Comment passer du plein volume au mode confiné? Chacun sa partition: Yael Naim, chanteuse confirmée, reste philosophe, Bandit Bandit, groupe en éclosion, ronge son frein et Yan Péchin, guitariste réputé, touche à peine son instrument.
Révélée et plongée dans un tourbillon depuis le tubesque « New Soul » (2007), Yael Naim a sorti le 20 mars son nouvel album « Nightsongs » (label tôt Ou tard). Alors que le retranchement chez soi devenait la règle.
« Pour cet album, rien ne s’est passé comme je le pensais, alors je me suis dit, si c’est comme ça qu’il doit être libéré, allons-y », dissèque pour l’AFP la Franco-Israélienne, obligée d’appuyer sur pause « au lieu de courir partout et de faire de la promo ».
Son opus colle parfaitement à l’époque, magnifique voyage intérieur. La création des morceaux – étirée sur trois années – a coïncidé pour l’artiste au passage à la quarantaine. Dans son double sens, puisque la chanteuse s’est isolée pour composer, souvent de nuit.
– « Se connecter à l’autre » –
« Beaucoup de choses se sont passées, la naissance de ma deuxième fille, la mort de mon père », détaille-t-elle. « C’était une période de remise en question, avec le besoin de me confronter à mes vieilles peurs. J’avais besoin d’aller au bout de quelque chose, sans avis extérieur. L’album est donc immersif, une plongée du début à la fin ».
Depuis la mise en place du confinement, pour « se connecter à l’autre », faire vivre ses chansons, « créer dans la contrainte », Yael Naim a d’abord posté des lives intimistes sur Instagram avant d’intégrer le festival en ligne « Je reste à la maison ».
Pour Bandit Bandit, gang rock en train de se faire un nom, l’extinction des réacteurs juste avant le lancement a été plus « dure à encaisser » confient d’une seule voix à l’AFP Maëva et Hugo, les deux leaders, couple à la ville.
« Un jour, on est sur la route et +bam !+ on apprend qu’il n’y a plus de concert, demi-tour, 9-10 heures de trajet… », souffle Hugo, guitare et voix. « Et puis après, c’est tout le calendrier en place depuis un an qui est remis en question » complète Maëva, la chanteuse.
Il y avait notamment un concert au Point Éphémère à Paris, devant l’œil des pros (reporté au 16 juin), et le Printemps de Bourges (annulé).
– Ne pas « se plaindre » –
« On ne va pas se plaindre, on est tous sur le même bateau, pas la peine de mettre la santé de milliers de gens en danger en festival », relativise Maëva.
La sortie physique d’un CD éponyme en édition limitée (Ditto Music) a été reportée au 19 juin (vinyle le 20 juin, jour du « Disquaire Day »). Il y aura ensuite parmi les rendez-vous les Francofolies (10-14 juillet à La Rochelle).
Et d’ici là ? Entre les lives sur les réseaux, « on lit, on écrit de la musique », relate Hugo.
Pour d’autres, la musique est mise de côté. Comme Yan Péchin, familier pour qui a vu les concerts d’Alain Bashung ou d’Hubert-Félix Thiéfaine: c’est lui le guitariste torse-nu sous sa veste, cheveux longs, en transe.
« Une demi-heure de guitare par jour, c’est tout. Je suis entouré d’une vingtaine d’instruments, mais je ne fais pas l’effort », avoue le compositeur à l’AFP de son débit de mitraillette. Une grosse déprime? « Pour créer, j’ai besoin de rencontres , du bruit du dehors ».
Cet oiseau de nuit, qui ne mangeait jamais chez lui et ne se couchait jamais « avant 4 ou 5 heures du matin », est « passé d’un extrême à l’autre ».
L’hyper-actif – architecte de la soirée hommage à Bashung au Grand Rex à Paris, accélérateur de particules du dernier album de Brigitte Fontaine, etc – a vu la « fatigue » lui tomber dessus: « on aurait pu croire que j’étais malade, mais non ». « Ma créativité est close en confinement. Je sais que ça reviendra. »
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