le harcèlement est intolérable dans toutes les entreprises et particulièrement dans le service public. L’égalité entre les femmes et les hommes est un combat que je ne lâcherai pas. »
Durant le week-end, Delphine Ernotte a appelé Clémentine Sarlat, confie cette dernière à L’Équipe. « Elle m’a appelé et m’a dit : ‘Je vous crois, je ne remets pas en doute votre paroles mais je veux connaître le contexte’. »
Sur Twitter, le 5 avril, Clémentine Sarlait s’est fendue d’un simple mot face à la vague de soutien reçue : « Merci ».
- La championne de patinage artistique Sarah Abitbol révèle qu’elle était violée par son entraîneur
- Harcèlement sexuel au travail : comment contre-attaquer ?
Source: Lire L’Article Complet